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Christian Vanier, directeur général de L’IFCE « La restructuration est en cours »

« 2013 sera une grosse année de changement » avait dit Christian Vanier, le nouveau directeur général de l’IFCE, une semaine après sa prise de fonction, lors d’un séminaire exceptionnel animé par lui-même à Priac-sur-Mer avec 150 cadres pour préparer l’IFCE 2015. Photo 1 sur 1

Six mois après sa nomination (20/10/2012) Christian Vanier nous fait part des objectifs déjà réalisés et à venir.

« Ma feuille de route donnée par mon ministre (la prolongation de celle de mon prédécesseur), sans inflexion donnée par les ministres, est en cours et l’on est en train de préparer la prochaine tri-annuelle 2014, 2015 et 2016. Si inflexions il y a, elles seront exprimées. Sur « la boutique », j’ai fait le tour de tous les sites (24 dont 22 en activité) et je suis plutôt content de ce que j’ai vu. J’ai vu toutes les équipes. Cela c’est bien passé à mon sens. 

« Pour la partie Haras, le transfert de l’étalonnage public aux privés est en cours, selon la décision du Gouvernement. Décision plus subtile que ce que l’on dit : on n’a pas arrêté l’étalonnage public, on l’a transféré au privé. Ce n’est pas tout à fait la même chose. Arrêter c’est plus facile que transférer. Depuis trois ans, des efforts sont faits pour que les sites où l’on travaillait avant soient repris par des privés. C’est un véritable travail que de transférer ces sites. On travaille pour transférer. On pourrait dire « Nous arrêtons, débrouillez-vous ». Ce n’est pas ce qu’on a fait. On fait des appels d’offre, on va chercher des candidats, on aide les candidats à démarrer. Il s’agit bien d’un passage de témoins et non d’un arrêt brutal même si fin 2013 aboutit à un arrêt. Transférer c’est un arrêt, mais abandonner c’est un autre type d’arrêt. Là c’est un transfert pour que l’activité en elle même ne s’arrête pas. Si l’activité se poursuit au sein du haras, je suis content. L’objectif est de trouver des repreneurs privés.

Quid alors de France-Haras ?
France Haras a toujours été un GIP (groupement d’intérêt public) à durée déterminée. (un GIP c’est fait pour une action donnée qui a forcément une durée déterminée avec des personnes publiques et privées, dont une majorité publique). En France les collectivités ne savent pas travailler avec le privé. Nos lois ne nous le permettent pas. Pour France Haras, le GIP a été créé pour transférer l’activité d’étalonnage, donc les étalons, aux privés. Actuellement c’est en cours. Les équipes de France Haras travaillent depuis de nombreux mois pour que le parc d’étalons actuels puisse être transféré tout ou partie à des repreneurs privés. 

Les sites resteront-ils à l’IFCE ? 
« Seulement ceux qui nous appartiennent. Tous les haras n’appartiennent pas à l’IFCE. (Ex : Le Lion d’Angers, Tartas,… entre autres). Quand je dis nos sites, c’est nos sites : il y a des centres qui vont continuer à nous appartenir : là on est propriétaire. 

Ce qu’il faut retenir, c’est que les centres techniques qu’on avait avant, on les a transférés au maximum aux privés : et puis pour les chevaux qu’on avait donné à France Haras en 2011, l’objectif de France Haras, c’est de les transférer vers des structures de gestion collective des étalons mais ces structures n’existent pas pour le moment. Les trouver, c’est notre travail. Il y aurait un moment de vérité en disant aux professionnels « vous y alllez, vous n’y allez pas ? Si oui, ils nous rachètent les étalons et les conditions de rachat sont à débattre, sinon l’Etat devra se poser la question de ce qu’il fait des étalons. 

Alors quoiqu’il arrive, si on reprenait les étalons, nous ne ferions pas d’étalonnage. On les mettrait à disposition. Et s’ il n’y a pas de stratégie collective, on les vendrait. Mais pour le moment on ne se met pas dans cette situation là parce que l’idée c’est quand même de les transférer. Après si cela ne se fait pas, on se posera la question à ce moment là.

Cette opération terminée, que se passera-t-il ?
« Il n’y aura plus de sites ni d’étalons de reproduction ». 

Quid des sites de l’IFCE ?
« C’est là qu’interviennent les nouvelles missions de l’IFCE ».

« En gros on opérait dans 80 centres techniques mais on avait que 22 haras. Il y avait plus de centres techniques que de Haras. On aura fini de les transférer cette année. Il en reste 8 à transférer. La grosse partie est déjà transférée. Cela fait que nos agents qui étaient dans ces centres techniques (permanents, ou non) sont revenus sur les sites.

