Femmes de cheval : Chez Camille Baume au haras de la Font, c’est Gay


En fait, présence permanente sur tous les fronts.

C’est vrai que ça permet d’être dans un contact direct avec les gens, de pouvoir assurer un service après-vente. Il y a des gens qui investissent dans des poulains, quel que soit l’âge, et du coup je continue à élever pour eux, ou je les aide aussi à placer stratégiquement leur poulain. J’agis un peu comme conseil.

Je me suis installée toute seule comme une grande en 2007. J’étais cavalière puis je me suis tournée vers l’élevage de chevaux de sport, CSO, Complet, Dressage aussi, et de chevaux de course. J’ai travaillé également dans des haras de galopeurs où j’ai acquis une expérience qui aujourd’hui me sert beaucoup pour la gestion des chevaux, pour la stratégie des soins, pour la préparation pour les ventes. C’est mon domaine de compétence.



Un gros domaine ?

Une quinzaine d’hectares d’un seul tenant à côté de Poitiers. C’est un secteur où il n’y a pas énormément d’élevages mais c’est assez bien placé, au Centre Ouest de la France, à deux pas de l’autoroute A10, du Futuroscope, il y a un aéroport à côté et je suis à 5 mn de la gare TGV. J’ai des clients qui viennent absolument de partout.



Votre affixe c’est Gay ?

Tout à fait, moi c’est Gay. Ce n’est pas du tout personnel, c’est l’affixe de ma toute première jument. C’est très sentimental et quelque part un affixe il faut aussi que les gens s’en souviennent donc je me suis tapée le culot d’utiliser cet affixe-là (rires).

Grosso modo, je fais naître entre 7 et 10 poulains par an à peu près, parce que je ne fais pas saillir la totalité des juments chaque année. J’alterne repos et saillie et j’essaie d’avoir un roulement pour économiser les juments vieillissantes, pour aussi prévenir les éventuels soucis.



On vous voit à Saint Lô et très souvent à Pompadour.

Je suis une éleveuse assez européenne, je ne suis pas pro Selle-Français, pro Anglos, j’élève pour créer des chevaux de sport de demain. Je trouve qu’on a la chance en France d’avoir des très, très bonnes lignées. Après voilà , il y a aussi des bonnes lignées de sang à l’étranger donc moi je mixe un peu tout ça et j’essaie de toujours être à la recherche du croisement parfait pour avoir le cheval moderne, européen. Le sport international aujourd’hui nous montre bien qu’en combinant les origines françaises avec les origines étrangères, on obtient de bons chevaux. Je suis attachée aux souches Anglos parce qu’elles sont à la base de nos grandes lignées maternelles. J’utilise l’Anglo soit en race pure, soit en croisement. J’essaie vraiment de faire des croisements complémentaires, réfléchis, avec une vision toujours à +10 ans. Il faut toujours se projeter, s’améliorer, suivre aussi le mouvement du sport. Les formats d’épreuves évoluent avec du matériel plus léger, des pistes toujours plus étroites. Il faut des chevaux avec de la réactivité, avec de l’intelligence, du sang, du respect, donc ça on le trouve aussi dans le sang, mais il faut de la force, de la trajectoire, une certaine puissance. C’est pour ça que j’ai des souches de sang mais je croise un petit peu avec des étalons français et européens pour essayer d’avoir le bon poulain de sport de demain.



Quelles souches maternelles avez-vous ?

J’ai la chance d’avoir les deux sœurs de Romantic Love pour le Complet notamment, deux sœurs utérines qui sont actives à la reproduction à la maison et qui produisent plutôt très, très bien. En Anglo-Arabe j’ai réussi ces dernières années à réunir les meilleures souches, les seules souches Anglo qui ont tourné à très haut niveau en race pure toujours, donc du coup je croise en race pure et en croisement même si ça fait un peu grincer des dents aux puristes. J’ai la souche de Vertu, qui est toute la souche Véloce de Favi, Rive du Crocq, j’ai la souche de Mokkaïdo, qui a fait les JO, la souche de Pirole de la Chatre, c’est la souche de Laurentide, de Nathan de la Tour. J’ai aussi des souches étrangères, croisées avec du sang français. J’ai rentré il n’y a pas longtemps une jument Quidam-Capitol-Sacramento Song, avec une très bonne souche hollandaise. J’ai une bonne jument, Wicky de Montsec qui avait fait Lanaken à 6 ans, 7 ans, qui est une Emilion-Abgar ps-Grandeur, qui a fait du 3* avec Marc Dilasser. J’ai des croisements maison aussi avec des très bonnes souches pur-sang de Steeple Chase que j’ai croisées avec du Quick Star, avec le sang de Ramiro, avec le sang d’Almé, avec Cassini. J’ai aussi la souche d’ Itot du Château d’où la jument que j’ai emmenée à St Lô, la Clinton, et son beau poulain de Glasgow qui est 5e des mâles, ça c’est avec une souche 100% Selle-Français.

