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Rabat, l’impérial

  • L’Egypte au zenith (© JR)
    L’Egypte au zenith (© JR)
Circuit de rêve, le Morocco Royal Tour (MRT). Tous les cavaliers vous le diront. Soleil, plage, dépaysement, accueil, farniente, dotations : tout baigne dans une étonnante et cordiale décontraction.





Au fil des 10 années d’existence, le MRT a évolué jusqu’à devenir ce CSI haut de gamme pas tout à fait comme les autres. La plus-value, c’est la culture, l’environnement et la lumière.


S’il n’est pas une « grande » nation cheval, le Maroc se distingue par une belle et typique production de chevaux Arabe, Arabe-Barbe et Barbe, ces chevaux du désert qui tiennent salon chaque année à El Jadida. Un salon du cheval à ciel ouvert que fréquente tout le Maroc profond, friand d’époustouflantes fantasias ou Tbouridas. La spécialité du Maroc, c’est cela.


Sur les quelque 15 000 chevaux répertoriés, 11 000 servent aux Tbouridas, une pratique équestre archi répandue jusque dans le moindre village.


Le jumping est assez confidentiel mais le Prince Charif Moulay Abdellah Alaoui ne lésine pas sur les moyens pour favoriser ce sport et le porter à un niveau d’excellence. Le très souriant et adroit Ouaddar Abdelkebir en est pour l’heure le porte-drapeau. Marcel Delestre a en ce moment la mission de former et d’entrainer l’équipe nationale marocaine. Il en a fait la N°1 des derniers jeux africains qui se sont disputés à Rabat au mois d’août. Il en tire, à juste titre, une certaine fierté. Comme il l’explique un peu plus loin, ce test africain aurait dû suffire pour obtenir la qualification pour Tokyo. Ce fut vrai jusqu’à ce que la FEI décide la création du groupe F.





La règle des trois





Petite discipline, en nombre de pratiquants, mais grand déploiement de moyens à Dar el Salam, siège de la fédération royale marocaine des sports équestres où avaient rendez-vous une bonne centaine de cavaliers des cinq continents représentant 24 nations pour du haut niveau avec 747 000 euros de dotation dans le CSI 4* et CSIO 4*W, 48 000 euros pour le CSI 1*. Sans compter les frais de traversée des camions (A et R) entre Algésiras et Tanger qui sont à la charge de l’organisation. Le MRT tourne autour de la règle des trois : 3 semaines de concours, 3 villes différentes, 3 chevaux par cavaliers, 3 ambiances.


La mise en scène est assurée par l’irlandais Alan Wade sur des pistes parfaitement fleuries autour d’obstacles originaux. Du beau travail. Des tribunes couvertes garnissent un grand et un petit côté de la piste. Elles sont rarement pleines. Dar Es Salam est très excentré. En revanche les aires de verdure de l’autre grand côté où se trouvent les divers espaces VIP et restauration ont la faveur des spectateurs qui se prélassent sur de gros coussins multicolores rembourrés de mousse.





Marseillaise à Tétouan. Belle entrée en matière pour l’équipe de Thierry Pomel à Tétouan. Le Grand Prix 4* est pour Olivier Perreau/Venizia d’Aiguilly devant Emeric George/Chopin des Hayettes. Tony Cadet/Uppsala del Cabalero est 5e. Ces trois-là plus Pierre-Alain Mortier disputeront la Coupe des Nations. Olivier y signera un nouveau clear round.





Hymne brésilien à Rabat. Bernardo Alves pour le Brésil s’impose dans le Grand prix 4* de Rabat, GP SAR la princesse Lalla Amina avec un étalon gris, El Torreo de Muze, fils de Taran de la Pomme-Vigo d’Arsouilles appartenant à Joris de Brabander. Eloigné des pistes depuis un moment, le Brésilien, boosté par Philippe Guerdat l’entraineur du Brésil, renoue avec le succès. Il est installé en Belgique chez Joris qui lui a confié ce cheval. Son regard est évidemment tourné vers Tokyo. Il fut double sans-faute dans la Coupe.





