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Chaque cheval a son prix

Chaque travail mérite une juste marge pour rémunérer le coût du travail accompli. Quelle marge un professionnel de la vente de chevaux doit-il pratiquer ? Le cheval se compare-t-il à une botte de poireaux, à une automobile, à un sous-marin ou à
une bergère Louis XVI ? La comparaison est difficile à faire car entend-on ici ou là, le cheval de sport ne se compare à rien !

Regardons les choses d’un peu plus près et nous verrons que la notion de marchand de chevaux répond aux mêmes critères que de nombreux autres métiers.

La marge d’un détaillant est, en France, en moyenne, autour de 2,2. C’est quoi 2,2 ? C’est le coefficient par lequel on multiplie le prix d’achat HT pour obtenir le prix de revente TTC. Et pourtant, malgré cette marge substantielle, en apparence, la vie de détaillant est très difficile... Car il faut rémunérer la boutique, le personnel, l’électricité, le chauffage, les assurances et bien d’autres frais. Par ailleurs, le détaillant doit aller visiter les salons, les fournisseurs pour faire ses choix d’approvisionnements.

La marge d’un revendeur ou grossiste est, en France, en moyenne, autour de 1,35. C’est quoi 1,35 ? C’est le coefficient par lequel le revendeur grossiste multiplie son prix d’achat HT pour calculer son prix de vente HT. Cette marge est nécessaire pour couvrir ses frais d’approvisionnement, de stockage, de prospection commerciale et de gestion.

Pour la revente des chevaux, à qui devons-nous nous comparer ? Question apparemment complexe, mais simple si on accepte de s’y pencher en toute simplicité.

Pour l’éleveur, c’est un mixte entre le prix de revient et le potentiel du cheval pour que la moyenne arithmétique des marges ainsi pratiquée permette de couvrir les frais et laisse trois sous pour vivre.

Pour le marchand de chevaux, c’est un coefficient ‘‘x’’ à appliquer sur le prix d’achat. Les frais d’un marchand professionnel ou occasionnel sont multiples. La seule recherche de chevaux occasionne des kilomètres et de longues journées de travail pour chercher et parfois trouver. Il faut aussi faire fonctionner l’écurie avec tous les frais inhérents à une écurie : bâtiments, nourriture, salaires et frais généraux liés aux bâtiments et aux salaires. Les frais très importants liés à la revente : temps passé auprès des clients, promotion, publicité. A tous ces frais, s’ajoutent ceux de la gestion : comptabilité, assurances, frais vétérinaires, frais financiers et bien d’autres.

Quelle valeur faut-il donner à ‘‘x’’ pour un marchand de chevaux ?

Je n’en sais rien pour être franc, mais je crois qu’un taux situé entre 1,50 et 2 doit être proche de la vérité. Ce taux varie en fonction du débit, du niveau de prix et de l’expérience du responsable.

Certains acheteurs peuvent être surpris par la variation des prix d’un cheval entre son prix à une vente aux enchères et son prix deux ans plus tard chez un marchand. Ils ne sont surpris que s’ils ne réfléchissent pas. L’expertise d’un marchand à l’achat (bien acheter), le coût d’une écurie à gérer et l’expertise d’un marchand à la vente qui sait bien conseiller son client, cela a un coût et ce coût est d’autant plus élevé que le travail est bien fait et de grande qualité.

Pour un marchand qui prend le risque d’acheter un bon 3 ans, il devra, s’il décide de vendre ce cheval à 6 ans, le débourrer, lui faire faire trois années de cycle classique et trouver le client à qui ce cheval correspond.

A ce prix d’achat que je fixe, par hypothèse, à ?6 000 €, il faut ajouter un coût direct de gestion de trois années, soit 3 x 6 000 € = 18 000 €, soit au total 6 000 € + ?18 000 € = 24 000 €.

Au coût direct ou prix de revient direct, il faut ajouter les frais généraux, ainsi qu’une petite part de bénéfices. J’ai remarqué, pour ma part, que les frais généraux représentent environ 30 % du prix de vente HT. A 24 000 €, je dois donc ajouter 7 200 €, soit 31 200 €, plus une marge pour survivre !

Donc un prix de vente de 35 000 €, soit environ 5,8 fois le prix d’achat du cheval !

Est-ce surprenant ? Non, c’est normal et on retrouve le même phénomène dans le commerce en général. A titre de comparaison, le prix de vente d’un produit sophistiqué pharmaceutique ou électronique peut être 6 à 10 fois le prix de revient direct.

Il serait intéressant que la centrale des bilans, qui est un service de la Banque de France, fasse une étude sur cette question. Cela éclairerait tout le monde.

La marge d’un professionnel marchand de chevaux peut être de 1,5 si tout se passe très vite, avec le minimum de frais, mais peut aller à 2 voire 6 selon le temps de préparation du cheval.

Pour rendre la filière cheval de sport plus transparente, il est peut être utile d’aborder sans complexe tous ces problèmes. Utiles pour les professionnels ? Non car ils le savent, mais utiles pour les acheteurs amateurs afin de les éclairer et d’éviter parfois certaines réflexions qui montrent à quel point ils ne sont pas informés.

François Lévy

09/10/2008

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