Le cheval au travail : un outil de développement durable en Auvergne-Rhône-Alpes
Le cheval cantonnier, aussi appelé cheval territorial ou cheval utilitaire, est un cheval – généralement d'une race de trait – utilisé par une collectivité territoriale pour l'assister dans ses tâches quotidiennes en remplacement ou en complément de véhicules motorisés. Il peut être présent au quotidien ou de façon ponctuelle, lors d'animations ou pendant la saison estivale. Suite à une enquête réalisée en 2012 par l'ifce, il apparaît que 83 % des collectivités territoriales auvergnates présentent de forts à prioris à l'encontre du cheval en ville, avant tout pensant notamment que les équidés n'ont pas leur place en milieu urbain et que le recourt au cheval coûte forcément cher. Les propos de la journée vont s'attacher à démontrer que ces aprioris sont infondés. L'intérêt du cheval cantonnier n'est en
effet pas seulement écologique mais peut être aussi économique et social suivant le projet.
C'est ce qu'ont pu démontrer les nombreux témoignages variés de cette conférence qui a regroupé plus de 60 participants.
Le public a pu ainsi découvrir les deux modes de gestion possible avec l'utilisation du cheval : - la délégation de l'activité à un prestataire de service qui constitue un mode plus rassurant pour la gestion quotidienne de l'animal ; - la régie directe pour investir dans l'acquisition d'un cheval et de son matériel ainsi que dans la formation de son personnel. Pour réussir un projet, il est apparu fondamental, au travers des exemples de la matinée, de réaliser une étude de faisabilité, de s'entourer de personnes compétentes et l'évaluer sur la durée.
Témoignages
Pascal Goubier, responsable des parcs et jardins de Parilly et Lacroix-Laval à la Métropole du Grand Lyon a introduit cette journée en expliquant les compétences des métropoles.
Olivier Croze, directeur de la délégation territoriale Auvergne-Rhône-Alpes de l'ifce, a rappelé l'utilité du cheval au travail dans les démarches de développement durable entreprises par les collectivités : « le cheval s’intègre dans une démarche permettant aux territoires d'accomplir leurs travaux d’entretien, de nettoyage, de production, de transport grâce à l'énergie fournie par les chevaux et sans pollution. Ces techniques permettent par exemple de débarder en forêt ou dans les parcs, notamment sur les sols forestiers humides, peu portants, sans dégâts pour la faune et la flore, tout en préservant les jeunes pousses et en évitant les frais de remise en état du sol et des abords. En ville, le cheval ramasse les poubelles, entretient les espaces verts et assure le ramassage scolaire sans pollution olfactive ou sonore, tout en jouant le rôle de vecteur social. Sur les terres agricoles, il permet aux maraîchers de travailler sous serre sans retombée de gaz d'échappement sur les cultures. Enfin, dans les espaces naturels protégés, il assure les déplacements et le transport de matériel en respectant l'équilibre biologique des territoires ». La dimension économique n'est pas exclue, la démonstration qu'un projet de traction animale peut être développé sans surcoût, voire même en réalisant des économies par rapport au moteur étant apportée au travers de différents exemples.
Juliette Révillion, chargée de mission au sein du Conseil de la filière cheval Auvergne-Rhône-Alpes a présenté la fusion des conseils Auvergne et Rhône-Alpes ainsi que les financements en cours via le contrat régional d'objectif de filière (CROF) qui se décline en différentes actions dont l'aide à la promotion du cheval utilitaire. Philippe Escalle, Christian Fontrobert et Julie Cessieux, représentant le Réseau Rhône-Alpes de Traction Animale, ont mis en avant les activités de l'association, manifestations à venir notamment, ainsi que son élargissement aux professionnels auvergnats, nouvelle grande région oblige. Bruno Dehan, président du syndicat des éleveurs de chevaux de trait du Rhône et représentant de l'ASECRA, a expliqué l'intérêt de ce colloque pour développer la filière du cheval de trait.
