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Le GFE à cœur ouvert

A l’occasion du salon de Rosières aux Salines qui clôture le « Tour de France des Etalons 2010 », nous sommes allés à la rencontre d’un de ses initiateurs, Arnaud Evain, par ailleurs Directeur du Groupe France Elevage et des ventes Fences. Il Photo 1 sur 1
est également l’époux d’Henriette Evain qui gère le Haras de la Cour Bonnet et sa quinzaine de poulinières qui ont donné naissance aux Champions Kraque Boom, Barbarian, Olisco. Cette multi-casquette en fait un observateur privilégié de la situation de l’élevage.

Avant d’aborder les sujets d’actualité, pouvez-vous nous parler du GFE en général : il s’est créé en 2003 et il est très vite devenu le 1er étalonnier privé français. Comment expliquez-vous cette ascension si rapide ? Le GFE a en fait repris le fonds de commerce de la société PHI que j’avais créée en 1986 et qui comportait un « portefeuille d’étalons » assez consistant ! Le GFE a rapidement multiplié par deux cette activité car le concept de sa création s’est avéré juste et les circonstances ont été favorables. Le concept est de permettre à des éleveurs naisseurs de devenir étalonniers dans un esprit coopératif et avec la souplesse d’une entreprise privée. Bon nombre de ceux qui sont devenus actionnaires ne se sont pas contentés de profiter passivement des multiples avantages que cela leur procurait mais ils ont été des acteurs réels du développement du Groupe. C’est particulièrement vrai pour ceux qui ont été élus administrateurs. Par ailleurs nous avons eu la chance de pouvoir acheter Mr Blue qui a contribué à motiver nos actionnaires et à faciliter notre démarrage.

Comment fonctionne le GFE et est-il encore possible d’en faire partie ?

Au niveau du fonctionnement, le Groupe est dirigé par un conseil d’administration, composé de 6 actionnaires élus pour deux ans et qui prennent avec moi toutes les décisions concernant le recrutement, la politique de tarification, la promotion et la mise en œuvre des services. Aujourd’hui ces administrateurs sont Caroline De Faucigny, HenryBrugier, Pascal Cadiou, Raphaël Dulin, Yannick Fardin et Fabrice Paris. Notre société a un capital variable : les actionnaires qui souhaitent nous quitter revendent leur action à la société qui a obligation de la racheter à sa valeur mathématique c’est à dire à sa valeur comptable réelle (qui était de 750 € au départ et qui est de 924 € aujourd’hui). De la même façon, la société peut admettre de nouveaux actionnaires et leur vend une ou plusieurs actions à cette même valeur. Pour devenir actionnaire, il faut postuler auprès du GFE et c’est le conseil d’administration qui décide d’accepter ou non les candidatures. Les critères sont liés au degré de motivation et de partage des valeurs du groupe plus qu’à la taille de l’élevage et une dizaine d’éleveurs intègre le groupe chaque année.

Quelle est votre politique de recrutement d’étalons ? Comme nous l’indiquons dans notre campagne de promotion 2010, nous voulons être ?« recruteurs de talents » et nous les cherchons partout, depuis les concours d’élevage jusque sur la scène internationale ! Côté étalons confirmés, après Mr Blue, nous avons pu acquérir Corofino, Calvaro et récemment une part de Kannan et de Jazz Band Courcelle. Côté jeunes, après Pezetas du Rouet, Consul Di Vie et Quool du Bois Margot, nous continuons à chercher les jeunes talents sur les concours étalons et le circuit SHF. Nous n’investissons que dans des étalons approuvés et nous nous préoccupons beaucoup de créer des conditions favorables à leur testage rapide. C’est ainsi que nous avons déjà pu faire sauter les premiers poulains de Pezetas et Quool, qui s’annoncent très intéressants ! Il y a également des jeunes chevaux que nous proposons sans les avoir achetés mais parce que nous y croyons; c’est le cas en particulier de Regan Kervec et du Champion ex-aequo des 4 ans Vargas de Ste Hermelle. Les talents nous intéressent à tous les âges si nous pouvons les proposer à un bon rapport qualité-prix et nous passons également des accords avec des propriétaires d’étalons intéressants qui acceptent de jouer le jeu de notre politique tarifaire; c’est par exemple le cas en 2010 de Mozart des Hayettes, Quintus ou encore Frazes et Orlando que vous avez pu apprécier ici à Rosières aux Salines.

En dehors de Mr Blue, quels ont été vos autres achats d’importance ?

