Flicka, une souche exceptionnelle

Flicka avec la baronne Empain (© col privée)
Qlassic Bois Margot performer sous la selle de Simon Delestre et top reproducteur (© ER)

C'est en 1947 que le roman « Mon amie Flicka » fut traduit en français. Beaucoup de juments ponettes et non constatées portèrent immédiatement ce prénom. Une seule demi-sang y eut droit. Née en 1949 chez Marcel Duval à Dogulé dans le Calvados, elle était par Fasano PS et Arlette par Pont Creon (un fils d’Issu d’Amblie qui avait bonne réputation chez les bons cavaliers du Calvados) et Kermesse par S’il Vous Plait dont Jean de Chevigny (alors inspecteur général des haras et ancien directeur du Pin) le voyait comme un excellent sauteur et reproduisant très bien cette qualité. La « Arlette » en question reproduisait aussi très bien puisqu'elle est qualifiée « Elite Concours Hippique » grâce à sa Flicka mais aussi grâce à une certaine Mandoline B (Urus) gagnante internationale avec le Dr Bouffault, débutée par Melle Mony. Nenuphar D (Albert II PS) fut aussi bon gagnant à 5 ans puis certainement exporté… Acheté par le couple Minot, Altesse leur donna Tsarine d’Escla, mère d’Emir d’Escla ICC 142, ISO 133 et Oural d’Escla finaliste a 4 ans.

Fasano son pur-sang de père fut affecté au Pin en 1946 après une très belle carrière en plat. Bai d’1,62 m « c’était un très joli cheval, bien dirigé dans l’épaule et le garrot, avec de l'origine et de la classe mais qui manque de quantité, qui est léger dans ses dessous et menu dans ses articulations » (notes de l’inspecteur).

Il avait gagné des classiques à 2 et 3 ans, « jouable » dans le Grand Prix de Paris, le Jockey Club, le Lupin, l’Arc et fut 19^edu handicap libre des 3 ans. Sa mère Fasa par Asterus (grand étalon !) eut 4 autres bons gagnants. Par son père Barneveldt (Grand Prix de Paris), il était petit-fils de Son In Law que l'on retrouve chez Furioso, Rantzau, Popof et Cottage Son (tête de lignée « C » du Holstein).

Offerte à 4 ans à la baronne Empain qui la débourra et la sortit en jeunes chevaux, elle attaqua en même temps les CSI. Très très chaude, elle ne tirait pas parce que sa cavalière ne la contrariait pas, elle montrait toujours beaucoup de marge et sa générosité était extraordinaire : Rozell Empain se souvenait, après avoir gagné le Grand Prix de Marseille et rentrant rênes longues au paddock, s’être trouvée devant un oxer à l'envers… et l'avoir sauté ! Elle prit sa retraite avec 890 175 francs de gains en 1957 (à 9 ans) après avoir fréquenté les plus beaux terrains d'Europe dont le CSIO de Rome…

Sur les conseils de l'entraîneur Thomas Moret (parrain de Diane Empain) elle fut saillie par Le Tyrol, dont la carrière fut inférieure à celle de Fasano mais qui fut quand même 3^ede l’Arc et était un très beau cheval bien né et en eut Rocket qui était plus compact et plus « prudent » que sa mère (il tenait ça de Le Tyrol) fut éduqué par Georges Calmon, qui passait pour le meilleur de France…, il fut 2^e du championnat et des gains des 4 ans, 2^e aussi du championnat l'année suivante mais seulement 4^e par les gains… mais l'année de ses 6 ans, il était LE meilleur ! Et 5^edes chevaux de tous âges. Il se trouva ensuite sous la selle de Janou Lefèvre dont l'olympique Kenavo prenait de l'âge. Dans les tout meilleurs chevaux français (1^er en 69, 71 et 73) il fut sélectionné pour les Jeux de Mexico où il n'était « que » 32^e (mais à 7 ans et meilleur de notre équipe, médaille d'argent) il fut également 2 fois champion du monde des cavalières…

Vide quelques années, Flicka eut USA de Nickel (propre frère du grand Nithard et père de la célèbre Bourrée « Chenu ») qu’eut l'honneur de remonter G. Mancinelli médaille d'or de Munich. Puis ce furent Coquette puis Dolly II, Edigo, Flicka’s Girl (Propre sœur de Rocket) achetée par Fernand Leredde mère du bon Sheriff Rouge et surtout du crack Rochet Rouge très gros sauteur mais très anxieux que J.-P. et Alexandra Ledermann amenèrent à la médaille de bronze d'Atlanta et les championnats mixtes d'Europe 1999 à Hickstead. Flicka mourut d'une hémorragie par rupture de l'artère utérine au poulinage d'Héliopolis A.

Coquette n'avait pas l'origine de Flicka’s Girl, car Ironside, conseillé par Georges Calmon qui voulait certainement faire plaisir à son copain Guy Ribard, ne fut pas un très bon étalon. Très chaude elle fut difficile à débourrer et fut très vite poulinière. Elle donna d'abord Istria, un peu compliquée mais puissante, (comme beaucoup de Dynamique), exportée, puis le très bon Kartouche sorti par Jean-Pierre Bonneau et exporté, puis Nistria très compliquée aussi mais qui atterrit sous la selle de Philippe Lejeune (ancien élève de G. Calmon !) et gagna si bien en coupe du monde qu'elle fut 3^e de la finale 1998 !

Pleine de In Chala A, Coquette fut conseillée par M^me Waleska de Rouge à Alain Chevalier qui, venant d'acheter un tracteur… s’ennuyait des chevaux ! Cette alezane d’1,66 m et très dans le sang fut d'abord avant-dernière en concours de poulinières, mais l'année suivante, le jury, plus au courant de l'origine la classa 2^e ! Ce qui donnait droit à Double Espoir dont les poulains montraient de la qualité donc se vendaient bien. Ce fut Source d’Espoir (grand-mère de Qlassic Bois Margot). Puis ce fut son propre frère Apollon du Roc sorti par Bruno Rocuet puis par Ian Tops en CSIO à 7 ans ! Leur autre propre sœur Ballerine du Roc est surtout la mère d’Ivoire du Roc poulinière en Belgique chez Daniel Demesmaker et la dernière Coquette du Roc a donné le bon Lavalette Leamax.

Les souches qui produisent deux chevaux de niveau olympique ne sont pas légion mais celles qui en font 3 sont rarissimes et les Rocket, Rochet Rouge et Qlassic Bois Margot (qui semble reproduire merveilleusement bien) illustrent celle de Flicka. On ne peut que reprocher à Qlassic de ne pouvoir reproduire en CSAN (Chevaux de Sport Anglo Normand).

Philippe Hilaire

29/03/2024