Championnat des 7 ans : le doublé de Cheyenne de la Violle


Tony Hanquiquant/Cagliano Jorthonne (Safary d’Auge) reprenait la main après la deuxième épreuve sur le sable des Princes et jusqu’à la 2e manche de la finale, à nouveau sur l’herbe et devant un très nombreux public.



La première manche a encore rebattu les cartes pour les quarante repris. Tony Hanquinquant, Jérôme Hurel, Nicolas Delmotte, Eric Lelièvre, Marie Demonte composant le premier quart des vingt de la dernière manche.

Manche qui leur fut fatale car chacun pénalisé par une barre au sol, excepté Eric Lelièvre. Seul couple à ne pas avoir touché une barre du championnat, Eric Lelièvre/Cheyenne de la Violle encaissait la prime à la régularité et la récompense suprême avec ce titre de champion de France des 7 ans.

Champion des 6 ans l’an dernier avec Eric Lelièvre, Cheyenne récidive tout en « zénitude » cette année. Naisseur et copropriétaire-cavalier l’ont tous les deux signalé, Cheyenne a pris de la maturité dans son année de 7 ans. Il a franchi un cap. Certains voient en lui un cheval « pour faire les grosses ».

L’élevage de la Violle lui aussi franchit un cap avec ce doublé historique et entre dans la légende de la Grande semaine. Simon Delestre et Orphée de l’Illon y avaient écrit une belle page il y a dix ans, mais, nuance qui a son importance, il s’agissait d’un critérium au format plus soft que celui d’un championnat. Le championnat lui, se déroulait à Fontainebleau en octobre, sous l’égide de la FFE.

La Violle et son cavalier bénéficient encore d’un bonus supplémentaire puisque ce n’est pas un mais deux chevaux qui disputaient ce championnat : Cerise de la Violle (Tinka’s Boy) qui avec Eric conclue dans le top ten. Il y avait aussi le petit frère utérin de Cheyenne, Far West de la Violle (Orlando) classé Excellent avec Nicolas Houzelle.



La suite du classement du championnat : Tony Hanquinquant est 2e avec Caligano Jorthonne (Safary d’Auge), 3e Jérôme Hurel/Capuccino de Nantuel (Dandy du Plape), 4e Divine Express, la première pouliche d’Orient au haras des Coudrettes), sous la selle de Delphine Perez, 5e Carlita de Gaia (Levistan) /Thomas Lévêque. Tous avec une barre.

E. R.



Eric Lelièvre : « que du bonheur »





Eric Lelièvre se prête au jeu des questions : « Satisfaction 100 %, que du bonheur »



Comment se sont passés tous ses parcours de la Grande Semaine ? « J’ai été un peu plus performant dans les 7 ans que dans les jeunes cette année. »



Le Graal ?

« On a bien travaillé, on a bien évolué, je l’ai préparé pour qu’on passe le cap, petit à petit, pour qu’il soit en forme ici, on a fait deux épreuves 1,40m avant de venir. Mais je n’ai jamais privilégié la gagne. Je préfère faire des bons parcours. Pas question de mettre les chevaux dans le rouge. »



Comment s’est passée cette année ?

« J’ai débuté sur 1,35 m, puis quelques Top 7 pour le qualifier, quelques CSI. Les épreuves 1,40m de la fin étaient techniques, elles l’ont fait mûrir, j’évite les épreuves de vitesse. Je n’ai pas couru les barrages à fond pour gagner, à lui dévisser la tête, j’ai toujours essayé de monter propre, de le faire avancer, de le faire écouter. C’est comme une Rolls si tu roules comme un fou tu vas la casser si tu roules gentiment tu vas rouler lus longtemps... »



La suite ?

« On va à Lanaken aux championnats du monde. Et après je pense qu’il a bien mérité un petit peu de repos. »



Tu le montes depuis qu’il a quel âge ?

« Je le monte depuis fin d’année de 3 ans pour faire les quatre ans. J’en ai acheté la moitié à ce moment-là ».



Il a été demandé le cheval ?

« Oh oui toute la semaine on me l’a demandé, mais je n’ai pas besoin d’argent (rires).

Bien sûr qu’on va le commercialiser le cheval, mais là son prix a doublé en un an, et cette victoire va nous permettre surtout de ne pas le faire monter par toute la France : il a montré sa valeur, plus question de discuter sur des détails »



« Quel cheval »



Alors Hugues, une réaction à chaud ?