Tickets gagnants pour l’Egypte et le Qatar. La coupe des nations n’a pas souri au Maroc qui rate son ticket pour Tokyo. Mauvaise journée pour l’équipe de Marcel Delestre passée tout près du but. En revanche, l’Egypte qui alignait quatre cavaliers éparpillés dans le monde : Nayel Nassar/Lucifer V, Abdel Saïd/Venise du Reverdy (SF par Quidam), Sameh El Dahan/Suma’s Zorro avec le « petit jeune » Mohamed Taher Zeyada, 24 ans, en selle sur l’excellent Vizalaty (SF x Newton de Kreiker né chez Michel Frigot), a frappé un grand coup, détrônant de la première place l’équipe suisse et s’adjugeant la Coupe (4 pts) et la sélection pour Tokyo. Comme l’explique leur chef d’équipe, Eng Hesham Hatab « C’est la première fois que nous arrivons à réunir ces quatre cavaliers, tous extrêmement motivés par la perspective de cette qualification olympique. Cela fait soixante ans que l’Egypte n’a plus été qualifiée pour les jeux… aucun de ces cavaliers n’était né ».


La Suisse est 2e à 5 pts et l’Italie 3e à 14 pts.





CSI 1* : la Belgique gagnante L’équipe B de Belgique coachée par Philippe Le Jeune s’est emparée des meilleures places du CSI 1* avec Thierry Goffinet/Mojito et Virginie Thonon/Capucine de Maugre (Ogano Sitte né chez Olivier Normand dans les Ardennes).


Etienne Robert





Pierre-Alain Mortier : « Cibler ses épreuves avec un objectif précis »





Pierre-Alain, tu en es où après Calgary ? Tes impressions ?


« Calgary, ça ne s’est pas forcément bien passé pour moi. Les chevaux étaient vraiment surpris, c’était très gros, très haut, je n’étais pas prêt à faire ça, mais c’est moi qui ai vraiment voulu y aller, donc j’ai vu. Après, la crainte que j’avais, c’était que mes chevaux se soient fait peur. Ils ont repris le concours comme si de rien n’était. La semaine dernière ils ont très bien sauté à Tétouan, autant Uruguay, sans-faute dans les qualifs, sans-faute dans le Petit Grand Prix, que Just Do It, classé dans le Grand Prix, sans-faute-4 pts dans le dernier au barrage, ça me loupe le podium, et puis ce week-end il a fait un petit parcours et il va sauter la Coupe dimanche ».





Donc très bonne expérience ?


« Oui ce n’est que de l’expérience. Quand on dit que c’est un des plus gros concours au monde, c’est le cas. On ne s’en rend pas bien compte à la télé, on voit que c’est gros, mais une fois qu’on est sur place et devant les obstacles c’est énorme, on n’a pas du tout l’habitude de sauter ça. La configuration n’est pas du tout la même, c’est du matériel lourd, des obstacles qui font 6 m de fond, avec de gros soubassements, de gros chandeliers de plus de 2 m de haut. Ce n’est plus du tout ce qu’on saute maintenant en concours sur les CSI, avec du matériel très léger, très fin. Les chevaux ont été très surpris. Quand ils rentrent en piste ils sont tout petits, on a l’impression de monter un poney. Enfin moi je n’ai vraiment pas retrouvé le Just do it que je connais. C’est un cheval avec énormément de courage et de cœur. J’ai fait péniblement deux parcours, il ne voulait pas y aller, il ne se tirait pas. Avec Thierry on s’est dit que ce n’était pas la peine de l’envoyer dans la Coupe des Nations parce qu’on risquait de le laisser là-bas. C’est pourtant un très bon cheval, il l’a prouvé encore cette année en se classant pleins de fois dans des 4-5 *, mais ce n’est pas un registre de concours pour lui. Je pensais qu’il pouvait le faire, peut-être pas sans-faute, mais le faire bien comme il avait fait Rome, La Baule, Gijon. Mais Galgary c’est totalement différent, c’est inimaginable ».


Just Do It c’est un cheval que tu as fabriqué quasiment ?


« Oui, c’est un cheval que j’ai eu à 5 ans, donc je l’ai fait depuis le départ, comme Uruguay aussi, à peu près comme tous mes chevaux d’ailleurs ».





Et Black Jack de St Paul ça va être pareil ?


« Black, je l’ai récupéré à 7 ans l’année dernière. Il a suivi le circuit classique avec Justine Seuillerot la fille de son propriétaire-naisseur, François Seuillerot de Besançon. C’est un cheval dans lequel je crois beaucoup, je prends mon temps. Il ne fait pas énormément de concours, c’est un cheval qui est sensible, qui a beaucoup de tempérament. L’objectif commun avec la famille Seuillerot c’est de le préparer pour la suite donc ce n’est pas du tout de tirer dessus pour chercher à le mettre au classement ou à prendre de l’argent. On croit beaucoup à ce cheval. Pour moi je pense que ça va être la relève pour plus tard.


