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Le rêve olympique de Perrine Cateline et Sylvain Pitois

  • Urgada, la matronne
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  • Mineapolis
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  • Lutèce
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  • Filadelfia, (Quick Star-Urgada) pleine d'Ermitage Kalone
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  • Home sweet home
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Tout éleveur en rêve, de faire naître un cheval olympique. C’est même le carburant principal de ceux qui chaque matin observent leurs poulinières en imaginant le père idéal. Perrine Cateline et Sylvain Pitois, jeunes éleveurs bretons, naisseurs et toujours propriétaires de Dubaï du Cèdre ont atteint ce graal. Rencontre à Châtillon-en-Vendelais, en Ille et Vilaine, berceau de Dubaï, avec ce passionné de génétique qui, depuis son jeune âge, a tout élevé : pigeons, lapins, moutons et chevaux.

A Châtillon-en-Vendelais, il y a Le-Bas-Cédré et Le-Haut-Cédré. Dubaï est née dans Le-Bas mais prédestinée aux sommets, elle a vite rejoint le-Haut, le haut de l’affiche. Confiée dès l’adolescence aux cavaliers de l’écurie de Bruno Rocuet, Valentin Besnard et Margaux, elle a fait ses classes avec déjà un statut de star très tôt détecté. A 7ans, en 2020, l’alezane est dans le piquet de Margaux Rocuet qui va dominer ce championnat que le monde entier du cheval observe : championne avec Djibouti de Kérizac (0+0) et vice-championne avec Dubaï du Cèdre (0+4 sur le dernier obstacle). Sacrée performance.

Persuadé que sa jument est une crack, Sylvain prend contact deux ans plus tard avec Julien Epaillard qui domine alors la scène internationale avec Caracole de la Roque. La fille d’Urgada de Kreisker et de Baloubet du Rouet a 9 ans. La grande histoire dans le grand sport est lancée.

En pays Gallo

C’est une histoire bretonne qui a commencé à s’écrire dans Le-Bas-Cédré. « A vrai dire, je me sens plus Normand que Breton, précise Sylvain. Personne dans ma famille ne parle Breton. D’ailleurs, ici en Haute-Bretagne nous sommes en pays Gallo ».

Des affinités avec la ruralité ? Certes. Sylvain, kiné-ostéopathe humain, a des racines terriennes avec un père herbager et une mère prof d’Anglais. Perrine, professeur des écoles, aussi. Le cheval est leur passion commune qu’ils partagent depuis une quinzaine d’années dans ce lieu privilégié d’Ille-et-Vilaine qu’ils ont acquis et fait évoluer selon leur vision du bien-être, de l’élevage et du sport : une ancienne ferme plantée au milieu d’une vingtaine d’hectares. Aux bâtis en pierre se sont ajoutées des structures en bois dont un manège de 18 x 30 « mon laboratoire, dit Sylvain, j’y suis souvent le matin avec les 2 ans et les 3 ans. Je les observe et les fais travailler à pied. C’est instructif et c’est un grand plaisir pour moi. La première chose que nous avons faite en arrivant ici, c’est la carrière, une 35 x 65 en sable de Fontainebleau avec arrosage automatique ». 

Un bel outil servant à Perrine qui sort Cilaos du Cèdre en cycle libre et Dionysios en amateur CSO et CCE. Les filles Faustine et Louise montent à poney.

Lors de notre visite, elles étaient avec leur maman au championnat de France pony-games à Lamotte Beuvron. Résultat : une 4e place sur onze équipes. Contentes, les filles.

Urgada, la chance, la notoriété

Au départ, il y a Urgada de Kreisker (Diamant de Semilly) cette toute bonne fille de Briséis d’Helby (Laudanum ps) que fit naître Jannik Lamotte, l’inspiré breton fondateur de l’élevage d’Helby. Mère entre autres de Javelot d’Helby (Vas y donc Longane) et Kouros d’Helby (Narcos). Poulinière par la suite chez Guillaume Ansquer, croisée à Diamant de Semilly, elle donna d’abord Quickly de Kreisker (Iso 183), le fabuleux compagnon de route du Marocain Abdelkébir Ouaddar et quatre ans plus tard, la bai-foncé Urgada. C’est elle, à un an, que Sylvain et Perrine choisirent pour bâtir leur élevage. 

« Nous connaissions bien la production de Briséis et avions remarqué notamment avec Quickly que le croisement Diamant-Laudanum fonctionnait très bien. Nous savions que cette pouliche était à vendre chez Guillaume et nous l’avons achetée. L’idée était de démarrer un élevage avec une bonne génétique. Nous avions commencé avec des souches régionales plus modestes dont les produits étaient difficiles à vendre. Nous voulions évoluer vers le haut de gamme ».

