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Martinvast : Cédric Lyard au bout du suspens

CCE Martinvast (50) 20-24 août Le Grand Complet a pris la bonne habitude de recevoir mi-août au cœur du bocage normand le gratin mondial du CCETradition respectée pour cette 14e édition, avec quelques-uns des héros de Pékin - les Australiens Lucinda et Clayton Fredericks, Photo 1 sur 2
médaillés d’argent, Didier Dhennin (6e en individuel) ou encore Eric Vigeanel (20e) -, rejoints in extremis par les Anglais Pippa Funnell et la princesse Zara Phillips ou encore les Français Jean Teulère et Cédric Lyard.

Les trombes d’eau de 2007 rangées au rayon des mauvais souvenirs, l’inconnue résidait cette année pour les dirigeants et les 250 bénévoles de l’association Ustica dans les conséquences éventuelles, en terme de fréquentation, de l’inversion du calendrier des épreuves (cross du trois étoiles dès le samedi, nouvelle contrainte de la FEI). Des inquiétudes bien vite dissipées avec plus de 15 000 spectateurs massés aux abords des 3 800 m d’un parcours très exigeant, que seul l’inattendu Italien Juan Carlos Garcia parvint à boucler sans pénalité et dans le temps imparti.

A l’issue de ce cross, et malgré 3,2 pts de pénalité pour temps dépassé, Pippa Funnel, en tête à l’issue du dressage, semblait bien placée pour inscrire son nom au palmarès avec Ensign (46,9 pts). Elle pointait également à la 4e place avec Blue Horison (48,4 pts). Elle ne possédait cependant que quelques dixièmes de point d’avance sur sa compatriote Zara Philipps et Red Baron (47,7 pts), 4es du dressage et auteurs d’un remarquable cross, et à peine plus d’un point sur Cédric Lyard (48,2 pts), idéalement calé en 3e position.

Suspens assuré à la veille du décisif CSO, d’autant que les dix premiers n’étaient séparés que par moins de deux barres. A l’inverse, Eddy Sans peut quelques regrets : 2e après le dressage, il s’est lancé à vive allure sur le cross avec Kramique (Votez Bien - Oural de Jalons) dont c’était la première à ce niveau et dont les trois désobéissances furent fatales.

Au final, il ne s’en est fallu que d’une petite barre pour que Pippa Funnel, dont c’était la première apparition entre Douve et Divette, ne transforme ce coup d’essai en coup de maître ! Le premier tour sans faute de Zara Philipps et Tallyho Sambucca planta le décor. Si elle rééditait cette perf’ avec Red Baron, elle terminerait au pire 2e.

Dernière chance tricolore, Cédric Lyard eut lui le redoutable privilège de partir avant les deux Anglaises. Le médaillé d’or par équipes d’Athènes tint parfaitement son rôle en bouclant le 3e sans-faute du concours avec Jessy Mail (Hand In Glove PS - Almé), le cheval de Philippe Le Gallo qu’il ne monte que depuis le début de l’année.

Une énorme pression pesait donc sur ses deux adversaires directes, dernières à s’élancer. En fautant sur les deux combinaisons, Zara abandonna tout espoir de victoire puis de podium. Restait Pippa Funnel, dont la marge de sécurité se résumait à un éventuel point de temps dépassé. La suite, c’est Ensign qui, dans un silence de cathédrale, laissa traîner un antérieur sur un obstacle d’apparence anodin, provoquant du même coup le ‘‘trafalgar’’ de sa cavalière (elle s’adjuge tout de même les 2e et la 3e places), en même temps que la délivrance des quelque 5 000 spectateurs massés autour du Central et presque tous acquis à la cause de Cédric.

CIC** : Clayton Fredericks au finish

5e à l’issue du dressage, l’Australien a su attendre son heure pour l’emporter, associé au Pur-sang français The Frog. Sans faute au CSO, là où ses adversaires directs, l’Anglaise Pippa Funnell/Redesigned et l’Australienne Catherine Burrell/Ballycoog Imp, concédaient 4 pts, le vice-champion olympique 2008 par équipes a remarquablement géré le cross du dimanche matin (2,8 pts de temps dépassé) quand, dans le même temps, Fabrice Lucas, solide leader à l’issue du CSO, connaissait une terrible déconvenue : Keep du Mesnil (Narcos II - Le Pontet PS) lui opposa un refus qui le projeta à terre. Ce coup du sort fit l’affaire de Stanislas de Zuchowicz et Mutin du Vallon (Vassal du Defey*HN - Rex), vainqueurs ici même l’an dernier du une étoile et 2e au final au terme du deuxième meilleur cross du jour (5’34’’soit 2,4 pts). Troisième accessit pour Raymond Nersessian et Milady de la Loge (Ahorn KWPN - Porto Rafti PS), auteurs d’une belle remontée puisque 7es à l’issue du dressage.

CIC* : Catherine Burrell de bout en bout

En pôle position dès jeudi après-midi à l’issue du dressage remportée de fort belle manière (41,4) avec Urzan KWPN (Metall), Catherine Burrell, dont le sourire a durant trois jours illuminé ce Grand Prix de la Communauté urbaine, n’a plus quitter la direction des opérations, en dépit de la pression exercée par ses poursuivants. A 31 ans, l’Australienne, née dans une famille d’éleveurs de bétail, est aujourd’hui expatriée en Grande-Bretagne, près de Barbury Castle (où se déroule un renommé CIC***). Elle a appris à monter en gardant les troupeaux puis en pratiquant le cattle pening (rassemblement de béail) et signe à Martinvast un probant succès qui en appelle d’autres.

