Ehning-Delaveau au sommet

Saut Hermès

Si les cavaliers s’étaient partagés entre le Grand Prix de Doha (et sa dotation phénoménale) et le prestigieux concours parisien, la compétition ne s’en est pourtant pas trouvé amputée puisque le numéro un mondial, Scott Brash, le champion d’Europe, Bosty, et de nombreuses autres pointures de la discipline ont choisi la capitale française afin de préparer la finale Coupe du Monde de Lyon mi-avril.

Tout était prêt : dès le lundi une flotte de 40 camions avait livré les 1 100 tonnes de Prosol Blanc T&C (Toubin et Clément fournisseurs des pistes depuis sa création), et, nouveauté cette année, une piste TC sur la place de l’hôtel de Ville à Paris servait aux animations Poneys. Vendredi 14 mars, premier jour de compétition et premier podium 100 % français dans le Prix Hermès Sellier à 1,50 m, qualificative pour le Saut Hermès du lendemain. Partant en ouvreur, Bosty en selle sur Castle Forbes Vivaldo Van Het, met un vrai tempo, tourne dans un mouchoir de poche, semble imbattable en 52’’10. Christian Ahlmann, Jessica Kürten ou encore Caroline Nicolas, n’arrivent pas à battre le chrono. Il faudra attendre le 17^e partant, le Normand Julien Epaillard sur un Cristallo ultra agile mais surtout d’une rapidité à couper le souffle pour détrôner Roger-Yves Bost. 50’’85, imbattable mais surtout imbattu ! Derrière eux, Penélope Leprévost et sa bouillonante Nayana prennent la 3^e place, suivies de Pius Schwitzer sur Toulago et Kevin Staut associé à Sylvana HDC. 
Au coude-à-coude et très bien équipés, les deux cavaliers de l’équipe de France annoncent d’entrée de jeu les prémices d’un week-end fort en résultats.
En effet, Julien Epaillard profitera de la bonne disponibilité de son cheval pour prendre également la 3^e place de la vitesse GL Events du samedi. Une vitesse compliquée tant le parcours monté demandait rigueur et vigilance et ne permettait finalement pas de prendre un vrai rythme. Seulement 9 partants boucleront ce tour sans faute. Parmi eux, c’est Marc Houtzager/Sterrehof´s Uppity suivi de son compatriote Maikel van der Vleuten et VDL Groep Eureka qui monteront sur la 1^re et 2^e marche.
De son côté, Bosty, à nouveau associé à son formidable Vivaldo Van Het, ne laissera aucune chance à ses concurrents dans le Prix dominical à 1,50 m de la Ville de Paris. Epreuve en deux manches, le couple sort double sans-faute et s’impose devant le Britannique Daniel Nielson sur Coco Bongo et l’Allemand Hans-Dieter Dreher en selle sur Constantin B. En sortie de piste, le champion d’Europe ne manquera pas d’éloges sur son cheval qui n’aura pas touché une barre du week-end.

Pénélope et Flora, égéries Hermès
Il était d’ailleurs un des seuls à réaliser deux parcours sans pénalité dans le fameux « Saut Hermès » la veille. Epreuve propre au concours parisien, elle réunit par couple les 10 meilleurs cavaliers et cavalières de la compétition. Tirés au sort, les paris étaient ouverts à savoir qui de Christian Ahlmann/Katarina Offel, Bosty/Laura Renwick  ou encore Pénélope Leprevost/Marco Kutcher et Janika Sprunger/ Lars Nieberg, pour ne citer qu’eux, arracheraient  la victoire. Chacun y allait d’ailleurs bon train sur les pronostics mais c’est finalement « la » vainqueur 2013 qui l’emporte : Pénélope Leprevost, sur sa très bonne Flora de Mariposa, fera une véritable démonstatrion. La jeune jument, qui épaulait jusque-là Nayana et Nice Stephanie, fait une véritable entrée dans la cour des grands et expose au grand jour son incroyable talent. Une promenade de santé sur 1,60 m, voilà comment pourrait être résumé le parcours de cette fille de For Pleasure, seulement âgée de 9 ans. Son co-équipier, Marco Kutcher, associé au très bon 8 ans Cornado II, fils de Cornet Obolenski, avait pourtant décidé de ne pas aller trop vite pour préserver son cheval. Phénomenal, son étalon gris signe un temps très rapide en seconde manche (44’’47) que seul Roger-Yves Bost arrivera à battre en 42’’48 (Laura Renwick faisant 8 points, le couple est relegué à la 8^e place). Derrière eux, on retrouve Kevin Staut/Rêveur de Hurtebise HDC associé à une Jessica Kürten/Arezzo VDL, qui renoue brillament  avec le très haut niveau, puis le couple Katarina Offel/Charlie et Christian Ahlmann/Cornado II, tous deux en selle sur des fils de Cornet Obolenski, largement représenté ce week-end.

