Gouraud, l’homme qui nous fait aimer les femmes de cheval
Il avait commencer avec sa collection Cheval-Chevaux. Là il frappe fort avec ce dictionnaire des amazones à travers les siècles et les mondes, de l’Antiquité à nos jours, femmes de légendes, inconnues, oubliées, artiste de cirque, peintres. De Penthésilée (XII ème siècle avant J.-C.) à Leprévost Pénélope, elles sont toutes là . Cent contributeurs ont participé à cette gigantesque recherche imaginée par l’auteur il y 30 ans. On y trouve des écrivains, des chercheurs, des professeurs d’université, des historiens, des journalistes, des cavalières, tous et toutes curieux de l’histoire passionnante des ces femmes touchées par la grâce équine et compétents dans leur domaine. On doit à Pascal Renauldon (R&B presse) les soixante-deux portraits des amazones sportives. Sa série commence avec la Danoise Lis Hartel, première femme de l’histoire à avoir été médaillée olympique et se termine avec l’Américaine Misdee Wrigley-Miller, rare meneuse à quatre chevaux.Â
Ce « pavé » m’est arrivé aux premiers beaux matins d’avril, au moment où les oiseaux recommencent à chanter. J’ai eu un peu peur, le bouquin est épais, pas une seule image, du texte au kilomètre. C’est illisible, me suis-je dit, péremptoire…J’ai feuilleté en commençant par la fin et suis tombé sur la notice de la Normande Marguerite Savary, signée Alain Talon. Passionnant.  Puis celle de Marion Scali signée Adeline Wirth. Très bien écrit comme sait faire Adeline. Puis Françoise Sagan par Jean-François Pré. Un vrai bonheur. Depuis, chaque matin, au café, un rituel s’est installé avec la lecture de quelques portraits.Â
La première partie du livre, le tiers, propose un survol chronologique d’une sélection de personnages dont la légende repose sur un fonds historique, de la plus haute Antiquité jusqu’à l’année 1900. La seconde est contemporaine et à entrées multiples qu’un judicieux classement par ordre alphabétique des dames facilite grandement. C’est étonnant, distrayant, enrichissant. Quelle belle idée et quel travail de la part des auteurs et du rédac-chef Gouraud !
Alors pourquoi ce dictionnaire des amazones ?Â
Jean-Louis explique « En vérité c'est un projet que je traîne avec moi depuis une trentaine d'années. D'abord il faut s'entendre sur ce que j'appelle une femme de cheval.  Pour moi ce n’est pas obligatoirement une femme qui monte à cheval, ce n’est pas nécessairement une cavalière, ce n'est pas nécessairement une écuyère, ce sont toutes ces femmes dans la vie desquelles le cheval a occupé une place importante, même si elles n'ont jamais pratiqué l'équitation. Une artiste peintre comme Rosa Bonheur par exemple qui était très inspirée par le cheval pour laquelle le cheval a été un thème essentiel d'inspiration, pour moi, de ce seul fait, elle est une femme de cheval. De la même manière il y a de grandes femmes propriétaires de chevaux de course qui n'ont jamais monté à cheval, qui ne sont ni cavalières, ni jockeys et qui sont pourtant des vraies femmes de cheval. J'ai voulu tenter de réunir en un seul volume toutes ces femmes, toutes disciplines confondues, dans la vie desquelles le cheval a eu une place primordiale. Naturellement, beaucoup de ces femmes ont eu par ailleurs une activité qui les a rendues célèbres, par exemple et tout simplement Jeanne d’Arc, ou bien l'impératrice de Russie qui sont restées dans l'histoire à cause de leurs actions militaires ou à cause de leurs actions politiques, mais dont on n'avait pas encore suffisamment souligné le fait qu’elles avaient une relation très importante avec le cheval.Â
Je me suis lancé dans cette affaire une première fois il y a 30 ans avec notre amie Marion Scali à qui j’avais demandé de faire cette espèce de dictionnaire qui reposait sur trois ambitions qui s'additionnaient : de tous les temps, de toutes les régions, et de toutes les disciplines. Marion fut malheureusement emportée par la maladie. Alors, finalement je me suis décidé à me lancer moi-même dans cette affaire il y a trois ans en recrutant des spécialistes, soit d'une époque, soit d'une région, soit d'une discipline. A tous ces collaborateurs, et c’est ça peut-être l’originalité de ce bouquin, je leur ai laissé toute liberté, sauf une : ne pas dépasser 5 000 signes par notice, c'est-à -dire 2 feuillets. Ils ont eu toute liberté sur le choix des personnages et surtout, c'est ça qui donne un certain charme au bouquin, leur liberté de ton. Ce qui fait qu’il y a des notices parfois très amusantes, d'autres très scientifiques, d'autres un peu longues, d’autres un peu trop courtes. Chaque notice est signée de son auteur. Tous l’ont fait bénévolement, je suis très redevable de leur générosité ».
Jamais de découragement dans cette entreprise de marathonien ?
« Plus j’avançais dans ce projet plus je m'apercevais que c'était irréalisable, parce que trop ambitieux. Toutes les époques, toutes les disciplines, toutes les régions du monde, c'est de la folie. A un moment j'ai commencé à déprimer en me disant que je n’allais jamais y arriver.  Jusqu'à ce que je fasse part de mes états d'âme à cette grande historienne de la lutte des femmes qu’est Michelle Perrot. Je lui ai fait lire les notices que j’avais. Quinze jours après, elle me téléphone en disant c’est épatant, c’est formidable, j’apprends plein de trucs, c'est riche, il faut le faire. Son encouragement m’a vraiment soulagé et du coup elle a accepté de faire une préface. Elle y explique le sens de toute cette accumulation en constatant que, au fond le cheval est une espèce de marqueur qui accompagne l'émancipation des femmes ».Â
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Etienne Robert
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Amazones
ACTES SUD
Préface de Michelle Perrot
740 pages . 36.90 € TTC
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