D’une certaine façon la réforme a conduit paradoxalement à ce qu’il y ait plus d’agents sur les sites qu’avant. Donc dans les sites, ces agents là portent les nouvelles missions de l’IFCE.

C’est quoi les missions de l’IFCE ? :
-c’est faire de la recherche,
-c’est faire de la formation,
-c’est faire du sport de haut niveau,
-c’est faire la promotion de l’équitation de tradition française,
-et puis faire de l’appui à la filière élevage. (Eleveurs, cavaliers, acheteurs, utilisateurs de chevaux). Par exemple : on a aidé une mairie du côté d’Amboise à faire du ramassage scolaire avec une voiture hippomobile : achat du cheval, aide pour acheter la voiture, formation du cocher et aide pour construire le hangar pour gérer tout cela. C’est de l’appui à la filière parce que quelque part, on a créé un usage pour un cheval. » 

Formations et nouvel usage du cheval.
« Les nouvelles missions, c’est créer des nouveaux marchés, aider la filière à trouver de nouveaux débouchés. Le débouché du cheval actuellement c’est quoi ? : le sport, le loisir, les courses et les usages utilitaires. Si les villes se remettent à acheter des chevaux pour développer des services publiques avec des chevaux, c’est un nouvel usage du cheval qui n’existe pas pour le moment, mais on va y revenir. Il faut le voir comme quelque chose que j’appelle le « slow-pace » (marcher lentement) c’est-à-dire on prend son temps pour se déplacer au lieu d’aller vite. 

Les centres villes ont complètement changé de conception (exclusion totale des voitures et beaucoup de zones piétonnières). Quand on enlèvera les voitures, il faudra bien un peu de traction. Donc on mettra des chevaux. Ce sera un nouvel usage du cheval qui aidera donc les maires. On n’est pas les seuls sur le marché. Par contre former un cocher ou l’employé communal à conduire un cheval parce que ça reste un attelage, choisir un cheval qui ait un bon tempérament, c’est un métier que l’on a bien à l’IFCE; c’est le métier des agents de base qui savent manier les chevaux. On aide donc les communes à développer ce type de projet. Cela fait partie des nouvelles missions : développer l’usage du cheval. Former des cochers c’est un métier que l’IFCE sait faire. Il y a des écoles d’attelage dans toute la France, les deux principales étant celles des Haras du Pin et d’Uzès. Dans chaque site, des gens compétents diplômés BPJEPS au minimum, DE au mieux, font passer le CS cocher (certificat spécial cocher). 

Il faut savoir que l’on fait autant de formation du côté Haras que du côté ENE. C’est 50/50 - 100 000 heures de chaque côté. La formation est donc bien la mission transversale de l’Institut comme la recherche, et cette formation comprend : toute l’équitation qu’on retrouve à Saumur, tout l’attelage qu’on retrouve dans un réseau d’écoles d’attelage que l’on va labelliser « Ecoles d’attelage - Haras Nationaux » tout comme « Le Cadre Noir » est le label de l’ENE - nos deux marques dont on est fier. Enfin, les métiers du cheval : sellerie, bourrellerie, maréchalerie, soigneur, sont toujours pratiqués au sein de l’établissement. 

La plupart sont enseignés à l’Ecole du Pin, particulièrement fameuse et célèbre dans le monde entier pour sa formation de soigneurs et de maréchaux réputés très bons. J’ai aussi demandé qu’on recrute à nouveau des apprentis sur nos métiers - ce qu’on ne fait plus depuis plusieurs années - pour qu’ils restent vivants.

Il y a des selliers chez nous qui sont partis chez Hermès, des gens que l’on forme qui vont dans les grandes maisons, parce que la qualité de notre formation est reconnue en maroquinerie. 

Actuellement les selliers des haras font des selles à piquer pour les Cadres Noirs. Il y a toujours des gens qui ont ce savoir-faire dans les mains et comme ils ne font plus d’étalonnage public, ils reviennent sur leur métier de base. 

En fait, à la place de l’étalonnage, on re-développe nos savoir-faire pour les transmettre parce que l’objectif d’un Institut c’est de produire de la connaissance et transmettre les savoirs et savoir-faire. 

Donc ce chapitre formation fait partie vraiment des axes :

2011 a montré un bon redémarrage, 2012, une stabilité et 2013 continue de croître sur tout ce qui est formation, notamment par l’attelage ».

Sur la recherche : 

« Elle est peu développée encore et le serait plutôt du côté Haras – donc très « cheval-reproduction ». Elle est dotée d’une station expérimentale et d’une équipe de plus de 2O chercheurs dont Sophie Biau basée à l’ENE de Saumur. L’idée est de développer un peu plus autour du cavalier. Tout cela, ce sont les fondamentaux qui ne datent pas de mon arrivée mais qui sont en train de se mettre en place au sein de l’IFCE. 

