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Le cheval et son bien-être sous la loupe de l'IDE

  • Son bien-être: un souci permanent. Andy Booth à l'oeuvre
    Son bien-être: un souci permanent. Andy Booth à l'oeuvre
Le congrès de l’Institut du droit équin s’est tenu le 04 novembre 2016 au siège de la Fédération française d’équitation à Lamotte Beuvron. Il a réuni plus de 140 participants sur la question du cheval et de son bien-être. Parmi les intervenants, Andy Booth a notamment proposé une démonstration d’éthologie pour conclure sur la définition du bien-être du cheval.

La société, tant au niveau européen qu’international, se préoccupe de plus en plus du bien-être de ses animaux et notamment de celui de ses chevaux. Les professionnels du cheval prennent également conscience de l’importance de cette notion de bien-être et modifient leurs pratiques empiriques afin de satisfaire leurs clients, propriétaires d’équidés. La modification récente du code civil (article 515-14) reconnaissant à l’animal la qualité d’être sensible, la modification du code de déontologie vétérinaire et les jurisprudences à venir sont la traduction de cette évolution sociétale. 

Il essentiel de rappeler que le bien-être c’est tout d’abord la bien-traitance qui se définit comme l’absence de maltraitance intentionnelle ou par négligence. L’absence de maltraitance est une condition primordiale nécessaire mais non suffisante du bien-être des équidés (minimum requis). Les associations de protection animale et les vétérinaires assurent un rôle sentinelle dans ce domaine.

-   L’article L 214-1  du code rural rappelle que « Tout animal, étant un être sensible, doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ».

-   L’article L214-3 du code rural indique aussi qu’« Il est interdit d'exercer des mauvais traitements envers les animaux domestiques ainsi qu'envers les animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité… ».

-   L’article L203-6 du code rural met à la charge des vétérinaires une obligation de déclaration en cas de danger pour les personnes ou les animaux.

-   Les différents articles du code pénal (521-1, 653-1, 654-1, 655-1) nous rappellent que sont pénalement répréhensibles les sévices graves et les actes de cruauté, les atteintes involontaires, les mauvais traitements et les atteintes volontaires sur les animaux.

Le bien-être animal est défini comme une priorité au sein de l’union européenne, deux programmes d’action en sont d’ailleurs la traduction concrète :

- En 1979, le Farm Animal Welfare Council (FAWC), un organisme consultatif indépendant de la Commission européenne, a établi que les animaux dans les élevages ont droit aux 5 « libertés » suivantes : Ne pas souffrir de faim et de soif (accès à de l’eau potable et à une nourriture préservant la pleine santé et la pleine vigueur des animaux), ne pas souffrir de contrainte physique (environnement approprié comportant des abris et une aire de repos confortable), être indemnes de douleurs, de blessures et de maladies (prévention ou diagnostic et traitement rapides), avoir la liberté d’exprimer des comportements normaux (espaces et équipements adéquats, contact avec des animaux de la même espèce) et être protégés de la peur et de la détresse (conditions d’élevage et traitements évitant les troubles comportementaux).

- Le programme européen sur le bien-être animal Welfare quality a décliné plus précisément cette notion au travers de 12 critères : absence de faim prolongée, absence de soif prolongée, confort du couchage, confort thermique, possibilité de mouvement, absence de blessures, absence de maladies,  absences de douleurs induites par les pratiques, expression du comportement social, expression des autres comportements, bonne relation homme-animal et état émotionnel positif.

En France les socio professionnels s’engagent  aussi pour le bien-être et ont signés, en mars 2016, la Charte pour le bien-être équin qui s’applique à tous types d’équidés, d’élevage, de loisir, de sport, de travail, de trait et de course, et de tous âges. Cette charte établit 8 principes fondamentaux : relation homme-animal, apports nutritionnels adaptés, prévention des risques de lieu de vie, expression des comportements, contacts sociaux, maitrise des risques de santé, douleur, fin de vie.

En pratique, il s'agit de fournir aux animaux du fourrage (herbe ou foin) en quantité suffisante, de leur offrir des possibilités d'exercice en fonction de leur besoins, de leur permettre d'avoir des relations avec leurs congénères et de construire une bonne relation avec l'homme.

