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Marchands : le renouveau

Un des objectifs de François Roemer était de redonner à la profession de marchand ses lettres de noblesse. Mission accomplie.Que de chemin parcouru en 18 mois. Lorsqu’il a repris en main les destinées de la Chambre syndicale des marchands Photo 1 sur 2
(CSCCF), François Roemer ne manquait ni d’idées, ni de convictions. Tout cela est encore intact aujourd’hui et la profession de marchand, qui s’est restructurée, a gagné en clarté et en organisation. L’assemblée générale qui s’est tenue au début du mois à Paris, témoigne de ce renouveau. En berne depuis 1988, année de la déréglementation de la profession, la CSCCF ne pesait pas lourd il y a 18 mois. A peine une trentaine de marchands et une cascade de procès depuis la fameuse directive européenne de 2005, dite loi de conformité. Transparence, crédibilté, professionalisme, services, telles ont été les pistes suivies par la CSCCF. Trente au départ, un peu plus de quatre-vingt-dix-sept aujourd’hui (toutes les régions sont représentées sauf la Corse et la Haute Normandie) les marchands ont vite retrouvé leur place au sein de cette structure apte à les renseigner sur leurs droits et leurs devoirs. Apte aussi à les défendre. Et l’arme quasi absolue dans cette défense, c’est le contrat de vente. Pour bétonner au mieux ce document, la Chambre s’est assurée des conseils de juristes et d’experts. Ce qui pouvait paraître comme un frein au commerce depuis que les vices rédhibitoires et les vices cachés ne garantissent plus le droit, les marchands en ont fait un argument en leur faveur en mettant au point le contrat de vente et en assurant un service avant et après la vente. Méthode efficace, transparente, qui exclut du marché tous ceux qui se livraient au commerce de manière sournoise et souvent irrégulière, dans le seul but de prendre un maximum de commissions. C’est bien cela et ceux-là, les intermédiaires fantaisistes, qui ont brouillé le marché et jeté un grave discrédit sur la profession. Me Meslé, avocate-conseil de la CSCCF, MM. Pignolet et Blin-Lebreton, experts-comptables et Jean-Marc Duffosset, expert Equitas ont fait le point sur ce contrat de vente et indiqué les pistes pour que vendeur et acheteur soient à l’abri de déconvenues. « Il n’y a pas de vilain marchand ni de gentil acheteur, disent-ils. Il faut dire (écrire) ce sur quoi on se met d’accord au moment de la vente ; l’acheteur doit dire qui il est, ce qu’il veut faire du cheval ; il faut décrire ce qu’est l’animal au moment de la vente ; le vendeur doit une garantie importante à l’acheteur en fonction de la destination du cheval, d’où l’importance de connaître le niveau d’équitation de l’acheteur ». Ce sont tous ces renseignements que comporte le contrat de vente. Ce sont ces éléments là que les juges apprécieront s’il y a litige.
Visite d’achat, visite de vente ou visite de transaction ?

Le Dr Philippe Lassalas, vice-président de l’association des vétérinaires équins de France (Avef) a apporté un éclairage nouveau sur la fameuse visite d’achat et le rôle du vétérinaire dans cette affaire. Ici, comme dans d’autres domaines (celui de la santé humaine entre autres) les procédures se multiplient et les vétérinaires, pour se prémunir, sont obligés de souscrire à des assurances de plus en plus chères. Un véritable casse-tête pour les praticiens et Philippe Lassalas, dans le cadre de l’Avef, n’exclut pas de déterminer un protocole de visite d’achat en lien avec le prix du cheval. Ce que Philippe Lassalas résume par la formule « On fait quoi par rapport à ce que ça coûte ? »

« Le vétérinaire, précise-t-il, n’a pas à se prononcer sur l’opportunité ou non de la vente. Il a une obligation d’information sur les risques ou les non-risques, et une obligation de conseil ».

Délicate position que les vétérinaires spécialisés en équine maîtrisent bien mais que leurs confrères généralistes dominent nettement moins surtout dans l’interprétation de l’imagerie médicale. Là les avis sont souvent contradictoires. L’imagerie, notamment avec l’IRM, a fait de tels progrès qu’on voit aujourd’hui des choses que l’on ne soupçonnait pas il y a quelques années.

« Connaissance, expérience et compétence sont indispensables dans le cas d’une expertise approfondie » estime Philippe Lassalas. Sous l’égide de l’Avef, l’homogénisation des transcriptions de compte-rendu est en cours. Il faut savoir aussi que le vétérinaire est tenu par le secret médical.
Intermédiaires, quelle place ?

Dans l’esprit du contrat de vente, le rôle de l’intermédiaire est de première importance. Il fait en effet figure d’expert et intervient directement pour guider son client. Or les intermédiaires sont parfois nombreux et souvent les noms ne figurent nulle part. Certains marchands se sont élevés contre ces pratiques qui mettent hors champ ces intervenants en cas de procédure et d’indemnisation. « Le risque doit être partagé, estiment-ils. Leurs noms devraient figurer sur la carte d’immatriculation du cheval ». La transparence ira-t-elle jusque là ? La réflexion est en cours.