Je suis très axé « recherche » et très attaché à cela ».

« Concernant l’aspect haut niveau, toujours important, ce que Philippe de Guénin a fait de très bien, c’est d’intégrer l’attelage de haut niveau pour dire : le sport de haut niveau n’est pas qu’à Saumur; il est aussi dans les sites des Haras puisqu’on a un partenariat avec la FFE et des athlètes de haut niveau - six meneurs dans cinq sites. Et puis, bien sûr le haut niveau c’est Saumur avec le Pôle France qui accueille : les Jeunes, la Voltige, le Para-équestre et le CCE. Ce dernier bénéficie de la présence du DTN Thierry Touzaint et de son adjoint Michel Asseray, en permanence sur le site Â».  

Concernant l’appui à la filière, il faut également rappeler ce que les gens sous estiment : le poids de l’organisations de manifestations (nationales et internationales) : nous organisons énormément de concours de toutes sortes : CCE, CSO, dressage, Attelage, etc… : si par exemple l’IFCE arrêtait d’organiser des concours complets, on n’aurait plus Saumur, Le Lion d’Angers, Pompadour, Le Pin. Donc dans les missions d’appui à la filière on retrouve l’organisation d’évènements, en sachant que cela a un coût financier énorme sans rentabilité ! Quand on arrive à équilibrer les frais de fonctionnement (grâce aux sponsors) on est content !

En dehors des sujets que nous venons d’évoquer, y a-t-il d’autres changements ?
Oui au niveau du personnel. J’ai mis en place un nouveau directeur de la Formation de l’IFCE : Jean-Michel Pinel basé à l’ENE. (voir Le Cheval précédent). 

Il remplace Eric Leclerc que j’ai nommé Directeur Territorial de Normandie pour renforcer les cadres de Normandie après le départ du prédécesseur de Sophie Lemaire, elle-même nommée Directrice du Pin. Lucie Henry assure l’intérim au haras de St-Lô, après le départ de l’ancien directeur parti à France Haras. Eric Leclerc dépend donc directement de moi : il est mon représentant sur le terrain, c’est le patron des agents du territoire de Basse et Haute Normandie dont les deux sites principaux Saint Lô et le Pin en basse normandie. Au siège, Claire Chabert, chargée des relations ENE-IFCE, remplace Sophie Lemaire et l’écuyer Nicolas Sanson est responsable pédagogique des formations ENE. 

Quels sont les prochains objectifs ?
Je ne sais pas si c’est un bon objectif, mais j’ai demandé à Jean-Michel Pinel, de faire en sorte que l’ENE et l’IFCE deviennent « un INSEP de l’équitation » pour renforcer le caractère sportif .

L’INSEP, cela veut dire : on est bien porteur du sport de haut niveau. L’Ecole est un instrument de la politique de haut niveau français, et l’on doit être un outil efficace; le Cadre Noir, la formation, le haut niveau en étant les missions intrinsèques. Haut niveau et formation ne peuvent être dissociés. …On doit toujours être les formateurs des formateurs dans un concept de haut niveau.

Donc, l’idée de faire l’INSEP du cheval, c’est de rentrer des méthodes sportives pour les cavaliers. Que peut leur apporter l’INSEP qui allie recherche, formation, prestations ? Derrière ce slogan sera-t-on vraiment l’INSEP du cheval ? L’idée c’est de le devenir, et que quand on parle sport de cheval, on pense à l’Ecole. 

Cela c’est automatique ?
« J’aimerais que cela le soit, je n’en suis pas sûr. Tout cela est un point important pour l’Ecole. Sachant que derrière, il y a des métiers de base qu’il faut préserver. Par rapport à d’autres écoles de sport, on a deux sportifs à former : le cavalier et le cheval. Former un cheval prend un temps fou. Ce que les gens ne comprennent pas toujours……et qui pensent qu’on coûte beaucoup trop cher !  

Globalement, êtes-vous satisfait de la fusion ? 
« Ce que je peux dire : maintenant que l’on a fini de dé-fusionner avec France Haras, on va pouvoir se construire complètement dans la fusion. C’est-à-dire au niveau des sites des Haras (l’ENE n’étant pas concernée puisqu’elle n’a pas dé-fusionné), les Haras vont pouvoir se consacrer pleinement aux nouvelles missions. Et là, il faut que les deux anciennes cultures se marient bien et que je vois des fanions « Cadre Noir » dans les haras nationaux, comme je verrai des fanions « Haras nationaux » le jour où je ferrai des produits «Haras Nationaux » ici. Il y a déjà des endroits où l’on voit les deux (à Lamballe par exemple).

J’ai confiance en l’avenir, malgré les contraintes budgétaires. Cette année le ministère de l’Agriculture a baissé de deux millions d’euros sa participation et les charges s’alourdissent. 2013 est très difficile et 2014 n’ira pas beaucoup mieux. 