Ces conditions réunies constituent la bien-traitance, et le bien-être correspond à la perception de ces conditions par l'animal, à travers sa réactivité émotionnelle. Cette perception peut être modulée selon l'âge de l'animal, son état physiologique et son état de santé, son tempérament, ses capacités d'adaptation ; le stress influence cette perception de façon négative. L'état de bien-être peut être apprécié par des indicateurs comportementaux, physiologiques, de production et de santé.

Le jeune âge est une période sensible pour les chevaux en matière de bien-être, avec 3 étapes qui peuvent avoir des conséquences plus ou moins positives sur l'avenir du cheval : la naissance, le sevrage et le débourrage.

La mise en place de la relation homme-cheval dès la naissance est essentielle pour préparer le cheval à ses futurs apprentissages. Le moment du sevrage est une période particulièrement propice aux manipulations du poulain, probablement du fait du stress psychologique provoqué par la séparation d'avec la mère. A cette période, quelques minutes de manipulation par jour, pendant 12 jours, permettent d'observer des effets bénéfiques jusqu'à au moins 18 mois (Lansade et al, 2004).

Lors des apprentissages il est nécessaire de prendre en compte, quel que soit l'âge du cheval :

- ses capacités physiques et mentales (travail et matériels utilisés),

- ses capacités sensorielles (vue, ouïe, toucher),

- ses capacités de perception, d'analyse et de mémorisation (mémoire, attention),

- sa réactivité émotionnelle (peur, prévisibilité et contrôle des événements).

 

Les chevaux ont donc besoin d'exercice quotidien. La mise en liberté, en plus du travail, est bénéfique, à la fois sur la santé du cheval, son comportement et la sécurité du cavalier. En effet, les poulains qui sortent quotidiennement en extérieur ont moins de risques d'être atteints d'affections articulaires, comme l'ostéochondrose (Lepeule 2009).

 

Les chevaux sont des animaux sociaux. Les poulains élevés en groupe avec des adultes construisent progressivement leur répertoire comportemental. Ils apprennent les lois de la hiérarchie et peuvent exprimer leurs besoins comportementaux, comme le toilettage mutuel. Le jeu participerait au développement de l'organisme, notamment à celui des compétences motrices, sociales et cognitives et contribuerait par exemple, à la formation du réseau social, à l'acquisition du comportement anti-prédateurs... (Vandierendonck 2012).

La détention des chevaux en groupe limite le stress et les stéréotypies, permet des apprentissages plus rapides, plus faciles et donc une meilleure sécurité pour l'homme. Ceci a notamment été démontré pour le débourrage de poulains (Rivera 2002).

 

Le respect du bien-être du poulain, dès son jeune âge, contribue à  construire un cheval en parfaite santé mentale et physique et ayant une bonne relation avec l'homme, prêt à appréhender sa future carrière, de sport, de course ou de loisirs.

 

En matière de sport, les règles sont principalement compilées dans le code du sport et les règles spécifiques aux sports équestres (hors courses hippiques) sont, quant à elles, définies par les instances sportives en charge de l’équitation.

L’article L241-1 du code du sport pose le principe de lutte contre le dopage des animaux et indique que sont notamment interdits le dopage sanguin, la névrectomie, l’usage d’appareillage infligeant des stimuli électriques ou thermiques et le barrage. Les articles A322-116 et suivants du code du sport concernent les établissements ouverts au public pour l’utilisation des équidés et visent les conditions d’aération et d’aménagement des écuries, l’état du matériel utilisé pour les équidés, ainsi que ses « conditions de travail ». Les clôtures en barbelés sont notamment interdites par ces dispositions.

Le règlement général des compétitions de la Fédération française d’équitation dispose que «Toute brutalité, cruauté et mauvais traitement à l’égard des poneys / chevaux sont proscrits.».

Le règlement de la Fédération Internationale équestre prévoit dans son article 142 des sanctions en cas d’action ou d’omission à l’origine d’une douleur ou d’un inconfort inutile (ex : usage excessif des aides artificielles telles que la cravache ou les éperons, laisser un cheval sans nourriture ou eau adéquate, hypersensibiliser un cheval, barrer un cheval, etc…)

Dans le domaine des courses hippiques le bien-être du cheval apparait aussi en filigrane de nombreuses mesures prises par les instances qui ont en charge de régir les courses au trot et au galop.