Jean-Yves Camenen pour l’Unic et François Piquemal pour Cheval Qualité France ont expliqué chacun leur mission dans la filière. L’Unic est l’organisme officiel qui porte et exporte la culture et le savoir-faire français. Dans le commerce, il met en relation acheteurs et vendeurs. Des actions de ce type viennent de se concrétiser avec la Colombie par l’achat de chevaux de trait. Une mission en Chine avec la Région des Pays de Loire va déboucher sur une coopération d’envergure portant sur la formation des cavaliers et des chevaux.

La carte de marchand fera-t-elle son retour ? Des démarches sont entreprises pour la réhabilitation de cette reconnaissance professionnelle. A ce sujet, François Roemer avait alerté le ministère dans le courant de l’année (lire par ailleurs).

Promotion et information

Le redéploiement de l’activité de la CSCCF a pu se faire par l’obtention d’une importante subvention du Fonds Eperon. Près de 400 000 € ont été attribués à la Chambre syndicale, traduits en site internet, matériel de communication, dépliants, PLV et embauche d’un permanent. Une véritable veille tous azimuts qui informe en direct et en temps réel, par des notes de synthèse et des compte-rendus adressés par mail à tous les adhérents, des travaux entrepris par la Chambre et des réunions, fort nombreuses, auxquelles elle participe. Excellent travail de communication et d’information en toute objectivité. Sur le plan pratique, la CSCCF met en place, dans les régions, un réseau de correspondants. Sa participation au prochain salon du cheval de Villepinte est acquise. L’idée de François Roemer est d’y organiser une vente.

Charles de Certaines, le chef du bureau de l’équitation au ministère de l’Agriculture, assistait à cette réunion ainsi que Marc Damians et Bruno Mellet pour la SHF, Benoît Chaigne pour l’ANSF, François Lucas, président de l’Unic. Le représentant du ministère a souligné l’importance de l’action entreprise et la justesse de sa volonté rassembleuse. « Il est urgent d’aller vite, dit-il et de remettre en selle une interprofession, Fival ou maison mère ».

Etienne Robert

Une carte professionnelle européenne ?

Courrier de François Roemer au Ministre de l’Agriculture, en date du 19 octobre 2009.

« Nous appelons votre attention sur les conséquences fâcheuses qu’emporte l’absence de réglementation en matière de commerce d’équidés, et sur les effets

pervers qui font suite à l’adoption de la loi du 8 juillet 1998, synonyme de disparition de la carte professionnelle de marchands de chevaux jusqu’alors en vigueur.

De fait, ces dernières années ont été marquées par une très nette augmentation des vendeurs amateurs - activité souterraine estimée à 70 % en 2006 par Jacques Myard, député des Yvelines - normalement autorisés à la pratique de ventes occasionnelles, chiffrées à deux transactions annuelles. Mais le contrôle est difficile…

Outre la concurrence déloyale dont nous, professionnels, faisons l’objet et qui annihile toute possibilité d’emploi de salarié, favoriser les transactions entre particuliers équivaut aussi, et c’est bien plus grave :

- à encourager les fraudes et le manque à gagner pour l’Etat (impôt et TVA) compte-tenu de l’insuffisance des contrôles pratiqués sur les ventes d’amateurs;

- à diminuer la capacité d’embauche de salariés par les professionnels;

- à retirer aux acheteurs les garanties de droit inhérentes au code de la consommation (garantie de conformité des biens);

- à minimiser l’importance des compétences d’expertise et de conseil, pourtant primordiales en matière de commerce de biens vivants, et auxquelles tout acheteur néophyte est en droit de prétendre;

- à « tuer » les éleveurs professionnels et à accepter la disparition de leur savoir-faire historique;

- à dégrader enfin l’image déjà écornée de la filière cheval.

Nous nous joignons par la présente aux réclamations formulées à Bercy sur la reconnaissance d’un statut de professionnel, d’autant que la législation européenne

ne fait pas obstacle à une réglementation de la vente des équidés.

Au regard de l’alinéa 11 de la PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN sur la création d’une carte professionnelle européenne pour les prestataires de services (2008/2172(INI)), le Parlement européen souligne « qu’une carte professionnelle européenne pourrait représenter un avantage, même pour les professions qui ne sont ni réglementées ni harmonisées, puisqu’elle aurait un rôle informatif vis-à-vis des employeurs et des consommateurs pour la plupart des professions libérales ».

Nous vous saurions gré, Monsieur le Ministre, de bien vouloir prendre note de cette situation alarmante et de programmer une rencontre durant laquelle nous pourrions chercher, ensemble, une issue positive aux maux de notre filière ».

21/01/2010

Actualités régionales