En ne lâchant rien dans le CSO, pas plus que sur le cross, Didier Willefert se classe 2e avec Nessie de Preuilly (Trésor du Renom - Tu Viens d’Orval), qui confirme ici son titre de championne de France des chevaux de 7 ans décroché lors du CCI* de Dijon-Bonvaux. Troisième place pour une autre ‘‘Aussie’’ (australienne) et pas n’importe laquelle : Lucinda Fredericks, tout récemment médaillée d’argent par équipe à Pékin, associée ici à R Lillibet (Roviris Tho /-Landgraf), la jument de 6 ans de Mike Todd.

Daniel Sebire

Cédric Lyard : « Compte-tenu du peu de sans faute et du faible écart qui nous séparait, je savais qu’un sans faute risquait d’être payant. D’autant que j’avais observé Pippa et Zara au paddock et que leurs chevaux ne semblaient pas au top. Cela m’a mis en confiance. »

Pippa Funnell : « C’est un évènement brillant. Le parcours à travers champs est très beau, le terrain est bon et l’organisation est très amicale. Ce qui m’a également frappée, c’est le formidable travail des juges d’obstacles : ils ratissaient en permanence les abords et les réceptions. »

Catherine Burrell : « J’ai sollicité Urzan sur plusieurs obstacles, notamment le gué de la Divette : il n’a pas l’habitude de l’eau courante car en Grande-Bretagne les gués sont artificiels, ce qui change l’abord. Il n’est pas non plus habitué aux dénivelés, il est né aux Pays-Bas. Il n’a pas encore beaucoup d’expérience, mais c’est un bon cheval. J’ai ma propre écurie avec des chevaux de propriétaires, comme Silver Aristocrat (15e de ce CIC*), des chevaux qui m’appartiennent et des chevaux de commerce. Martinvast apporte beaucoup d’expérience aux chevaux, dans un cadre magnifique. Mon prochain objectif, c’est le Mondial du Lion auquel j’espère pouvoir participer avec Silver Aristocrat. »

Juan Carlos Garcia : « Je veux prouver que je suis capable »

Après avoir côtoyé avec succès l’élite mondiale du CSO, l’Italien d’origine colombienne s’essaye désormais au CCE. Avec à peine 18 mois de pratique, il vient déjà tutoyer les meilleurs. « Je pratique cette discipline uniquement pour le plaisir » confie-t-il volontiers, même s’il s’est juré de participer à terme aux JO dans les deux disciplines (il était déjà à Séoul en 1988, Barcelone en 1992 et Athènes en 2004). « Je veux prouver que je suis capable de réaliser une belle performance dans une grosse épreuve. » Un objectif loin d’être irréaliste et même partiellement atteint ici : il termine au pied du podium après avoir enflammé le cross qu’il a remporté en 6’46’’.

Le transalpin s’est d’ailleurs donné les moyens de parvenir à ses fins, tout d’abord en se constituant un piquet à la hauteur de ses nouvelles ambitions. C’est ainsi que, tour à tour, Karuso (l’ancien cheval de la Finlandaise Pia Pantsu), puis Iman du Golfe (précédemment monté par Rodolphe Scherrer) et plus récemment Kopervik Corubert ont pris la route de Bologne. Il s’est ensuite attaché les services de Jean-Luc Force, désormais coach auprès de cavaliers de l’Europe entière : « Il m’a beaucoup apporté, notamment en dressage, mais aussi en CSO ». Juan Carlos aime monter au feeling : « Les chevaux français sont parfaits pour cela ».

Une confidence qui nous ramène à Albin III : « Nous allons encore participer au GTC d’Arezzo en septembre. Nous aurons ainsi réalisé cette année trois ou quatre tours sur de très beaux concours. Ensuite, je pense que je lui offrirai une retraite bien méritée... »

Martinvast privé de Coupe du Monde ?

Pour le Grand Complet, créé voici 14 ans et labellisé CIC-W depuis 2002, cette édition 2008 était-elle la dernière au titre de la Coupe du Monde ? A l’instigation de son nouveau mécène, la banque HSBC, la FEI a en effet entrepris de réorganiser le calendrier, la principale modification visant à ne plus reconnaître qu’une seule étape par pays. Or la France en accueille deux à ce jour : Fontainebleau en mars et Martinvast en août.

Au terme de cette édition, les organisateurs martinvastais semblaient pour le moins circonspects quant aux critères qui selon eux risquent de guider l’arbitrage de la FEI. En dépit de tous les atouts sportifs, techniques et humains du ‘‘poucet’’ manchois, la bataille paraît en effet bien déséquilibrée face à ‘‘l’ogre’’ bellifontain, à la capacité d’influence et aux infrastructures d’Ile-de-France. Le salut pourrait venir des cavaliers internationaux, qui dans leur très large majorité semblent juger Martinvast plus attractif. Cédric Lyard, Pippa Funnell et Clayton Fredericks ont déjà annoncé qu’ils plaideraient sa cause auprès de la FEI.

Décision courant novembre, une échéance lourde de conséquences puisque pour le Grand Complet, la perte du label Coupe du Monde remettrait en cause son existence.
11/09/2008

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