Quel cheval ! C’est ça pour moi, un cheval extraordinaire, répéter cette sérénité à 6 ans et à 7 ans ! C’est le seul cheval qu’a pas touché une barre du championnat, ça c’est historique. Il nous a tout donné, merci Cheyenne! Et merci à Eric : ce qui est fantastique, c’est qu’il l’a repéré alors que ça faisait 24 heures qu’il était dans ses boxes. En tout début d’année de 4 ans il l’a fait sauter un petit coup en liberté et le lendemain soir il m’a appelé : « Est-ce que tu veux le vendre ? » Je lui ai dit : « Pas forcément... » et il m’a dit : « Alors je t’en achète la moitié ». Il a détecté directement son potentiel. Evidemment il n’imaginait sûrement pas être champion des 6 ans, et des 7 ans l’année suivante, mais c’est une histoire magnifique parce qu’on est restés propriétaires à 50/50, depuis le début il a tout fait sur ce cheval, donc il a tous les mérites, de l’avoir acheté pour moitié, de l’avoir formé. Nous on l’a élevé, on a fait tout le boulot d’éleveurs, le croisement etc, et aujourd’hui on est co-propriétaires tous les deux ! Sa mère, Taquine Line, qui était fantastique, était vide et comme elle était vide on l’avait emmenée chez de Brabander pour la faire saillir par Nabab de Rêve. Voilà comment est né Cheyenne.



Qu’est ce qui a changé chez lui entre 6 et 7 ans ?

Je trouve qu’il a acquis une sérénité, une confiance en lui. C’était un cheval très délicat à quatre ans, qui pouvait faire demi-tour, s’arrêter, inquiet, et tout ça c’est terminé. Il sait que c’est un champion. Et ça je l’ai vu à un instant précis, à six ans, à Lanaken, quand il est rentré sur la grande piste, plutôt que de, entre guillemets rentrer le cul et avoir peur de cette arène imposante, il est rentré en se transcendant, comme un grand et là je me suis dit que c’était un champion.



Et Cerise ?

Cerise c’est une autre jument de notre élevage, d’une autre souche, qui a été performante, qu’on a vendue à des amis, Eric et Stéphanie Alexandre, excellente à 5 ans, élite à 6 ans, toujours là pour les grandes occasions, en finale des 7 ans, reprise dans les vingt, elle était quinzième, a fait un deuxième tour magnifique, mais elle a pâti de son premier parcours elle était un peu inquiète et fait huit points sur le double le long des tribunes. Son deuxième parcours : sereine, sans-faute, sans défense, avec Eric qui s’entend merveilleusement avec elle, elle termine 11e.



L’histoire de la Violle et vos souches maternelles

C’est plus de trente ans, l’élevage date de 86. L’idée de démarrage c’était la génétique. D’après l’INRA la génétique c’est 15% de la performance. On peut dire que ce n’est pas beaucoup, mais si on se prive de 15% de la performance, c’est énorme. Donc on a voulu se fonder sur la génétique par la voie femelle, parce que c’est facile d’acheter des doses d’un étalon, il suffit de passer un coup de fil, faire un chèque et c’est fini, alors qu’acquérir des souches maternelles c’est très, très compliqué. Il faut convaincre l’éleveur de vendre sa jument, et après il faut travailler, élever, enfin le boulot de l’éleveur.



- Il y a la souche du Château, avec la fille de Koléa, Roxane de la Violle, qui a fait Cerise, entre autres, qui avait fait également Umba, qui était meilleure femelle de 6 ans de sa génération, indicée 152, qui est maintenant poulinière à la maison, qui a fait une belle pouliche de Comme Il Faut Plus Z. Il y a eu Amarena, que j’ai vendue aux Fences à 3 ans, qui est partie au Mexique et qui fait des 1,50 m à 8 ans, ensuite il y a Cerise. Puis il y avait deux 5 ans qualifiées ici, Espuma, toujours fille de Roxane, et Ecume, mais qui ne sont pas dans les finales.

