- Toute l’actualité du cheval et des sports équestres

Norton d’Eole, un cheval dans le vent

Cheval dans l’ère du temps, Norton d’Eole porte bien deux casquettes. Très en vogue auprès des éleveurs, son harem est à chaque nouvelle saison de reproduction en réelle augmentation. Il doit satisfaire à une demande qui s’étend bien au-delà Photo 1 sur 1
de son nord natal. Ses très signifiantes performances dès l’âge de 5 ans, 5e place dans le championnat des 5 ans et un triple sans-faute aux championnats du monde à Lanaken, ainsi qu’une saison de 6 ans tout aussi régulière lui constitue un palmarès enviable.

La saison 2009 en concours hippique a été pour Norton synonyme de succès. Année de transition, oscillant entre la prise de métier dans le haut niveau national et l’accession aux concours internationaux, il a été attendu et scruté dans les moindres détails à chaque sortie. Son public régional nordiste a été rassuré dès le début de saison par une 4e place dans une épreuve 1,40 m lors de l’international de Strazeele. Classé à la fin mai dans le Grand Prix international 1,45 m de Wisbecq en Belgique, il gagne début juin le Grand Prix Pro1 de Saint-Amand-l -aux et se classe les deux week-end suivants respectivement 4e et second des Grand Prix régionaux Pro 1 d’Hardelot et Saint-Omer. Peu perturbé par la saison de monte et son devoir de reproducteur, il enchaîne à nouveau les classements au Touquet et à Wisbecq une fois de plus pendant le mois de juillet.

Son cavalier se plaît à dire de son étalon qu’il est très facile d’emploi comme ses frères et sœurs. Chose qui s’est vérifiée dès la fin du mois de septembre où il accède à une 3e place dans le Grand Prix Pro 1 de Béthune avant de clôturer la saison de concours sur une superbe victoire dans l’épreuve finale du championnat de France Pro 1 à Fontainebleau. En ce début du mois d’octobre 2009, il termine 7e du championnat de France Pro 1.

Les éleveurs apprécient qu’il soit monté par un « amateur ». Cela leur permettant, estiment-ils, de mieux juger ses qualités naturelles. Mais peut-on encore considérer son cavalier Eric Dewulf comme tel ? Très probablement, la rencontre de deux champions.
Une souche du Centre au centre des intérêts

Un palmarès hippique qui en dit déjà long sur son potentiel mais pas tout autant que la qualité de sa lignée maternelle quelque peu atypique pour le concours hippique.

Cette souche remonte à une lignée pur-sang arabe répertoriée à partir du 19e siècle. Celle-ci a donné quelques étalons en race pure mais aussi en croisement avec du pur-sang anglais. Dans cette famille, figure l’étalon anglo-arabe Idano par Fagotin. Il a engendré quelques bonnes reproductrices dans son stud-book de naissance qui sont à un degré éloigné à la base de chevaux ayant été un jour sur le devant de la scène comme le performer Le Galant ou l’étalon Et Hop ayant bien officié dans le nord de La Manche.

Pour l’élevage anglo-arabe, être issu d’une lignée basse arabe est gage d’une certaine noblesse. En effet, ces souches sont les moins représentées dans la création de ce stud-book alors qu’elles ont tout autant fournis d’excellents étalons que les races pur-sang anglais et demi-sang.

Concernant Norton, il faut remonter à sa sixième mère, Ram Bera, née en 1930, pour identifier le degré de race pure arabe. Elle est une fille de l’incontournable raceur Dénousté, lui aussi issu d’une famille ayant produit en croisement de très grands performers comme Pirate, gagnant en CHIO sous couleurs italiennes ou Folle Avoine, 3e du critérium des 4 ans, ayant ensuite effectuée une très belle carrière en concours hippique et concours complet…

Mariée avec le pur-sang anglais Mont Bernina, Ram Bera a créé une lignée qui s’est illustrée tout d’abord dans les courses d’obstacles au travers de sa fille Raita II. Née chez la Baronne d’Espalungue, Raita II a été une bonne gagnante en steeple-chase. Elle est également classé « Recommandée Concours Hippique » de par les performances du petit Ratou, son propre frère, seconde et premier du championnat de France de concours complet en 1947 et 1948, gagnant de 514 000 francs en concours hippique en 1954.

Il faut néanmoins évoquer quelque peu les qualités de son père Mont Bernina qui a, à coup sûr influencé cette famille. Vainqueur du fameux Jockey Club, il était le frère utérin de Mont Blanc, vainqueur de la Poule d’Essai des Poulains, et de Téléférique, vainqueur du Grand Critérium et père d’Alizier, lui-même père de la grand-mère maternelle de Laudanum. Mont Bernina est aussi un proche collatéral du double vainqueur du Prix de l’Arc de Triomphe, Tantième, le père du pur-sang de croisement Amarpour. Il est en plus le père de la grand-mère maternelle de Le Mioche, lui-même grand-père maternel du chef de race Grand Veneur. Pour terminer sur la descendance de Mont Bernina, il faut encore ajouter qu’il a tracé en lignée mâle par son fils Quicko, le père de l’anglo-arabe Djecko (grand-mère maternelle par Dénousté) d’où les mères des excellents reproducteurs Quatar de Plapé ou Grand d’Escla. Un vrai pedigree orienté obstacle.

Raita a donné des gagnants en course comme en concours. Sa première fille, Emirline, 12 fois gagnantes ou placées en steeple en 12 courses courues a été achetée par un très fin connaisseur du mileu de l’élevage de chevaux de course et de sport, Roland Gilberton.