La maman s’appelle Valentina Desbruyères. Le poulain a été acheté par une très grosse écurie étrangère dans le cadre d’ailleurs du concours de Saint-Lô. Des cavaliers qui étaient sur place ont détecté le poulain, du coup je vais travailler avec eux. C’était la première fois que j’allais à Saint-Lô avec un foal et je ne m’attendais pas du tout à ça et ça a été une belle expérience et une agréable surprise.

Vos étalons ?

A 80% ils sont issus de la maison. Mon tout premier, Tinka’s Gay (Tinka’s Boy-Jalienny), fait des champions de France Anglo depuis 3 ans. C’est un Anglo-Arabe de croisement. Ses poulains marchent très bien. J’en présente un à Pompadour, un 2 ans qui fut champion de France des foals et qui devrait être fortement remarqué. C’est un vrai défi de créer ses propres étalons. J’ai croisé avec des mères Anglo, j’ai croisé avec Quick Star, Clinton, Tinka’s Boy. Je pars du principe qu’il y a aussi une demande parallèle pour des chevaux qui ont un petit peu plus d’influx et de sang mais tout en conservant la force, le sérieux, la technique, la pertinence génétique. J’ai essayé de me placer sur ce marché là et ça avance doucement mais sûrement.



Vous êtes à Pompadour tous les ans ?

Tous les ans, oui. C’est vraiment une semaine où j’ai plaisir à aller, c’est très agréable, en plus c’est un site qui est magnifique, c’est très bien organisé, les chevaux sont bien installés, l’équipe de l’Anglo ce sont des gens passionnés et sympas. J’ai à cœur de soutenir l’Anglo alors je me fais un devoir d’être là tous les ans, de toujours présenter un poulain quelles que soient les catégories, et j’essaie en plus d’encourager mes clients à emmener leurs poulains aussi en finales parce que c’est bien soutenu par le stud-book. J’ai deux pouliches qui courent la finale des 4 ans en Complet, Fortuna Gay fille de mon étalon Tinka’s Gay et For Love Gay, une fille de Balou du Rouet avec une mère Cook du Midour. J’emmène aussi une foal de mon autre étalon, Darshaan Gay (Quick Star), mère Yarland Summersong.



Vous avez connu Jean de Laurière ?

Tout à fait, j’ai eu la chance de travailler chez Jean-Michel Garnier où j’ai pris la passion des Anglo-Arabe et du coup j’ai côtoyé Jean de Laurière. Il m’a beaucoup appris à travailler les chevaux en liberté, la génétique. C’était quelqu’un de passionnant, avec beaucoup d’humour, très sympathique, une bible pour l’élevage. J’ai côtoyé aussi André Mage qui est à l’origine de tout l’élevage de la Tour, de Faritchou, de tous ces étalons-là . J’ai eu la chance de voir passer et de pouvoir monter des étalons de renom, quand j’ai travaillé chez Jean-Michel Garnier. J’ai fait naître Nathan de la Tour, c’est assez rigolo.



Qu’est-ce qui vous a amené aux chevaux et à l’élevage ?

La passion, le virus. Je ne suis pas du tout issue d’une famille dans le milieu du cheval. J’ai des grands-parents qui un jour ont peut-être fait l’erreur de me poser les fesses sur un petit poney et à partir de là ça ne m’a jamais quitté, j’ai monté dans un poney-club assez dynamique ensuite je suis passée à cheval. Ma première jument, qui portait l’affixe Gay, d’où le nom de l’élevage, m’a emmenée jusqu’aux Grand Prix 135, aux finales à Fontainebleau et ça a été une vraie passion dévorante, tellement dévorante que j’y ai dédié ma vie (rires). C’est vraiment un métier de passion.

Recueilli par ER

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