- La souche de Nocturne du Rozel. J’ai acheté Taquine Line, la mère de Cheyenne, à l’âge de 18 mois, c’était une jument pie, avec la souche maternelle de Nocturne du Rozel, donc une souche normande confirmée, et fille d’Utah Van Erpekom. On voulait acheter une pie pour mettre un peu de couleur dans l’élevage. Le premier, fils d’Idéal de la Loge, Arapaho, était pie, le deuxième c’était Cheyenne, il est bai, et puis elle a refait des pies. Là on a une 3 ans, qui à mon avis est excellente, Graffiti, par Ogano Sitte. On a dû malheureusement euthanasier la mère.

- Il y a aussi la souche du Banney, qui est toujours à la maison, qu’on a toujours gardée, qui est une souche très dense. On a une petite-fille de cette souche qui est pleine de Caprice For Ever, c’est la souche initiale, qui est peut-être aujourd’hui notre 3e ou 4e souche.

- On a acquis depuis la souche de Rahotep de Toscane (médaille d’Or à Rio), dont on a la propre sœur, Carmen de Toscane avec qui on a fait de l’ICSI aussi.



Actuellement il y a une trentaine de chevaux sur l’élevage.



Adepte de l’ICSI ?

J’ai eu l’opportunité d’acquérir il y a trois ans une vieille jument, qui devenait infertile mais qui avait gagné des coupes du monde, qui s’appelle Arielle (jument hanovrienne grise grande gagnante en coupe du monde avec entre autres Michaël et William Whitacker, fille d’Accord II, Ndlr). Comme elle était infertile la seule technique si on voulait avoir des poulains c’était l’ICSI. On a décidé de l’emmener un Italie pour faire ça, et ça a marché, et donc elle nous a fait des embryons.

Pour le moment on n’a pas réussi à en garder, parce que on les a tous vendus au fur et à mesure, dans les ventes aux enchères et maintenant de plus en plus en direct, parce que maintenant les gens nous connaissent.

Elle avait une sept ans ici, qui saute de manière fantastique, qui s’appelle Gavotte de Reville, fille de Président, qui en plus de bien tourner (trois victoires en Top 7 en 2019, Ndlr) semble produire très bien. Il y a eu aussi une Cornet Obolensky, une Emerald, une Baloubet du Rouet et puis un mâle de Comme Il Faut. Il y a eu cette année quatre poulains d’Arielle.



Pour nous cela a du sens : c’est utiliser des techniques nouvelles qui sont indispensables pour avancer génétiquement, parce que si tu n’as pas l’ICSI aujourd’hui, tu ne peux pas avoir de poulains, et c’est quand même dommage de se priver de championnes de ce niveau-là (Coupe du Monde) et ne pas pouvoir les faire reproduire. Elle est à la maison et elle part en Italie deux-trois mois par an pour récolter les ovocytes, et faire des embryons.



L’élevage de la Violle, c’est aussi (et peut-être surtout) Sandra Perini, la compagne de Hugues. Titulaire d’une licence d’insémination depuis deux ans, c’est elle qui insémine les juments et veille au grain, de la conception à la naissance et bien au-delà .



« C’est elle qui fait tout » reconnaît son compagnon.



Implanté à Uxegney




Parti de rien ou de si peu, l’élevage de la Violle s’est petit à petit structuré pour s’implanter définitivement à Uxegney, dans la périphérie d’Epinal, sur une propriété d’une trentaine d’hectares. La perspicacité, un sens aigü de l’observation et de l’effort font de ces deux amateurs éclairés de bons connaisseurs des chevaux qui n’ont visé qu’un seul objectif, la qualité. Qualité de la vie, qualité des soins, qualité des origines et qualité des reproducteurs. A la première écurie, originale dans son apparence car construite selon la même architecture que la maison d’habitation faite exclusivement de bois et de verre, s’est jointe il y a dix ans, une nouvelle structure composée d’un manège de 40x22 à couverture de panneaux solaires photovoltaïques, accolé à une douzaine de boxes destinés aux chevaux de sport. La première (16 boxes dont 4 de poulinage) équipée d’un labo d’insémination, d’une barre d’échographie, d’une douche et d’une sellerie est destinée aux chevaux d’élevage. Carrière extérieure, bâtiment de stockage et fumière complètent l’ensemble parfaitement fonctionnel.

Entre autres résultats marquants, il y eut une vice-championne de France à 6 ans avec Pin Up (Quatoubet du Rouet et Sauge du Banney x Uriel) sous la selle de Nicolas Houzelle. C’était il y a 10 ans.

Etienne Robert

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