L’Asia Horse Week : un pont entre deux cultures


Les sports équestres en Asie



Li Yanyang, joueur de polo passionné et surtout fondateur du magazine chinois de référence, Horsemanship, a présenté quelques chiffres clés concernant l’équitation en Chine et les défis qu’ils représentent. On a notamment appris qu’il existait actuellement 1 802 clubs hippiques en Chine essentiellement concentrés dans le nord et le sud-est. La majorité des chevaux utilisés dans ces clubs sont des pur-sang, même si 18% de ces chevaux sont importés des stud-books européens, les importations sont cependant en baisse depuis trois ans.

La proportion de femmes pratiquant l’équitation est dominante également en Chine (65,5 %), un chiffre toutefois inférieur à la moyenne européenne qui dépasse les 80%. C’est l’équitation classique qui est pratiquée en majorité en Chine (à 91 % contre 9 % d’équitation western).

Le Professeur Hao Zhang de l’Université d’Agriculture de Mongolie intérieure a apporté une touche culturelle, rappelant que cela fait plus de trois millénaires que le cheval accompagne la vie quotidienne des Chinois : « Plus de 1 000 signes expriment le mot «Ma», cheval en Chinois. Plus de 100 millions de Chinois sont du signe du Cheval en astrologie chinoise et 15 millions portent le prénom de Ma ».



Le développement du sport en Asie



Après une présentation de la fabrication des selles Hermès, le développement des grandes compétitions en Asie fut évoqué. Michael Lee, président du Hong Kong Jockey Club, posait le décor asiatique : 34 fédérations nationales dont 18 organisant des compétitions FEI, 4 572 athlètes face à 38 208 pour le reste du monde, une croissance de 71% du cheptel équin en 9 ans qui accompagnait logiquement une augmentation de 79 % du nombre des cavaliers. L’Asie est indéniablement une région en plein boom équestre malgré quelques freins : peu d’athlètes et d’officiels asiatiques sont invités sur les compétitions hors d’Asie, un manque d’expertise dans certaines disciplines et peu de moyens.



Les JO de Tokyo en 2020



Dans un an auront lieu, toujours en Asie, les Jeux olympiques de Tokyo 2020 dont le Dr Yasuhiko Haruta, directeur équestre, a dévoilé les grands traits logistiques. Le staff encadrant cette partie équestre sera composée de 416 personnes, le chantier du Parc équestre de Bajikoen pourrait recevoir les tests préolympiques en juillet prochain, les épreuves olympiques débuteront le 25 juillet 2020 avec le dressage et se termineront le 8 août avec l’épreuve de saut d’obstacles par équipe (après l’individuelle donc, qui aura lieu le 5 août) et le cross du complet se tiendra sur une île à 25 kilomètres et une heure du Parc équestre olympique.



Sport et élevage



Depuis une bonne vingtaine d’années, sports et élevage sont intimement mêlés. L’un ne va pas plus sans l’autre : « Il y a 30-40 ans », rappelait Jos Lansink, « quand une jument ne performait pas bien en concours, on la retirait et on la faisait saillir par le premier étalon venu. Aujourd’hui, c’est le contraire : le père et la mère doivent avoir fait leurs preuves en compétition, c’est complètement entré dans les mœurs ». Jusqu’à Oman, où, comme le soulignait Hamood Altooqi, directeur technique de la cavalerie royale, qui développe l’élevage sur les sites de Muscat et de Salahat, les croisements sont uniquement basés sur la performance. Qu’il s’agisse de chevaux arabes pour l’endurance ou de chevaux de sport pour lesquels : « nous collaborons avec VDL en Hollande, le Groupe France Élevage, Béligneux le Haras et les ventes PSI en Allemagne. L’objectif est d’obtenir rapidement la reconnaissance de la World Breeding Federation for Sport Horses et de présenter des jeunes chevaux omanais au Championnat du monde de Zangersheide à l’horizon 2020 ».



Si ce principe d’un élevage s’appuyant sur la performance est désormais acquis, il y a d’autres pratiques qui, selon le Champion du monde individuel de 2006, Jos Lansink, doivent disparaître des habitudes : « Aujourd’hui encore, on en fait trop avec les jeunes chevaux. Les cavaliers sont sous la pression des propriétaires et on veut aller trop vite. Plus que le cavalier, c’est l’homme de cheval qui est derrière qui fait le cheval. J’ai l’habitude de donner un break de trois mois à mes jeunes chevaux de 4 à 6 ans et parfois même à des 7 ans, un âge où ils peuvent encore grandir. Il est crucial de bien savoir gérer le programme de ses chevaux. Quand j’ai été champion du monde avec Cumano, le cheval avait cinq jours de compétition dans les pattes, mais deux autres journées supplémentaires ne l’auraient pas plus fatigué que ça ».

En Allemagne, où la Fédération régit à la fois le sport et l’élevage (25 000 naissances de chevaux de sport chaque année), les jeunes chevaux ne sont pas mis en danger : « Les 4 ans n’ont presque pas d’épreuves et pas de Championnat national », explique Soenke Lauterbach, secrétaire général de cette fédération. « Et les 5 ou 6 ans ne font aucune épreuve au chronomètre, mais des parcours jugés sur le style ». Dans ce pays, Paul Schockemöhle est une forte personnalité de l’élevage, du commerce et du sport. Une filière qu’il maîtrise de A à Z à partir de son haras de Lewitz, une ancienne ferme collective d’Allemagne de l’Est, qui abrite quelque 4 500 chevaux : du foal (il en naît 1 200 chaque année) au jeune cheval de sport qui est valorisé sur place avant d’être envoyé dans les circuits commerciaux (notamment via sa vente PSI) et sportifs. Deux cent cinquante employés travaillent pour son compte, dont quarante-cinq cavaliers, vingt vétérinaires et vingt maréchaux ferrants, des entraîneurs etc. Mais c’est lui qui suit personnellement chacun de ses produits à travers de grandes fiches jaunes qu’il remplit lui-même à la main.

L’étalonnier, vétérinaire, éleveur spécialiste du transfert d’embryon et marchand de chevaux belge Joris de Brabander a révélé les clés du succès de son haras qui a produit de grands performers internationaux tels Mylord Carthago (vice-champion du monde) et Vagabond de la Pomme (deuxième de la finale de Coupe du monde). Un principe qu’il simplifie lui même en ces mots : « Le bon donnera du bon, le mauvais donnera du mauvais ».



Les Français Bérengère Lacroix (directrice du Stud-book Selle français, 6 300 naissances annuelles) et Arnaud Evain (Groupe France Élevage), ont présenté des outils statistiques et logiciels permettant aux éleveurs de déterminer leurs croisements de façon plus « scientifique ».



La science conclut ces huitième et neuvième sessions consacrées à l’élevage avec l’intervention du Professeur italien Cesare Galli, un pionnier avec son laboratoire Avantea, en matière de transfert d’embryons, de leur congélation et même en matière de clonage, réprouvé plus tôt par la Fédération allemande, mais presque banalisé dans le milieu du polo argentin : « Il ne s’agit que de banque cellulaire », modulait le Professeur. « Quand vous perdez votre cheval, l’assurance vous donne de l’argent, mais ne vous redonne pas votre cheval. Avec le clonage, moi, je vous le rends » !



L’embryon est un concept qui est plus facilement rentré dans les mœurs, comme l’a prouvé l’excellent résultat de la première édition de The Auction by ARQANA, première vente internationale de chevaux à Hong Kong, où étaient adjugés seize embryons issus de grands performers pour un chiffre d’affaires total de 416 000 €, soit une moyenne record de 26 000 € par embryon.
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