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Artérite virale équine : plus de 200 chevaux touchés

Retour sur l’épidémie d’artérite virale équine (AVE) qui a perturbé cet été la Normandie et les régions limitrophes, entre annulations de concours et obligations sanitairesContexteLes virus d’AVE isolés
ces dernières années en France sur des spermes d’étalons ne présentaient pas ou peu de pouvoir pathogène. Ils étaient même éloignés de la souche Bucyrus et d’une souche très pathogène isolée lors d’un important épisode abortif survenu en 1984 dans le Kentuchy (Etats-Unis).

Si la situation épidémiologique était relativement bien décrite et structurée chez le Pur-sang et pour la semence d’autres races exportée, la majorité des autres stud-books n’avait pas mis en place de protocole standardisé de suivi.

D’autre part, le passage en 2006 de l’AVE d’un statut non réglementé à celui de Maladie à déclaration obligatoire (MDO), ne s’est pas accompagné de mesure de police sanitaire d’Etat. Le suivi et la prise de décision ont été reportés sur les organisations professionnelles (comme pour les autres MDO, équines ou non)..

Déroulement

Les premiers signaux positifs ont été révélés le 25 juin au Laboratoire départemental Franck Duncombe (Calvados) sur des prélèvements respiratoires en analyses complémentaires de déclaration SRA (syndrome respiratoire aigu) du RESPE (Réseau d’épidémio-surveillance structuré) dans un haras de chevaux de selle et sur les organes d’un étalon percheron autopsié à l’AFSSA de Dozulé.

Au regard de son statut, les autorités sanitaires des départements concernés et les vétérinaires traitants ont été avertis. La souche virale a été isolée 48 heures plus tard et typée le 28 juin. Dès début juillet, la recherche de l’AVE était systématique dans les protocoles de surveillance du SRA par le RESPE. Le ?9 juillet, première réunion du comité de suivi normand et national et décision d’arrêter les épreuves d’élevage pour un mois.

Cette souche appartenait au Type européen (sous-type 2), proche de souches isolées en Allemagne en 1994 et en Pologne en 2006, ainsi que d’une souche isolée en France en 2001 et 2003. Compte-tenu de sa vitesse de pousse, de son emplacement sur les arbres phylogéniques ainsi que de la mortalité et des symptômes observés, elle a été considérée comme particulièrement virulente.

Le 20 août, les enquêtes épidémiologiques menées par le RESPE, avec le partenariat des professionnels de la filière, ont déterminé avec certitude 30 foyers : 9 dans l’Eure, 3 en Seine-Maritime, 4 dans le Calvados, 6 dans la Manche et 8 dans l’Orne.

Le 21 août était diffusé par le comité de suivi un conseil d’allègement progressif des mesures : limitation des zones géographiques et reprise des concours d’élevage à partir du 1er septembre sous responsabilité des organisateurs. Levée des dernières mesures et fin officielle de l’épisode le 17 septembre.

Plus de 200 chevaux de trait et de selle auraient été touchés. Les premiers foyers ont été observés en élevage puis dans des structures mixtes élevage-compétition après le retour de juments suitées. Les contaminations ont eu lieu par voie sexuelle (vénérienne ou IA), par voie respiratoire, et dans un cas par voie indirecte (vecteur humain suspecté). Il existe des liens épidémiologiques identifiés entre tous les foyers.

Le dernier animal symptomatique a été identifié le 5 août.
Rappel des symptômes

Juments, poulains et étalons ont été touchés avec des symptômes variés déjà observés dans la plupart des rapports internationaux.

Chez les poulinières, ont été observés des avortements et des naissances prématurées. Des symptômes respiratoires, des œdèmes et de l’hyperthermie ont aussi été répertoriés.

Chez les poulains, ont été observés des cas mortels chez ceux de moins d’une semaine nés prématurément et présentant œdèmes, hyperthermie et pneumonie. Ces poulains étaient en général issus de contamination in utero en fin de gestation avec naissance d’animaux infectés. Les lésions microscopiques de type artérite nécrosante de foie et des poumons et une inflammation interstitielle des poumons et des reins ont pu être observées.

Chez des poulains plus âgés, de légers symptômes respiratoires ont été notés ainsi que de l’hyperthermie marquée (jusqu’à 40,5°C), des œdèmes du fourreau chez les jeunes mâles et rétro ombilicaux chez les jeunes femelles, mais aussi des œdèmes des salières et des membres. Deux cas de mortalités ont été observés dans cette classe d’âge.

Cinq poulains au total sont morts ou ont été euthanasiés.

Chez les mâles adultes, outre les œdèmes de la sphère ORL (associé ponctuellement à des conjonctivites et des jetages séreux discrets) et l’hyperthermie, des œdèmes du fourreau et des orchites ont été rapportés avec excrétion dans le sperme. Pendant la phase d’hyperthermie, on a noté une baisse de la fertilité (baisse de la qualité du sperme).

Pendant et juste après la phase clinique, la fertilité des juments a été altérée. L’excrétion asymptomatique par les étalons et futurs étalons infectés pendant cet épisode a été un des risques majeurs de poursuite de l’infection dans les mois qui ont suivis.

Des cas présentant des éruptions cutanées de type urticaire post-hyperthermique dans des foyers ont aussi été identifiés, ainsi que des cas avérés d’infection quasiment asymptomatiques.

Actions et réactions

La mobilisation des uns et des autres a abouti à l’arrêt momentané des rassemblements d’élevage de chevaux en Normandie et en régions limitrophes. Des sites ont été fermés. La plupart des personnes concernées par des foyers ont accepté de ne pas déplacer d’animaux même cliniquement sains de leur effectif.

Cette situation était rééstimée chaque semaine en fonction de l’évolution des foyers par un Comité de suivi national et un autre local rassemblant les principaux acteurs (représentants de race, ministère de l’Agriculture, HN, laboratoires, Association des vétérinaires équins français, RESPE).

A l’avenir, la réglementation sur les contrôles sanitaires imposés lors d’insémination pourraient être renforcés. Cette mesure ne permettrait pas une protection totale mais permettrait de limiter la dissémination de l’infection par la semence d’étalons excréteurs asymptomatiques, notamment de cette souche virulente, et/ou la possible apparition d’une souche virulente à partir d’une mutation du virus survenue chez un étalon excréteur asymptomatique d’une souche jusqu’à lors avirulente.

Cet épisode a relancé la discussion sur l’intérêt de la vaccination des étalons séronégatifs et montré la nécessité d’une politique sanitaire concertée entre les différents acteurs de la filière, tout en tenant compte de contraintes et de moyens qui peuvent être différents.

A noter enfin que si la circulation, l’identification du virus et le typage moléculaire des souches ont bien été déterminés, ce n’est pas encore le cas de l’origine de ce virus (mutation spontanée à partir d’un excréteur chronique ou souche étrangère importée).

Cette crise a montré que la filière équine avait les capacités à gérer de tel phénomène (le premier week-end de la Grande Semaine de Fontainebleau, seulement deux chevaux sur 500 n’avaient pas de certificat), même si sensibilisation, circulation de l’information et qualité de la collecte d’information sont toujours perfectibles.

Source : proceeding du congrès de l’Association des vétérinaires équins français (AVEF) à Deauville en octobre 2007.

20/12/2007

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