Les Paris, une institution en Normandie
Une institution à lui seul, Fabrice Paris, éleveur à Couvains. L'élevage des Forêts y a conquis ses lettres de noblesse depuis belle lurette. Et ça dure.
Ancrée dans la terre normande, la famille Paris. Les vaches laitières et l’agriculture ont toujours fait partie du quotidien des Paris. Aujourd’hui encore, alors que Fabrice s’est résolument tourné vers l’élevage intensif de chevaux. A l’âge de 7 ans, quand ses parents l’ont mis sur un poney à la Gourmette, le centre équestre de St-Lô, sa passion est née et ne l’a plus jamais quitté. Son destin devait inévitablement passer par là puisque, bien des années plus tard, il y rencontra Pascale, une monitrice qui devint son épouse et la maman de ses trois enfants.
Le début des années 70 marque un tournant dans sa vie professionnelle : à l’exploitation agricole classique, il ajoute l’élevage des chevaux et démarre prudemment avec trois poulinières. C’est avec May Flower III, une jument qui rassemble deux courants du sang fondateur du Selle Français, Uriel et Ibrahim, que l’élevage va connaître sa notoriété.
Les filles et petites-filles de May Flower III sont maintenant à l’élevage, assurant une descendance qui conforte chaque année la réputation de la maison Paris. Deux étalons vont marquer la production de May Flower : Stew Boy (Jalisco) né en 1984 puis Tolbiac des Forêts (Muguet du Manoir) né en 1985. Il y en aura beaucoup d’autres sur cette même souche.
« Bosseur »
C’est un bosseur, Fabrice. Tout le monde le reconnaît. Le coin de Normandie qu’il occupe avec sa famille et ses élevages, est un village à lui seul. Si, petit à petit, les chevaux et les structures qui vont avec ont envahi l’espace, le nombre de vaches laitières n’a pas pour autant diminué. Fabrice et son père mènent un troupeau de 130 laitières. 50 000 litres de bonne crème de Normandie sont produits chaque année, vendus à des grossistes de Rungis que Fabrice livre lui-même. L’emploi du temps de cet homme par ailleurs bon formateur de jeunes chevaux, il le résume lui-même sous forme de boutade : « le matin, les vaches, le soir, les vaches et les chevaux » . Boutade qui confirme le caractère énergique du personnage. Deux cents chevaux sont sur 180 hectares de pâture; 40 poulains naissent chaque année ici. « Aujourd’hui, il faut savoir tout faire. Les fermes ne sont plus adaptées à l’élevage des chevaux comme dans le passé. Le travail s’est spécialisé et dans la plupart des cas, les chevaux n’ont plus leur place dans les fermes » analyse avec justesse Fabrice.
Tout faire, à moindre coût, ça part évidemment de la naissance du poulain jusqu’à sa commercialisation, jeune ou moins jeune mais toujours avec une valeur ajoutée. Ce que font Fabrice, son épouse et sa fille Audrey. L’entreprise est parfaitement structurée avec deux employés aux vaches et deux cavaliers aux écuries : Axelle Grossin pour les jeunes chevaux et Kevin Tabary affecté spécialement aux débourrages.
Elevage, sport et commerce sont menés de front ici. Jamais l’un sans l’autre. Le travail sur le plat est souvent l’affaire de Pascale, les concours, celle de Fabrice et d’Audrey qui se destine, avec son titre de championne de France junior, au métier de cavalière, comme sa sœur Pauline. Après un bac et une école de commerce, le « naturel » de Pauline est revenu au galop : elle est aujourd’hui cavalière chez Simon Delestre, en Lorraine.
L’affixe des Forêts est assurément un label de qualité. Paris, père et fils ont maintes fois récolté les lauriers dans leur spécificité. Rare qu’une Grande semaine de Fontainebleau ne consacre pas un produit des Forêts. On se souvient de Nectar des Forêts (Diamant de Semilly) petit-fils de May Flower III, acquis par les HN, champion à 7 ans, le seul triple sans-faute dans la finale, très bon compétiteur en CSI5* et CSIO jusqu’en 2012 avec Jérôme Hurel. On se souvient de Rafale des Forêts (L’Arc de Triomphe) champion des 6 ans avec Guillaume Batillat, passé sous la selle de Pius Schwizer. On se souvient moins de Quamikas des Forêts (Mr Blue et Licorne des Forêts x Voltaire) vendu à 2 ans à VDL Stud, l’étalonnier hollandais, rebaptisé Zirocco Blue, vainqueur de deux coupes des nations avec Jur Vrieling, le cavalier de VDL qui va en faire prochainement son cheval de tête.
2013 fut encore un bon cru pour l’écurie des Forêts : Audrey, championne de France junior avec Major de Coquerie, l’étalon de Raphaël Dullin, vendu à un investisseur algérien; deux Excellent à 4 ans : Vagabond (Corofino-Richebourg) et Verdi des Forêts (Verdi-Richebourg), l’un monté par Audrey, l’autre par Fabrice; un Elite 5 ans, 2e de sa génération, Un Diamant des Forêts (Diamant-Papillon Rouge) avec Fabrice; une jument 3e de sa génération, Unte des Forêts, propre sœur de Nectar, sous la selle d’Audrey.
Une vingtaine de jeunes chevaux seront sur le circuit classique cette année. Des chevaux de l’élevage mais aussi des chevaux confiés par des propriétaires. Troisième volet de l’activité, le commerce. Des liens ont été tissés avec un investisseur algérien qui vient faire ses emplettes à Couvains. Fabrice accompagne lui-même les chevaux à Mostaganem.
L’élevage est complété par un centre de mise en place de semence qui gère le suivi et les inséminations d’une centaine de juments par an, inséminations en frais, en congelé ou transporté. Un laboratoire sur place et un vétérinaire agréé chef de centre assure la qualité du travail.
Depuis quelques années, l’activité du transfert d’embryons a beaucoup progressé et représente une part importante de l’activité du centre. Les structures permettent d’accueillir des étalons pendant la saison de monte avec six boxes de 4 mètres par 6 et un mannequin de monte. Administrateur du GFE, Fabrice est dépositaire d’un certain nombre d’étalons achetés par ce groupement. C’est le cas cette année pour Quool du Bois Margot (L’Arc de Triomphe) et Up To You (Calvaro-Olisco) qui sont confiés à Audrey. Fabrice est aussi impliqué dans l’organisation de concours à St-Lô, au sein de l’AEC notamment. Tout ce qui se passe à St-Lô autour du CPE intéresse au plus haut point cet infatigable et imaginatif éleveur-compétiteur-marchand qui sera en première ligne du salon des étalons qui s’ouvre le week-end prochain.
Etienne Robert
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