Eleveur érudit et passionné par ce milieu, ils choississaient les reproducteurs qui avaient fait leurs preuves sur le terrain. Voisin et ami du cavalier olympique Marc Deuquet, il lui avait confié la première fille d’Emirline, Upsala D, excellente gagnante en Grand Prix et Puissance, obtenant un ISO de 155. Raita engendra ensuite Marinella, excellente gagnante en concours hippique avec une amateur. Puis Quime, bon gagnant en steeple et cross avec 4 victoires et 10 places mais aussi en CSO. Deux autres filles de Raita ont laissé une production de premier ordre : Sissi, par Matador aa, mère de Coq d’Or, ISO 148, et Elfe de l’Afgand, ISO 138; Urania, sœur de Sissi et mère de Jessica D, ISO 147. Cette dernière à l’origine de Jessy Mail, sélectionée pour les championnats d’Europe de concours complet.

Auparavant, avec le pur-sang Cidre Mousseux, Raita avait donné la petite Oita. Vendue par l’intermédiaire de Jean de Laurière, elle a fait une carrière exceptionnelle en course sous couleurs militaires : pas moins de 9 victoires et 13 places sur 26 sorties. Suite à ses succès, elle a été rachetée par Roland Gilberton. Oita n’a eu qu’une seule pouliche, Ifrane par Château du Diable, étalon confirmé sur descendance en saut d’obstacles. Accidentée au pré, elle n’a pas été mise en course comme ses congénères. Croisée avec l’étalon Drapeau Rouge, elle a donné le premier crack en saut d’obstacles de cette famille : le multi-médaillé Morgat : médaille de bronze par équipe aux JO de Séoul en 1988, champion du monde par équipe et médaille de bronze en individuel aux Jeux Mondiaux de Stockholm en 1990 sous la selle d’Hubert Bourdy, ISO 177.

Ifrane fut vendue pleine de l’étalon national Fury de la Cense à Mr et Mme Planson, voisins sur la commune de Levet. C’est à partir de cette acquisition que se développa la branche concours hippique qui est toujours si florissante et l’affixe « de Chalusse ». Nifrane, première fille d’Ifrane, est née en 1978. Excellente gagnante internationale sous la selle de Rémy Deuquet (540 000 francs de gains totaux), elle laisse ensuite neuf descendants dont Lord If de Chalusse, effectuant une belle carrière internationale en concours hippique sous couleurs danoises et surtout d’excellentes poulinières dont la plus célèbre, Fragance de Chalusse, est la mère de notre cher Norton d’Eole.

Ifrane rencontra bien avec le sang d’Almé. Parmi ses filles, Caprice d’Ifrane, par Galoubet A, exportée en Belgique chez le célèbre étalonnier Joris de Brabander, a été croisée avec l’holsteiner de pointure olympique Chin Chin. Elle a donné l’étalon Triomphe de Muze, très bon gagnant international sous la selle de David Jobertie. En 1991, naît la propre sœur de Caprice, D’Ifrane Chalusse, qui effectua de très bonnes performances en Grand Prix, ISO 169, tout en produisant comme ses sœurs en transfert d’embryon. La dernière pouliche d’Ifrane, Jacotte de Chalusse, anglo-arabe à la différence des autres, reproduit toujours pour Solange Planson comme son autre sœur Malice de Chalusse par Concorde. Cette dernière a déjà donné un cheval très intéressant en concours hippique : Quartz de Nantuel.

Fille de Jalisco B, Fragance de Chalusse a elle aussi été achetée par Joris de Brabander. Exploitée en concours hippique international d’abord par David Jobertie, elle est maintenant montée par Karline de Brabander à ce même niveau. Pionnier du transfert d’embryon en Belgique et vétérinaire de son état, Mr de Brabander a fortement exploité la prolificité de cette jument qui a à son actif quelque chose comme cinquante poulains. Certains se distinguent déjà très bien sur les terrains de concours internationaux. Le plus connu à ce jour est bien évidemment l’étalon national Mylord Carthago, qualifié pour la finale Coupe du Monde avec Pénélope Leprevost. Son cadet, Norton d’Eole, est dans les traces. Personne n’a pu à ce jour percevoir ses limites du fait qu’il est en constante progression. Les descendants de Fragance évoluant en concours hippique à haut niveau sont légions. Bon nombre porte l’affixe « de Muze ». Certains transferts d’embryon ont été vendus comme Norton ou Mylord à des éleveurs désireux d’acquérir ce qui se fait de meilleur en qualité de génétique européenne.

Norton d’Eole est un bien bel exemple de victoire qui mérite que l’on s’en inspire. De Solange Planson à la famille Dewulf en passant par Joris de Brabander, chacun y a apporté à un moment donné sa pierre. Aujourd’hui, c’est une famille bien soudée qui gravite autour de ce cheval d’exception. M. Dewulf père, fin observateur de notre milieu et féru de génétique équine a su acquérir de la graine de champions au bon moment. Cette joyeuse rencontre mûrit grâce au travail de valorisation des deux fils : Eric arpente sur son noble étalon les grands terrains de concours hippique en quête de nouvelles victoires. Quant à Guillaume, il gère de son mieux le carnet de bal très rempli de ce très convoité Sire.
(Extrait de l’annuaire Monneron) Emmanuel Spinnewyn

18/03/2010

Actualités régionales