C’est un vrai beau cheval, bien né (Ensor vd Heffinck et Latina de St Paul aa x Ultra de Rouhet aa) issu d’une famille de sauteurs, avec une bonne origine maternelle anglo, Dans la famille il y eut Fandzi de Saint Paul (Ultra de Rouhet) qui a sauté de gros parcours avec Hervé Godignon ».





Après c’est El Jadida ?


« El Jadida oui. La particularité d’ici c’est qu’on saute deux semaines dehors sous le soleil et puis d’un seul coup on se retrouve dans un palais. Alors ça fait un peu drôle mais c’est parfait pour préparer éventuellement Lyon ».





Ton sentiment sur cette tournée du Maroc ?


« Mon sentiment c’est que c’est fantastique, tout est fait pour les cheveux, tout est fait pour les cavaliers, je parle aussi d’El Jadida, ce n’est pas encore couru mais je l’ai fait l’année dernière. Les trois concours sont complètement différents. Les sols sont bons, tout est bon, les écuries, l’accueil des cavaliers, les hôtels, c’est vraiment du beau concours.


Les box sont dans des grands chapiteaux, il y fait frais, les chevaux sont vraiment bien. Tout est parfait. Et puis c’est trois cadres totalement différents. A Tetouan on est dans la Garde Royale donc il y a le côté typique du Maroc, avec les tours autour, la ville est juste derrière, là à Rabat ce sont les installations équestres de la Fédé dans le superbe et immense parc de Dar el Salam, et puis la semaine prochaine c’est un mini Lyon ».





A refaire l’année prochaine ?


« Si j’ai des chevaux oui. Parce que pour sauter trois semaines de suite il faut deux chevaux différents pour les grosses et les qualifs. Et mine de rien il y a un détail super important, c’est la chaleur, ils partent de chez nous il fait 12° et on arrive ici il fait 30°.


Ils se sont bien accoutumés mais il faut bien gérer, il ne faut pas sauter n’importe quoi. C’est vrai que c’est tentant parce qu’il y a pas mal d’argent, il y a pas mal d’épreuves bien dotées. Il faut bien gérer, bien cibler ses épreuves, avec un objectif précis ».





Côté logistique, les chevaux sont venus en camion ?


« Oui, les chevaux sont venus en camion avec ma groom qui a mis 4 jours pour descendre. Elle est venue toute seule. Moi j’ai mal de boulot à la maison, beaucoup d’élèves avec le sport étude, donc je ne peux pas me permettre de perdre une semaine de transport. Je les ai rejoints à Tétouan, d’ailleurs je rentre entre Rabat et El Jadida pour aller bosser aux écuries et je reviens pour El Jadida. Tout ça demande une bonne logistique ».





Marcel Delestre : « un très bel événement »





Confiant, Marcel Delestre, avant la Coupe des nations qui servait de qualificative à son équipe pour les JO de Tokyo. Une qualification acquise pendant les Jeux africains en août à Rabat mais remise en cause depuis par la FEI.


« Et bien oui, on va jouer notre qualification pour les JO alors qu’elle a été acquise par les Jeux Africains sauf que la FEI a décidé que les pays africains n’étaient pas assez bons pour faire un groupe. Ils nous rajouté le Quatar, les Emirats, la Jordanie. C’est dommage parce qu’on s’est déjà battus contre l’Egypte qui est un pays très important. D’autres pays sont venus, l’Algérie, le Zimbabwe, la Zambie où il y a des bons cavaliers. Donc on nous a fait un groupe à part et je pense que c’est déplorable parce qu’on serait qualifié pour les JO ».


La suite, on la connait. Ce sont les Egyptiens qui ont décroché la timbale.





Comment se passe ta vie au Maroc, Marcel ?


« Je suis ici depuis début août, basé avec mon équipe, déjà pour préparer les Jeux Africains, sur lesquels on a eu vraiment des belles réussites puisqu’on est le seul sport à avoir gagné toutes les médailles qui puissent exister. Donc ma vie ici c’est à la Fédération. Nous avons des infrastructures qui sont extraordinaires. Le matin on travaille les chevaux de 8h-14h et l’après-midi c’est détente à l’hôtel amphitrite à 20 mn de Rabat, près de la plage où on a à disposition coach sportif, kiné, médecin et tout ce qui peux faire avancer dans la préparation ».





Le team marocain, c’est combien de cavaliers ?


