Ken Rehill, le trader devenu étalonnier
« Je suis Anglais avec une souche irlandaise. Je suis arrivé en Normandie il y a une dizaine d’années et depuis trois ans, avec ma femme, nous louons une partie du haras de Rodez. Je voulais m’installer au haras du Pin mais ça n’a pas été possible. J’ai commencé ma carrière comme trader sur la bourse des taux de change à Londres, puis j’ai ouvert une boîte de marketing et de sponsoring en Angleterre. J’ai tout arrêté pour acheter ma ferme en Normandie, à côté d’Alençon et j’ai décidé, avec mon ex-femme, de faire de l’élevage de chevaux de sport. Quand j’ai voulu acheter un étalon, elle a dit non. Alors nous nous sommes séparés. Je crois que tous les atouts que j’ai acquis dans le monde du marketing et du sponsoring, mais aussi sur la bourse de taux de change, ça nous aide un peu dans ce business ».
Qu’est-ce qui vous a amené à Rodez ?
« On a décidé de partir de Normandie parce qu’on était en train de construire une petite famille. Notre petit garçon, Scott, a presque 2 ans maintenant. On était candidats à la reprise du haras du Pin il y a 3 ans mais ça n’a pas marché. C’est une autre option qui a été retenue. Nous avons fait acte de candidature pour le haras de Rodez parce qu’on était un peu tentés par le climat qui est meilleur que celui de la Normandie et voilà , on a gagné. Notre bébé est arrivé quelques mois plus tard. On est à Rodez pour l’instant. On ne sait pas si cela durera. Le Conseil départemental voudrait qu’on reste parce qu’on est des acteurs économiques dans la ville, mais peut-être allons-nous descendre vers Toulouse où on va acheter une ferme. Il y a du bon rugby dans cette région ! A Rodez, on a pris presque la moitié du haras. Il n’y a quasiment plus que nous. On a une grande écurie pour nos jeunes étalons, une écurie de valorisation pour mes propres chevaux et une autre écurie pour les étalons qui sont en production. Nous avons aussi le centre technique, quelques paddocks et un appartement ».
Combien d’étalons sur place ?
« Si on compte Kannan, on en a 19, physiquement. C’est moi qui avais acheté Kannan à Michel Hécart et c’est moi qui en ai vendu une part au GFE ».
Comment choisissez-vous vos étalons ?
« Je cherche des étalons avec de bonnes performances, donc naturellement âgés et avec de très belles lignées maternelles. Il faut avoir les belles souches comme Triomphe de Muze, Quintero, comme Baïkal de Talma, Et avec ça, avec un père reconnu, avec de très bonnes performances. Un étalon qui est seulement très beau et qui n’a pas fait grand’chose a peu de chance de travailler. Le marché en France est très dur maintenant, les éleveurs ne veulent utiliser que les valeurs sûres, c’est de plus en plus difficile pour les jeunes ».
Cette année, vous êtes le distributeur exclusif de Casall ?
« Oui, avec nous ils ont conclu un partenariat très honnête. Ils ont eu du mal à trouver un bon partenaire. Nous allons travailler avec eux sur trois ou quatre saisons. Malheureusement, on n’a qu’une trentaine de cartes de Casall cette année. Les éleveurs du Holstein ont empêché le stud-book de nous en vendre plus. Ils veulent garder la semence pour que tout le monde vienne chez eux pour acheter les produits de Casall. Ce fut la même histoire avec Flipper et Mylord Carthago. Mais ça ne marche pas. Et c’est aussi ces mêmes éleveurs qui voudraient acheter les nouveaux étalons de France et de Belgique. Pour cela il faut de l’argent. En vendant des cartes de Casall, le stud-book pourra s’offrir quelques étalons étrangers, c’est logique ».
Combien de juments servies par vos étalons l’année dernière ?
« Si on compte Kannan et tous les autres étalons, on a fait 2 800 saillies ».
Vous avez senti que le marché allait mieux cette année ?
« C’est difficile à dire pour nous. On a ouvert récemment un centre en Irlande et c’est en train d’exploser. On est donc naturellement très optimistes. En France, oui, on a déjà bien travaillé cette année avec presque une centaine de saillies vendues. Mais ça c’est peut-être l’effet Casall. Il convient donc de relativiser. Pour nous, le but c’est de vendre en France entre 300 et 400 saillies cette année ».
Qu’est-ce qui vous a fait passer du métier de trader au métier d’étalonnier ?
« Le cheval, c’est ma passion. J’étais maître d’équipage dans une chasse à cour en Angleterre, j’ai fait quelques concours en CSO, un peu de cross aussi mais surtout du rugby. J’ai pratiqué à haut niveau. Si je monte à cheval maintenant, c’est uniquement pour le plaisir. C’est ma femme qui monte les chevaux, pour nous c’est elle qui est la cavalière professionnelle. J’adore les étalons, donc je suis passé très facilement du métier de trader à celui d’étalonnier. Les principes du business sont les mêmes, les marchés sont un peu différents mais les principes sont les mêmes. »
E. R.
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