Dubaï, la chance ? « Il faut toujours un peu de chance dans la vie, alors pourquoi pas ? Nous aurions pu en rester là. Maintenant nous continuons pour prouver que justement, il n’y a pas que la chance qui nous a fait réussir. Nos produits sont recherchés. Nous avons beaucoup vendu en Europe du nord, en Italie et à présent en France. La gestion de la carrière sportive de Dubaï nous a beaucoup appris. Nous avons rencontré beaucoup de gens, des gens normaux qui se respectent. C’est agréable. La génétique, c’est ma passion. Comment croiser, avec quel étalon, comment mener l’élevage, comment utiliser les nouvelles techniques, c’est ma préoccupation permanente. J’en parle sans cesse à Perrine qui heureusement fait preuve d’efficacité dans la décision. Elle est propulsive. Pourquoi j’ai choisi Baloubet alors que « devant » ce n’est pas terrible ? Je pensais qu’il allait convenir à Urgada. Je n’utilise que des étalons confirmés sur descendance. Je teste ma génétique femelle comme ça, je ne veux pas perdre de temps avec les jeunes ».

La notoriété a-t-elle changé votre vie ?

Sylvain : « La jument a été sécurisée financièrement par Julien. Nous en possédons toujours 30 %. Il y a un contrat que chacun respecte. C’est très facile et très confortable. Les rapports avec julien sont limpides et cordiaux. L’argent de la vente nous a permis de consolider notre trésorerie. Avant nous vendions une ou deux pouliches, maintenant nous les gardons, ce qui nous évite de nous faire notre propre concurrence. Quand il m’arrive d’en vendre une, la vente est subordonnée à un contrat limitant à 3 le nombre de poulains à naître par an. Sinon, je ne vends pas. Nous avons acheté un camion et prévu quelques aménagements. La vie est facilitée sur les concours avec les pass. La FFE a beaucoup d’égards envers les propriétaires, c’est plaisant. Nous sommes invités à Versailles, tout est organisé par la FFE. Je trouve bien que la SHF et le SF aient offerts des places aux naisseurs qui ne sont plus propriétaires ».

Perrine : « Dans la vie de tous les jours, rien n’a changé. Le travail autour des chevaux est toujours le même. On a un peu plus de copains supporters qui suivent les résultats de Dubaï encore mieux que nous. La fan zone s’est bien agrandie et il y a de plus en plus de gens qui nous saluent. C’est sympa. En concours amateur, c’est un peu plus compliqué quand le speaker annonce mon « pédigrée ». Difficile de rester en mode incognito mais je me réfugie dans ma bulle. 

Je me suis fait un cadeau à Noël, un parcours d’obstacles tout neuf avec des petites fleurs et des couleurs. D’un point de vue économique, la vente nous a permis de sécuriser les mâles qui ont un potentiel. On peut les garder un peu plus longtemps voire les valoriser. Comme les autres éleveurs, nous avons traversé pas mal de galères, il faut garder la tête sur les épaules et rester humbles. On monte vite mais on peut aussi redescendre très vite ». 

Et l’après JO ? « Vraisemblablement, DubaÏ sera vendue. Julien et ses investisseurs décideront et nous suivrons leur décision. Quant à moi, je vais me focaliser sur ma finale cycle libre 3e année avec Cilaos à Fontainebleau ».

Beaucoup de sagesse dans ces propos et une attitude très positive face à l’avenir.

Urgada fait souche

Urgada, 16 ans, fait souche au Bas-Cédré. Elle ne porte plus ses poulains qui naissent par ICSI ou par transfert d’embryons. 

Dubaï est mère et grand-mère. Croisée à Casall elle a donné le mâle Istanbul vendu au cavalier international italien Piergiorgio Bucci. Avec Dollar dela Pierre, elle a eu l’étalon Jolicoeur du Cèdre acquis par France Etalons et Jakarta confiée à Marc Dilasser pour le cycle classique, puis Louxor, un mâle avec Mylord Carthago.

Le croisement Baloubet-Diamant a été répliqué plusieurs fois avec des fortunes diverses. La meilleure réussite est celle de Mineapolis dont le comportement est très proche de celui de sa propre grande sœur.

« Ce n’est pas un croisement qui donne des gravures, convient Sylvain. Nous aimons les étalons qui ramènent du cadre et de la masse comme Vigo d’Arsouilles, Nabab de Rêve, Ermitage Kalone, Cornet Obolensky ».

Cela dit, de l’alezane au bai-foncé en passant par le gris, il y a certainement quelques pépites dans les poulains qui grandissent dans les prés. Lutèce (Cornet Obolensky et Urgada x Diamant) va être présentée au concours de 3 ans à Lamballe prochainement. Superbe pouliche bai-foncé, mère d’un poulain par Mylord Carthago.

Le cheptel moyen est de 30 chevaux sur l’élevage dont 11 porteuses. Chacune est utilisée une année sur deux. La production qui était de 7 à 8 poulains par an a été ramenée à 3 ou 4. Tous les « du Cèdre » portent le nom d’une ville.

« On se lève tôt et on se couche tard, mais nous sommes heureux », disent en chœur Perrine et Sylvain qui vont, comme chaque année, partir en vacances à Carnac pour faire des balades à cheval avec leurs amis.

Etienne Robert

22/07/2024

Actualités régionales