Marc Bénière, responsable des espaces naturels des parcs de Parilly et Lacroix-Laval à la Métropole du Grand Lyon, a expliqué les travaux réalisés avec le cheval dans le Domaine de Lacroix-Laval. Il a souligné l'importance de disposer des compétences nécessaires au sein de l'équipe d'où le recrutement d'une personne qualifiée pour assurer le débardage au cheval et mener en toute sécurité dans le parc. En effet, le Domaine de Lacroix-Laval a investi dans l'achat d'un cheval et de son matériel qui est hébergé sur place. M. Bénière a expliqué ce choix de travailler en régie toute en démontrant les avantages et inconvénients d'une telle démarche. Des formations régulières sont prévues non seulement pour les meneurs, mais aussi pour le cheval qui fait aujourd'hui partie intégrante de l'équipe ! Marc Bénière a mis en avant l'appui trouvé auprès du syndicat des éleveurs de chevaux de trait du Rhône.
Marie-Alexandra Christel, responsable de la section équestre à la Police municipale de la ville de Lyon, a présenté les différentes missions confiées aux membres de cette section. De par sa morphologie imposante, le cheval permet d’intervenir efficacement et de manière dissuasive dans différentes situations tendues : en cas de rixe sur la voie publique, le cheval permet d’extraire rapidement la victime ou l’auteur afin de le mettre en lieu sûr, au-delà des missions coercitives. Il est cependant majoritairement utilisé pour des actions préventives, de proximité et d’échange avec la population. Mme Christel a souligné l'importance de sélectionner les montures sur leur comportement, à l'aide de tests objectifs, et de mobiliser des policiers biens formés. C'est pourquoi les agents de la section sont issus soit de la Garde Républicaine de la Gendarmerie Nationale, soit de l'Ecole de Gardes à Cheval de Soissons. L'accent est là aussi mis sur la formation continue des équipes, chevaux, comme cavaliers, qui partent en stage régulièrement. D'un point de vu économique, il est rappelé que l'investissement pour les 3 chevaux équivaut à peine à celui nécessaire à l'achat d'une seule voiture équipée : l'avantage au cheval est également démontré en terme de dépenses de fonctionnement. La brigade équestre est très plébiscitée et utilisée non seulement pour des missions quotidiennes, mais aussi sur de nombreuses missions spécifique comme à l'occasion des manifestations ; elle s'avère très complémentaire aux équipes véhiculées. Enfin, le bien être équin est pris en compte avec l'intervention régulière des professionnels de santé. Tout est donc mis en place pour que cette section équestre s'inscrive efficacement dans la durée.
Laurent Vialette, responsable des espaces verts de la ville d'Aubière, accompagné de son prestataire Attel'Auvergne (représenté par Rémi Ducrocq et Raphaël Couderc) a présenté les diverses activités dans l'entretien des espaces verts de la commune. En effet, une démarche écologique a été mise en place pour réduire les pesticides avec l'acquisition d'un machine de désherbage à eau chaude. C'est donc un cheval qui tire cette remorque et qui coûte moins cher que certains engins motorisés avec moins d'agents mobilisés. Cette expérience a fait ses preuves (techniquement et économiquement) et favorise la convivialité et l'échange à travers le contact avec l'animal. L'accent est mis là aussi sur la compétence des meneurs, titulaires du Certificat de Spécialisation « Utilisateur de chevaux attelé ». Ce certificat, non obligatoire à ce jour, reste néanmoins un gage de qualité. Bien que ne remplaçant pas l'expérience acquise auprès de professionnels au fil des années, il permet d'apprendre à mener un cheval bien dressé en sécurité.