« L’équipe c’est 5. Maintenant, pour faire des grosses épreuves j’ai un noyau de huit cavaliers. Dans la qualité de cavaliers ça va, il manque un tout petit peu de travail dans les jeunes chevaux. Ce sont des chevaux achetés à 3 ans à Fences et qu’on fabrique. Il y a plus de qualité dans les chevaux d’âge.





L’équipe était à Solgne précédemment


« Oui, ils étaient basés là. Le Prince a décidé cette année de les mettre en Belgique, et peut-être que l’année prochaine on changera, je ne sais pas. Pourquoi la Belgique ? Parce qu’on a trouvé une écurie proche de tous les concours, Bonheiden, Oplabeek, et tout, donc ça limitait les déplacements et permettait aux cavaliers de garder leur habitat et de ne pas avoir trop de frais. Du coup on ne me voit plus beaucoup à Solgne mais j’y vais quand même parce que j’ai deux petits-enfants qui sont extraordinaires et que je tiens à voir ».





Depuis combien de temps tu encadres l’équipe ?


Ça va faire 2 ans ½ que je suis ici, et je pense qu’on a bien avancé dans beaucoup de choses. Les cavaliers étaient bons au départ, il manquait juste quelques petits détails à peaufiner.





On est ici à Rabbat, c’est un site magnifique.


« C’est un environnement qui est extraordinaire pour le travail. Il ne nous manque rien, vraiment on a tout ce qu’il faut pour réussir. La seule chose qui manque un tout petit peu c’est la qualité de chevaux mais petit à petit on va y arriver.


Le Morocco Royal Tour est dans sa 10e année, je pense qu’il est maintenant très routiné et très bien organisé, c’est pour moi un très, très bel événement ».





E. R.





El Jadida : un final à l’Italienne





La tournée du Morocco Royal Tour s’est achevée par un double triomphe italien dans le Grand Prix de Sa Majesté Mohammed VI. Roberto Turchetto s’impose de trente-deux petits centièmes devant le « vétéran » Natale Chiaudani au terme d’une rude bataille.





Un public dont l’enthousiasme n’a rien à envier à celui des meilleurs publics européens. Une ambiance de stade qui démontre toute la passion que les Marocains ont pour le cheval. Une passion qui se traduit également par la qualité exceptionnelle des installations construites pour le Salon du Cheval d’El Jadida et voulues par Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Côté jumping, la piste était parfaite. Ajouté à cela l’accueil que l’équipe du MRT réserve aux cavaliers et à leurs entourages, on comprend qu’ils aient tous envie de revenir d’une année sur l’autre.


Dans la seule seconde manche de cet ultime Grand Prix, on comptait déjà, sur les douze finalistes, huit nations et quatre continents ! La nation la plus représentée était l’Italie avec trois cavaliers, et, sur des parcours construits par un chef de piste italien (mais ce n’est là qu’un hasard nous a promis Uliano Vezzani), Roberto Turchetto (Baron) et Natale Chiaudani (Chopard) ont signé deux des trois seuls double sans-faute de l’épreuve : « J’adore ce circuit, déclarait le vainqueur. C’est la troisième fois que je viens et la deuxième fois que je remporte le Grand Prix ici, à El Jadida. Et je vous promets que si j’ai le cheval qui va, je serai définitivement de retour ici l’année prochaine ».





Le jeune Suisse Elian Baumann, en selle sur Campari Z, complétait ce podium finalement très européen.





L’épreuve principale de samedi était le Winning Round (comptant pour le classement mondial), épreuve en deux manches dont la deuxième au chrono et qui se transforme immanquablement en barrage ! Sur les dix invités à la seconde manche, six couples avaient été sans-faute au premier tour, les quatre autres ayant tous un point de pénalité pour temps dépassé. Les six sans-fautes ont tous doublé la mise en seconde manche où chaque passage était de plus en plus rapide. Du spectacle sportif comme on l’aime. Et c’est le chrono du Brésilien Felipe Amaral, en selle sur Quinn 33, un autre Holsteiner de 10 ans, qui allait être celui du vainqueur, battant de six dixièmes le Français Olivier Perreau ( GL Events Dolce Deceuninck).





L’épreuve précédente fut très rapide et c’est le jeune espoir marocain, Samy Colman qui s’est imposé avec beaucoup d’autorité.





Samy Colman (23 ans) a fait preuve d’une belle maturité pour dominer ce Prix FBP (1,40 m) avec son Holsteiner Cabanero 2. Une victoire qui montre la belle santé du saut d’obstacle marocain.


24/10/2019

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