Je vais vous faire la même réponse qu’au magazine Selle-Français et que j’ai déjà développé dans vos colonnes en parlant des hybrides, des métis et des « glorieux bâtards ». Beaucoup de gens qui parlent de « patrimoine génétique spécifique » des Selle Français ou du Holstein ou du Hannovre et qui évoquent le risque de « polluer la race » ou de perdre notre « spécificité génétique » font des confusions et des contresens graves ! Il ne faut pas confondre généalogie et génétique! Ce qui fait la spécificité du SF, ce n’est pas un patrimoine génétique qui lui serait propre car il n’existe pas. Ce « patrimoine génétique » est commun à toutes les races de chevaux de sport en Europe; le SF a été créé il y a 40 ans en amalgamant les populations locales des différentes régions productrices de chevaux de sport et en croisant des PS, des AA, des TF et des demi-sang choisis par des hommes, en fonction d’objectifs de production. Ce sont les hommes, les terroirs et les objectifs de production qui donnent un contenu aux stud-books et aux races et pas les « monopoles génétiques » dont ils pourraient se prévaloir parce qu’ils n’existent pas et n’ont jamais existé ! Les « chefs de race » d’hier de tous les stud-books ont des ancêtres communs au début du 20e siècle et ceux d’aujourd’hui ont des semences qui circulent dans le monde entier ! Les stud-books sont plus ou moins sévères dans l’admission de « partenaires étrangers » par la voie mâle, mais aucun n’est fermé, et ils sont tous largement ouverts par la voie femelle ! Aujourd’hui 60 des 100 meilleurs chevaux du monde ont un père et un grand père inscrit à des stud-books différents et prétendre que c’est la génétique qui explique les différences de résultats entre les SF et les KWPN ou les BWP est aussi absurde que de prétendre que c’est la nature du lait qui fait la différence entre le Camembert et le Livarot ! Ce qui compte c’est l’environnement, le travail et les choix des hommes et les qualités intrinsèques d’un étalon ou d’une poulinière, pas le livre généalogique auquel il est inscrit à l’origine ! Le stud-book SF l’a bien compris et il a raison de s’ouvrir aux autres, ce qui lui permet d’avoir une plus large base de sélection pour choisir avec sévérité et discernement les jeunes étalons les plus prometteurs ! Cor de la Bryere n’aurait peut-être pas été en France le chef de race qu’il a été en Allemagne et il n’est pas certain qu’Uriel aurait connu en Hollande la carrière qu’il a eu en France. Au GFE, nous nous intéressons à la généalogie de nos étalons et à leurs caractéristiques propres; très vite nous observons celles qu’ils transmettent à leurs descendants… C’est sur cette base que nous formulons les Conseils de Croisements que nous adressons chaque année à tous les éleveurs.

Vous lancez cette année pour les chevaux de sport le concept de Foal Sharing, pouvez vous nous en dire un peu plus à ce sujet ?

Cette opération nous a paru essentielle pour nous permettre de faciliter le testage de nos jeunes étalons et pour nous obliger à mettre en place un véritable outil d’aide à la vente des foals. Le principe est le suivant; l’éleveur ne paye que la partie « frais techniques » de la saillie et, en échange du solde de saillie il nous cède 25 % du produit à naître. A la naissance, deux cas de figure :

- L’éleveur décide, dans les 30 jours suivant la naissance, qu’il veut garder le poulain pour l’élever ; il a alors la possibilité de nous racheter notre part à un prix convenu à l’avance égal à 150 % du solde de saillie normal (soit 750 euros au lieu de 500 par exemple).

- L’éleveur décide que le poulain est à vendre. Nous nous efforçons alors ensemble de trouver un client. Nous partagerons le prix de vente 3/4 pour lui et 1/4 pour nous. Si nous trouvons un client mais que le prix lui semble insuf?sant, il nous rachète notre part sur la base du prix que nous lui avons offert et, si nous n’avons ni l’un ni l’autre trouvé un client avant le 31 Décembre 2011, nous lui faisons cadeau dé?nitivement de notre part et la saillie ne lui aura alors coûté que les frais techniques. En résumé, l’éleveur ne paye sa saillie que s’il décide qu’il veut élever son poulain. S’il veut le vendre et que nous sommes incapables de lui trouver un client, nous lui faisons cadeau du solde de saillie !

Le Tour de France des Etalons se termine ; quelle est votre impression ?

