Les évolutions sociétales, scientifiques et économiques de la filière en question
ConférenceL'académie d'agriculture de France accueillait dernièrement la séance « cheval et modernité » à Paris. Trois intervenants ont pris la parole : Jean-Pierre Digard ethnologue, directeur de recherche au CNRS, Eric Palmer, pdg de Cryozootech, et Philippe Augier, maire de Deauville et fondateur du pôle compétitivité « cheval ».
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Henry Blanc, ancien directeur des Haras, a introduit la discussion en évoquant le rapport de prospective équine réalisé par l'IFCE et l'INRA. Alors que les achats de chevaux (et surtout les importations) ont augmenté (10 000 importations aujourd'hui contre 4 000 il y a 10 ans, ndlr).
Les sports équestres et la filière cheval doivent faire face à plusieurs problèmes : le taux de TVA, la fin du monopole du PMU, les risques sanitaires et le professionnalisme insuffisant de certains acteurs.
Jean-Pierre Digard met l'accent sur les évolutions et des représentations du cheval en France depuis 1960. Des nouvelles disciplines équestres sont apparues (équitation de loisirs, ski joering, pony-games, doma vaquera) avec un credo : le plaisir et l'amour du cheval. Ce que ce chercheur de renom dénonce, ce sont « l'inflexion du statut culturel du cheval dans la société française » et l'équitation « soit-disant » éthologique. Jean-Pierre Digard cite en exemple « le journal Le Monde [qui] accueille dans ses pages l'association Brigitte Bardot et une publicité sur hippophagie ». Pour lui, les institutions équestres et hippiques ont commis des erreurs : flatter la clientèle féminine jeune et prévenir les critiques « en interdisant la caudectomie, le marquage au fer et en limitant l'utilisation de la cravache en compétition ». Si le nombre de centres équestres se développe, le niveau des cavaliers est faible, précise Jean-Pierre Digard. Les risques d'une telle politique sont l'abandon du patrimoine équin au profit d'une culture de consommation du loisir équestre, et le fossé qui se creuse entre professionnels des sports équestres et équitation de travail et le public, adepte notamment de ces nouvelles disciplines.
Eric Palmer pdg de Cryozootech prend ensuite la parole. Il a rappelé dans un premier temps les secteurs de recherches et d'innovations depuis 40 ans chez le cheval. Des innovations comme l'échographie, l'insémination artificielle, le transfert d'embryons et le clonage ont été introduites dans le monde de l'élevage. « Le financement de la reproduction est en nette diminution : de 30% en 1994, il représente moins de 15% du budget des Haras ». La génétique ensuite. Eric Palmer a parlé des BLUPS. Ce dernier souligne l'importance de l'invention du SIRE, « ordinateur central de toutes les informations sur les chevaux ». Même si l'alimentation des équidés a fait l'objet de nombreuses recherches, « [elle] reste empirique, faute d'une vulgarisation soutenue auprès des éleveurs ».
Les techniques d'imagerie médicale ont également apporté un plus au monde de l'élevage selon Eric Palmer. Les études sur le dopage ont été utilisées principalement par le milieu des courses, et beaucoup moins par les disciplines sportives.
Contrairement à ce que pense Jean-Pierre Digard, l'éthologie est pour Eric Palmer « une discipline émergente en croissance rapide ». C'est un plus qui correspond à « l'évolution sociologique du monde hippique plus jeune, plus respectueux du cheval ».
Philippe Augier enfin intervient sur le thème de la filière équine française dans le monde, son organisation avec ses forces et ses faiblesses. Selon le maire de Deauville, « l'offre équestre et hippique est en France abondante, très concurrentielle, diversifiée et largement partagée. La filière économique est forte, avec une marge de progression dans la mondialisation, à la condition de l'accompagner comme un levier de croissance et non comme une base fiscale ».
Florence Robillard
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