Beerbaum dans la tourmente

Les images diffusées sont le fruit d’une enquête de près de deux ans, menée sous la houlette du journaliste Günter Wallraff connu pour ses positions sociales de lutte contre les inégalités. Pour cette enquête, la journaliste Sina Meyer s’est infiltrée dans les écuries du cavalier allemand, organisateur chez lui des derniers championnats d’Europe, en se faisant recruter comme stagiaire marketing et a filmé des séquences d’entrainement où l’on distingue notamment un homme à pieds lever une barre dans les antérieurs d’un cheval - monté par un cavalier que la journaliste infiltrée a identifié comme étant Ludger Beerbaum - lors de la phase ascendante du saut. La rédaction du magazine télévisé l’affirme : Ludger était en train de « barrer » un cheval.

La méthode est interdite par la Fédération nationale allemande qui, en revanche, autorise le « toucher », un « toucher » qui peut s’apparenter à une méthode douce du « barrage ». La frontière entre les deux méthodes est ténue…

Informée bien avant la diffusion du reportage, la fédération allemande avait demandé à RTL de lui procurer le matériel vidéo. Ce que la chaîne n’a pas fait. Une réforme de cette règlementation du « toucher » est en cours depuis deux ans. De nombreux experts y travaillent mais pour l’heure rien de concret n’est sorti.

La Fédération allemande et la FEI ont ouvert une enquête sur cette affaire qui a connu un fort retentissement côté grand public sensibilisé au bien-être animal et côté  animalistes et PETA (lire ci-dessous à propos d’Edward Gal) qui s’est emparé de l’occasion pour alimenter sa lutte contre toutes les pratiques équestres et déposer une plainte au parquet de Munster contre le champion olympique.

« Faux, diffamatoire, calomnieux »

Sa ligne de défense, le « Kaiser » l’exprime dans un communiqué : « Le reportage de RTL est manifestement faux, diffamatoire et calomnieux sur de nombreux points. Bien entendu, nous engagerons des poursuites judiciaires à son encontre. Il est inacceptable qu’il ait été secrètement filmé sur ma propriété privée. Les scènes d’entrainement montrées dans le reportage n’ont rien à voir avec la pratique illégale du « barrage ». Ici, des professionnels expérimentés ont appliqué la méthode autorisée de toucher. L’outil vu dans la vidéo répondait aux spécifications de la Fédération équestre allemande en matière de toucher autorisé : pas plus de trois mètres, ne pesant pas plus de deux kilogrammes. […] Le fait que la prétendue « enquête » de deux ans n’ait pu révéler que quatre scènes montrant le toucher d’un cheval prouve clairement que même la méthode d’entraînement autorisée n’est que très rarement utilisée ici et ne fait pas partie du travail quotidien », précise le cavalier qui ajoute « que l’enquête manque d’expertise suffisante ».

Cette affaire de « barrage » dans le sport équestre allemand refait surface une trentaine d’années après « l’affaire Schockemöhle » au moment des Jeux mondiaux de Stockholm. Une cassette vidéo montrait nettement le champion allemand « barrant » un cheval.

E. R.