Haute technicité
C’est une véritable bataille qu’aura offert une fois de plus le chef de piste Frank Rottenberg  lors du   Grand Prix Hermès à 1,60 m, l’épreuve phare de ce week-end parisien. 37 cavaliers  au départ, une piste toujours aussi délicate à monter, connue pour son étroitesse notamment, et un parcours difficile non tant par sa hauteur mais par son exigence technique, tout était réuni pour clôturer ce « Saut Hermès » de la plus belle des manières. Si la hauteur ne semblait pas une difficulté pour l’ensemble des acteurs engagés, la largeur des oxers, les tournants très serrés mais surtout la répétition de distances courtes, viendront à bout de la majorité des couples. 13 obstacles et 16 efforts demandant une attention sans relâche pour tenir tête à ce parcours s’achevant sur une ligne composée d’un oxer  suivi à trois foulées d’un double vertical-oxer. Encore faudrait-il ne pas avoir fauté sur le vertical n°11 en courbe et  face à la porte, véritable juge de paix, ou sur le n°7, un triple Oxer-Oxer-Vertical (2 foulées, 1 foulée), suivi à 4 foulées d’un vertical en bout de ligne ou tout simplement le  vertical n°1 qui aura également fait tomber de nombreux espoirs. Et de l’espoir,  il y en a eu jusqu’au bout pour Kevin Staut sur Rêveur de Hurtebise HDC, très bien remis de sa blessure. Le couple offre à un public conquis, un très beau tour, jusqu’au dernier oxer... qui tombe. Même sort pour les pointures Scott Brash, Pius Schwizer et  bien d’autres puisque seulement 4 cavaliers signeront le « clear-round » sur ce parcours. 
Côté français, Julien Epaillard sur son brillant fils de Casall, Cristallo A LM, Philippe Rozier sur Rahotep de Toscane, qui avait déjà fait grosse impression à Bordeaux, Simon Delestre/Qlassic Bois Margot, Matthieu Billot/U2 ne parviendront pas non plus à vaincre ce parcours, faisant chacun une barre. Scores plus lourds pour nos deux amazones puisque Pénélope Leprevost et Nayana sortent avec douze points et Caroline Nicolas avec 8 points. Cette dernière aura cependant réalisé un très beau week-end pour cette première participation au Jumping. 

Trop difficile ? Pas pour tous
Parti en n°2, Patrice Delaveau en selle sur Lacrimoso HDC signera le premier (et un des seuls) sans faute de l’épreuve. Toujours aussi à l’aise en Indoor, le champion des Hong Kong Master 2013 montre une fois de plus tout son potentiel associé au cavalier du Haras des Coudrettes. Derrière lui, l’Allemande, Ukrainienne d’adoption, Katarina Offel et  Lacontino, signe le deuxième sans-faute ainsi que Laura Renwick sur le jeune et prometteur Bintang II. Le dernier à accéder au barrage n’est autre que le styliste Marcus Ehning, dont le tour sur Cornado NRW semble d’une facilité déconcertante. Le gris avec lequel il s’imposait déjà dans le Grand Prix de Bordeaux, a tout des plus grands, la force, le mental et l’agilité et permet au cavalier de rêver à nouveau de podiums et de médailles lors de grands championnats. 
Ils sont donc 4 au barrage, 4 à tenter de décrocher ce Grand Prix  à  400 000 euros (dotation doublée suite à la concurrence non négligeable de Doha). Patrice Delaveau part en ouvreur sur ce parcours  qui, à contrario de la manche précédente, demandera de grandes galopades et des prises de risques dans les courbes. Le Français le sait mais, à un mois de la finale Coupe du Monde, il veut préserver son cheval. Rapide, il sortira de cette deuxième manche sans faute mais battable en 37’’62. Katarina Offel et Lacontino comptent saisir leur chance afin de reprendre le titre dans ce Grand Prix Hermès (gagnante 2012). La cavalière joue son va-tout, enlève une foulée dans la dernière ligne mais faute malheureusement sur les deux derniers verticaux. Derrière elle, Laura Renwick s’élance avec Bintang II. La cavalière est connue pour sa rapidité et ne faillit pas à sa réputation. Cependant, elle commet deux erreurs et voit également la victoire lui échapper. Dernier à partir et non des moindres, le roi du tracé, qui a eu le temps d’apercevoir le parcours de Patrice Delaveau, entre en piste. Marcus Ehning, vainqueur de la première édition du Saut Hermès compte bien inscrire une nouvelle fois son nom au palmarès et assoir la suprématie allemande à Paris. A l’instar de son ancienne compatriote, l’Allemand enlève des foulées dans l’avant-dernière ligne et profite de la grande amplitude de son cheval sans pour autant couper les virages. Le timing est serré, le match franco-allemand à son apogée. Le dernier obstacle est franchi, sans faute... La victoire ?  Le Germanique et son superbe fils de Cornet Obolenski enlèvent 0’03 au chronomètre de Patrice Delaveau et s’emparent des honneurs. Les futurs adversaires de la finale de Lyon semblent être tout désignés…

A. de La Rochefoucauld