Qu’est ce qu’on a eu froid !!! La température dans les manèges a rarement dépassé les 5 degrés mais les éleveurs ont répondu partout présent de manière chaleureuse ! Ce Tour de France représente une réél effort de la part des étalonniers, il est coûteux et demande beaucoup d’énergie mais il est essentiel à la bonne information des éleveurs. Nous essayons, avec la lettre du GFE et la richesse d’informations de notre site Internet d’aider le plus objectivement possible les éleveurs à faire leur choix, mais rien ne remplace le « coup d’œil du propriétaire de la jument ». Ces rencontres nous permettent également d’échanger sur la situation, les perspectives d’avenir et de tester de nouveaux services ou de nouvelles offres comme le Foal Sharing. C’est essentiel ! Avec le guide de l’ASEP et du Tour de France et en se rendant sur une ou deux étapes, les éleveurs peuvent choisir leur « partenaire étalonnier » et définir avec lui le ou les étalons qui conviennent le mieux à leurs juments.

Que pensez vous de la réforme des Haras Nationaux et en particulier de la création du GIP ?

Avec le GIP c’est la G rosse Incertitude Prolongée ! L’Etat veut distinguer ses actions d’aide à la filière de son activité dans le secteur concurrentiel. C’est une bonne idée mais je n’ai pas l’impression que les pouvoirs publics soient prêts à aller jusqu’au bout de cette logique de recentrage de l’Etat sur les véritables missions de service public. Cette logique voudrait que l’aide aux races transite par l’IFCE et soit mobilisée en collaboration avec les associations de races concernées et que les aides « toutes races » pour la filière sport soient tansmise par l’IFCE à la Société Hippique Française qui s’est organisée pour devenir la maison mère du cheval de sport. Cette logique voudrait donc que toutes les activités « marchandes » regroupées à l’intérieur du GIP deviennent rentables et/ou soient privatisées ou disparaissent ! C’est le sens de la demande qui a été adressée au Ministère de l’Agriculture le 22 octobre dernier par l’ANSF, la Fenecso, l’Asep et la Fadeteq. Malheureusement nous n’avons pas encore de réponse à cette attente et le premier budget du GIP prévoit 30 millions d’€ de dépenses pour 10 millions de recettes, ce qui ne laisse pas augurer d’une saine concurrence. Mais comme rien n’est arrêté, il n’est pas interdit d’espérer que le bons sens l’emporte finalement !

Quel est d’après vous l’impact de la crise économique sur l’élevage de chevaux de sport et qu’attendez vous de cette saison ?

Je vous renvoie à l’éditorial de la Lettre du GFE ! Il est indéniable que les chevaux se vendent moins bien, sauf dans le très haut de gamme qui a été peu affecté. Il est également évident que cela pèse sur les achats des marchands et des investisseurs dans les jeunes chevaux et que cela pose des problèmes aux éleveurs dont les herbages sont plus chargés que les tiroirs-caisses ! Mais, en parallèle, le nombre de cavaliers continue d’augmenter, ainsi que la pratique de l’équitation de compétition. Par ailleurs les chevaux « Made in France » reprennent la cote sur la scène internationale. De plus le rapprochement Haras-ENE dans l’IFCE ne peut que concourir à renforcer l’utilisation des jeunes chevaux par les enseignants et les cavaliers amateurs et il est certain que la demande de jeunes chevaux va reprendre vigoureusement avec la sortie de crise. Les poulains qui naîtront cette année seront sur le marché en 2013, 2014, au moment des Jeux Equestres Mondiaux en Normandie et il est vraisemblable que nous manquerons de bons chevaux pour satisfaire la demande d’alors. A titre personnel, nous avons augmenté le nombre de juments saillies à la Cour Bonnet et j’encourage tous ceux qui peuvent traverser la période actuelle sans trop de dommages à en faire autant ! C’est pour les aider que nous faisons très attention à notre politique de prix et que nous mettons en place des offres comme le Foal Sharing !

Quelle est votre stratégie de développement pour les années qui viennent ?

En France, nous vendons entre 1 400 et 1 500 saillies par an et nous comptons sur notre politique d’incitation au testage des jeunes pour progresser, au moins en parts de marché. Nous souhaitons profiter du prestige international de Mr Blue et Calvaro dont nous gérons les dernières paillettes en congelé, et de Kannan, Orlando… Pour nous renforcer en Europe et nous implanter plus solidement dans le reste du monde. A l’export, notre développement passe par des partenariats avec des acteurs reconnus dans les pays visés. En France et en fonction de l’évolution du contexte de la concurrence, nous envisageons des partenariats avec les associations d’éleveurs qui seraient prêtes à investir à nos côtés dans une politique d’étalonnage fondée sur l’achat et le testage des jeunes. Notre groupe est composé d’éleveurs et il est géré pour aller dans le sens de leurs intérêts et de leurs préoccupations. Toutes les synergies avec d’autres forces qui veulent aller dans le même sens sont examinées avec la plus grande attention…
Etienne Robert
Préambule au projet de constitution du GIP

Afin de transférer progressivement au secteur privé et associatif la gestion des activités de l’EPA des Haras Nationaux relevant du secteur concurrentiel et n’ayant pas un intérêt stratégique justifiant leur maintien au sein d’un établissement public à caractère administratif, Attendu que

L’Etat entend se désengager progressivement d’un certain nombre de ses activités dans le secteur marchand au profit d’un relais assuré par les professionnels dans le cadre de structures privées ou associatives. Au nombre de ces activités figurent entre autres l’étalonnage et l’identification de terrain.