Un autre domaine d'intervention du cheval au travail a été présenté par Antoine Dépierre, propriétaire du domaine viticole de Mayoussier, accompagné par son prestataire spécialisé : Philippe Escalle (entreprise « Traits à propos »). Le travail du cheval dans les vignes évite le recours aux herbicides et le tassement du sol, permettant ainsi le maintien d'une vie microbienne sous terre probablement plus riche. L'implantation des nouvelles vignes a été réfléchie pour son entretien au cheval. Elles sont en effet plantées en échalas, à une densité adaptée au cheval avec des espacements d'1,30 m sur le rang comme entre les rangs. Cette technique facilite l'entretien entre les rangs mais aussi sur les rangs. Pouvoir évoluer perpendiculairement à la pente limite ainsi l'érosion des sols. La densité de plantation ainsi obtenue,
supérieure à celle rencontrée en viticulture conventionnelle, ne permet pas pour autant un gain en productivité à l'hectare. Le recours au cheval augmente même sur cette exploitation les coûts d'entretien. Le gain économique à la production n'est pas l'objectif recherché par ce vigneron qui privilégie principalement la démarche écologique dans son activité. Il estime d'ailleurs que son approche est à l'origine d'une réelle réflexion de la part de certains des ses voisins agriculteurs qui s'engagent à leur tour dans une meilleure protection de l'environnement. Pour revenir au volet économique, même si le coût de production et donc de vente des bouteilles s'avère plus élevé, l'engagement d'Antoine Dépierre dans ce mode de production constitue pour lui un réel atout auprès de sa clientèle et facilite la commercialisation de ses produits.
Le dernier témoignage de la matinée concernait la brigade de gardes à cheval du Grand Parc de Miribel-Jonage. Ivane Fouron, cavalière de cette brigade, en a présenté les intérêts avec l'appui de Murielle Champion, responsable de l'atelier. Ce mode de locomotion écologique permet en effet d'évoluer sur les sentiers réservés aux VTT, de traverser les ruisseaux, d'évoluer sur tout le parc, même en cas de crue, d'accroître la réceptivité du public et l'autorité que peuvent dégager les gardes. L'importance du choix des chevaux et des cavaliers est une nouvelle fois mise en avant. . En complémentarité avec les gardes équipés d'engins motorisés, cette brigade, créée en 2000, a fait toutes ses preuves pour assurer la surveillance de ce parc de 2200 ha qui accueille 4 millions de visiteurs chaque année.
Toutes ces présentations ont permis au public de comprendre comment germent et aboutissent les projets incluant la traction animale. Olivier Croze a conclu la matinée en présentant la station expérimentale ifce du cheval au travail, basée à Aurillac, dont l'objectif est d'établir différentes références susceptibles de mieux qualifier tous les avantages de la traction équine et préciser les contextes dans lesquels les chevaux et autres ânes et mulets peuvent concurrencer efficacement le moteur.
Des démonstrations techniques
● Le matériel en milieu urbain (voir les images) : - calèche de transport pouvant transporter jusqu'à 8 personnes sous couvert d'une bâche pour les intempéries appartenant à Michel Mellet et menée par ce dernier avec ses deux comtoises Rosana et Bichette. - calèche de transport appartenant à l'ifce et pouvant transporter jusqu'à 16 personnes ou 3 fauteuils roulants de taille standard, présentée par Henri Josserand avec ses juments Uska, comtoise et Tina, percheronne. Il faut noter qu'un système d'accroche de panneau publicitaire (ici Haras National d'Aurillac) peut se fixer sur de nombreux engins. - benne hippomobile ou remorque pour ramasser les déchets appartenant au Domaine de Lacroix- Laval et présenté par Lionel et son cheval comtois Val d'Héry. - benne hippomobile ou chariot pouvant se basculer sur le côté latéral, appartenant à l'ifce et présentée par Emmanuelle Picq avec son cheval comtois Artiste, derrière un avant train 4 roues de l'ifce. - une tonne à eau pour l'arrosage des massifs de fleurs appartenant à Henri Josserand attelée derrière l'avant train 4 roues, présentée par Emmanuelle et Artiste. - une tondeuse attelée derrière un avant-train 2 roues appartenant à l'ifce, présenté par Stéphane Denieault et son cheval Urion.
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