Juridique : Le port de la bombe, casse-tête juridique ?
La proposition de loi n°1368, visant à rendre obligatoire le port d’un casque protecteur pour les cavaliers circulant sur la voie publique, introduisait sa mesure par cet exposé assez révélateur : « L’équitation a toujours été un sport dangereux, source d’accidents avec des conséquences potentiellement graves, voire mortelles. (…) L’accidentologie de l’équitation recense 500 traumatismes crâniens par an environ, soit plus d’un par jour. ».

Si cette proposition de loi n’a jamais abouti, il n’en demeure pas moins que le port de la bombe, ou plutôt l’absence du port de la bombe est génératrice d’un contentieux récurrent.

Aperçu juridique de la question.

Il est vrai que le Code du sport, dans sa section relative aux mesures de sécurité applicables dans les centres équestres et écuries de propriétaires ne prévoit pas explicitement, dans sa série de règles à observer, le port de la bombe ou du casque. Cela étant, l’article A322-127 dispose que l’état du matériel utilisé, de la sellerie et du harnachement ne doit mettre en danger ni la sécurité des cavaliers, ni la santé du cheval. Un devoir de sécurité est donc a minima édicté.

Dans les concours officiels, c’est l’article 6.4 du règlement général de la Fédération qui précise : « Une protection individuelle céphalique ajustée, répondant aux normes équestres en vigueur, et plus communément dénommée casque ou bombe, est obligatoire pour toute personne à poney / cheval dans l’enceinte du concours. La jugulaire doit être attachée et ajustée. ».

Dans les centres équestres et écuries, ce sont en principe les règlements intérieurs qui imposent la bombe aux cavaliers. A ce titre, la structure d’accueil se doit d’observer, vis-à -vis de sa clientèle, un certain nombre d’obligations.

g La première est une obligation d’information. A ce titre, le centre est tenu de conseiller le port de la bombe (Cour d’appel de Lyon 13 mars 2003). Outre la mention de cette exigence dans le règlement intérieur, l’affichage de cette consigne dans les locaux paraît indispensable.

g La seconde est une obligation de sécurité. Il s’agit là d’une obligation de moyens qui impose au centre équestre de tout mettre en œuvre pour empêcher qu’un accident se produise. De ce fait, seule la démonstration d’une faute commise par ce dernier est de nature à entraîner sa responsabilité.

Le centre équestre a donc, outre l’obligation de conseil, l’obligation de mettre à la disposition des cavaliers des bombes ou casques en bon état et de vérifier leur adaptation à la morphologie des participants. A titre d’exemple, la Cour d’appel de Rouen, dans un arrêt du 6 mai 2004, a jugé qu’il appartenait au moniteur de vérifier que les bombes étaient adaptées à la morphologie des cavaliers et correctement attachées. Au cas d’espèce, la bombe n’était plus en place au moment de la chute. Dès lors, l’absence de vérification de la bombe constituait une faute ayant un lien direct avec les conséquences dommageables de la chute. Le centre équestre a été condamné.

Par ailleurs, le centre équestre doit, non seulement proposer, mais également exiger de ses clients le port de la bombe pour monter à cheval et ce, quand bien même la réglementation actuelle ne l’imposerait pas (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 30 avril 2013). Le centre équestre doit donc veiller à ce que l’obligation de porter une bombe soit effectivement respectée, il en va de sa responsabilité et ce, même si celle-ci sera atténuée en fonction de l’expérience et de l’âge du cavalier victime d’une mauvaise chute et ne portant délibérément pas de protection.

Enfin, si le port de la bombe est le plus souvent générateur de contentieux de la responsabilité, il est aussi source de contentieux prud’homal. Il est intéressant de relever que la Cour d’appel de Rennes (arrêt du 24 mai 2007) a validé le licenciement pour faute grave d’un moniteur à qui l’on reprochait de ne pas porter de bombe lorsqu’il montait à cheval et d’avoir laissé certains clients du club faire de même, alors que le port de la bombe était imposé par le règlement intérieur sans aucune dérogation et que cette consigne était affichée.

Au final, la perspective d’un engagement de la responsabilité doit mener à s’assurer de l’existence et du respect des règles de sécurité et ne surtout pas verser dans ce que dénonçait Jean de La Fontaine dans sa fable, Le Cerf se voyant dans l’eau : « Nous faisons cas du beau, nous méprisons l’utile ».

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