- Ce désengagement doit se faire en concertation avec les collectivités territoriales actuellement concernées par ces activités ou susceptibles de l’être à l’avenir, afin de maintenir, entre autres, une présence du service de la monte publique sur tout le territoire.

- Ce désengagement doit se faire en concertation avec les personnels de l’EPA actuellement concernés par ces activités pour que leurs intérêts de salariés soient respectés. - Nonobstant l’existence d’un important déficit au titre de ces activités prises dans leur globalité, ce désengagement au profit de nouvelles structures privées ou associatives, organisées à l’échelon local ou régional et en partenariat éventuel avec certaines collectivités territoriales devra se faire dans le strict respect des règles de la concurrence vis à vis des structures privées ou associatives existantes et exerçant actuellement ces activités. - Les associations nationales de races qui en manifesteront le désir pourront s’impliquer dans la gestion de l’identification de terrain.

- Les associations régionales d’éleveurs souhaitent pour certaines d’entre elles, s’impliquer dans la gestion ou la cogestion de carrières d’étalons et de centres techniques. Les soussignés se sont rapprochés en vue de participer à la constitution d’un GIP, pour une première période de 5 ans, ayant entre autres pour objets :

1) De réaliser immédiatement l’inventaire des centres techniques actuellement gérés par l’EPA avec les données fournies par l’EPA au moment de la constitution du GIP précisant :

• Leur emplacement géographique et la nature de leurs relations contractuelles éventuelles avec les associations ou collectivités territoriales intéressées à leur fonctionnement, ainsi que la description des équipements et la liste des étalons actuellement affectés à leur fonctionnement.

• Le résultat de leur exploitation sur les trois dernières années établi d’après la compatibilité analytique, précisant entre autre les coûts des personnels affectés en permanence ou temporairement à leur fonctionnement ainsi que leur ancienneté et leur statut.

• Tous les éléments de nature à permettre à un repreneur éventuel de formuler des propositions de reprise de l’activité exercée.

2) De recenser auprès des associations régionales d’éleveurs, des associations nationales de races, des collectivités territoriales et des opérateurs privés, ainsi qu’au sein des personnels opérant dans ces centres techniques ou tout autre repreneur potentiel, les possibilités de reprise permettant la poursuite des activités actuellement exercées.

3) D’établir pour chaque station un cahier des charges pour sa reprise et la poursuite de ses activités dans le respect des engagements éventuels vis à vis des collectivités territoriales.

4) D’organiser progressivement la transmission de ces centres techniques au nouvel opérateur répondant le mieux au cahier des charges ci-dessus, en privilégiant, chaque fois que ce sera possible, les solutions portées par les associations régionales d’éleveurs partenaires du GIP.

5) D’organiser, dans des conditions à définir, en concertation avec les partenaires du GIP, la transmission aux repreneurs de ces centres techniques, des étalons propriété actuelle de l’EPA et d’imaginer avec ces mêmes partenaires l’approvisionnement à venir de ces centres en génétique servant le progrès de chaque race et l’intérêt régional des éleveurs.

6) De confier à ces centres, en concertation avec les partenaires du GIP, ainsi qu’aux autres acteurs privés qui en feront la demande, la mission de proposer aux éleveurs la génétique de races dites « en difficulté » pour lesquelles l’Etat aura, en concertation avec les représentants des races en question, décidé d’un programme particulier de soutien.

7) De réfléchir aux activités complémentaires du secteur marchand qui pourraient être encouragées ou facilitées par les partenaires du GIP pour rendre viables les centres transférés !

8) La mise en œuvre de ces activités pourra, si les soussignés le décident, conduire à une prolongation de l’existence du GIP au delà des 5 ans de sa durée de vie initiale.

9) Les soussignés s’engagent à mettre en œuvre ces actions dans une transparence totale, notamment financière, permettant à chacun d’entre eux de contrôler que ces actions sont conduites dans le respect des attendus présidant à cet accord.
Pour L’Union des Races de Chevaux de Sport : Y. Chauvin Pour l’Asep : B. Le Courtois Pour la Fadeteq : L. Mangold Pour la Fenesco : P. Martin

18/03/2010

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