Par exemple l’article 85 du code des courses au galop indique « qu’un cheval peut être interdit d’accès aux terrains d’entraînement, aux hippodromes et aux établissements appartenant aux sociétés de courses ou peut en être exclu, si son état sanitaire et ses vaccinations ne sont pas conformes. Il indique également qu’aucun cheval ne peut participer à une course publique s’il est muni d’un dispositif ou d’un procédé destiné à modifier le passage ou la composition de l’air dans la trachée ou les voies nasales. »

L’article 171 code des courses au  galop indique que : « Seuls les modèles de cravaches approuvés par les commissaires de France Galop et publiés au Bulletin officiel des courses au galop peuvent être utilisés à l’occasion d’une course publique. La taille, la composition des cravaches est règlementée de même que son usage. Interdiction au jockey de donner plus de huit coups de cravache à son cheval durant une course de galop et sept pour les courses de trot. Interdiction de frapper sur les flancs de lever le bras au- dessus de l’épaule. »

Au trot l’article 73 précise que: « …  dans les courses au trot attelé, ils doivent tenir les guides de leurs deux mains et n’utiliser la cravache que dans l’axe du cheval, sans mouvement en arrière ou latéral. Dans les courses au trot monté, les jockeys doivent tenir leur cravache orientée vers le bas et en faire un usage modéré et limité pour soutenir l’effort de leur cheval. » Cet article précise également que l’utilisation de rênes munies d’accessoires métalliques susceptibles de blesser un cheval est interdite. »

Les contrôles de l’administration de substances prohibées ne s’arrêtent pas à la compétition : les codes des courses règlementent l’administration de substances à compter de la déclaration de partant du cheval et d’autres s’appliquent de manière générale dès que le cheval est à l’entraînement ou même à l’élevage.

Les textes précités des codes des courses permettent la possibilité de diligenter des enquêtes d’office chez les entraîneurs. Elles sont systématiques et sans avertissement préalable lorsqu’un cheval de l’entraîneur est prélevé positif à l’issue d’une course.

Tous les chevaux de l’écurie sont alors prélevés et l’enquêteur vérifie que le registre d’ordonnances est bien tenue, qu’aucun traitement n’est administré aux chevaux, comment l’écurie est tenue etc….

Au-delà de la carrière sportive ou de courses du cheval, l’importance du bien être prend également tout son sens lorsqu’il s’agit de retraite ou de fin de vie des chevaux.

Plusieurs choix s’offrent au propriétaire au moment de la fin de carrière ou de la fin de vie de l’animal : la retraite, l’euthanasie, l’équarrissage, l’incinération, l’abattage, l’enfouissement et l’abandon. Les deux derniers choix, malheureusement encore pratiqués, sont bien entendu interdits.

La mise à la retraite est particulièrement adaptée à la fin de carrière du cheval. Elle idéale pour le bien être du cheval lorsque son propriétaire peut en assumer le coût (pension, vétérinaire, soins divers…) et qu’il est disponible pour s’occuper de son cheval.

L’euthanasie peut être pratiquée en cas de maladie grave ou lorsque le cheval s’est accidenté. Cette pratique vétérinaire pose la question du bien être suivant les circonstances dans lesquelles elle va être demandée par la propriétaire du cheval.

L’équarrissage ou l’incinération sont les moyens à disposition du propriétaire lorsque son cheval meurt de mort naturelle, l’équarrissage présent sur tout le territoire est facile d’accès bien que le coût et le délai d’attente soit critiquable. L’incinération, très onéreuse et limitée puisque présente uniquement dans une région, est un choix intéressant puisque les services proposés sont de grande qualité et que la prise en charge est rapide.

L’enfouissement est interdit pour des raisons sanitaires évidentes. L’article L226-1 du code rural stipule que « …Les propriétaires ou détenteurs des cadavres d'animaux … doivent les mettre à la disposition de la personne chargée de l'exécution du service public de l'équarrissage. ».

L’abandon d’un animal (qui concerne beaucoup de chevaux en fin de carrière ou en fin de vie), rappelons-le,  est quant à lui puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende sur le fondement de l’article L521-1 du code pénal.

Claire Bobin

22/12/2016

Actualités régionales