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’au-delà de l’Ecole, il y a raiment tout un établissement qui vit et que la difficulté qu’on a, c’est de créer une culture commune aux deux réseaux : l’ENE et les Haras. Au niveau des cadres, des écuyers, le relationnel est plutôt bon au sein de l’IFCE.

…/…

En résumé : Pour France-Haras, l’objectif politique, c’est de transférer les étalons. Cette année 2013 est décisive. Il n’y aura plus d’opérateurs publics. Cela c’est fini.

En fait vous gardez les sites, en supprimant la mission d’étalonnage. 
« Oui, parce que la formation va remplacer l’étalonnage. A Uzès, il y a longtemps que la formation Attelage est en place.  

Cette formation sera spécifique à chaque site, ou générale ? 
« Le produit de formation est complètement défini ici à la direction de la formation. Dans les sites, ils auront le droit de faire de la formation suivant leur niveau de qualification. C’est-à-dire que l’on autorise pas à chaque site à faire tout et n’importe quoi. Ils ne feront que s’ils sont capables de faire et s’ils répondent au référentiel de formation. Cela concerne tous les métiers du cheval. Les formations « sport » étant réservées à l’ENE, sauf si pour des raisons qui nous appartiennent, nous décidions d’ouvrir une formation DE sur un autre site, pour des raisons de commodités de formation. Uzès, par exemple, si besoin était dans le sud de la France, et Saumur étant saturé. Tous les sites doivent faire de la formation. A la Roche-sur- Yon, leur formation emblématique c’est la sellerie. 

L’étalonnage est remplacé par des activités de transfert. 
« Oui avec toujours à la base : production de connaissances et transfert de nos savoirs et savoir-faire ». Ce que l’on ne faisait plus depuis dix ans. 

C’est là, la vraie réforme côté Haras : on ne fait plus de génétique, on transfert nos savoirs et savoir-faire. Côté ENE, faire que la formation devienne l’INSEP de l’équitation, ce sont les deux points forts à mettre en place cette année.  

Finalement, tout se construit dans le sens que vous vouliez ?
« Pour le moment oui. Et puis je ne suis pas tout seul. Je ne décide pas seul. Nous avons des tuteurs et collègues avec lesquels on parle. Tous ces objectifs sont suivis collectivement.

Je suis bien en train de lancer ce que j’ai prévu, sachant que la dynamique des sites a été lancée par Philippe de Guénin. J’ai ensuite formalisé la démarche des sites pour qu’ils soient très autonomes dans leur gestion. Autonomie dans les deux sens : c’est-à-dire qu’ils sont responsables de leurs dépenses et de leurs recettes, à savoir sanctionnés sur leurs résultats : bons, on aide, mauvais on en tire les conclusions. L’avenir des sites appartient bien aux sites et non pas au directeur général ! Le site qui fonctionne mal doit s’en prendre à lui-même. Les gens ont très bien compris cela.

En conclusion vos objectifs 2013 sont-ils en train de se mettre en place ?
« Tout à fait : d’une part, pour les sites : c’est leur autonomie après la fin de l’étalonnage publique,

d’autre part, pour l’ENE : c’est la mise en place d’une dynamique qui nous fasse devenir l’INSEP du cheval en disant : je fais de la recherche, de la formation et de la prestation au profit de ma filière. Tout cela c’est très important. 

Après, en terme interne, c’est enfin de faire la fusion qui se voit. C’est à dire, que les gens se disent : « quand je suis à l’ENE, je suis aussi à l’IFCE-; quand je suis dans les haras, je suis aussi à l’IFCE ». Ce qui n’est pas encore le cas. Mais cela est normal. Je n’émets aucune critique. On ne peut pas fusionner deux entités quand on n’a pas fini de dé-fusionner la première. C’est impossible. Donc Philippe de Guénin a commencé la dé-fusion avec France-Haras : un gros travail, puisqu’il y a un an d’avance sur le planning.  

Toute cette réforme est très compliquée… 
« Oui, Tout cela est vraiment très compliqué et ça prend beaucoup de temps. C’est pour cela que je dis que transférer est plus compliqué qu’abandonner. On aurait abandonné, c’était simple. On fermait tout de suite, on vendait les étalons aux enchères sur deux ou trois ans pour ne pas casser le marché. Et l’Institut avançait sur ses nouvelles missions très vite. Le choix a été de transférer un capital. 

Quoiqu’il en soit, « le train est en marche Â». Son arrêt est prévu pour 2015 quand il aura atteint son but : que l’ensemble des transferts soit fait. « L’Institut aura perdu l’étalonnage mais il sera toujours animateur de la filière équine ».

Propos recueillis par Dominique Culliéret  

25/04/2013

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