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Serge Lecomte : « Réorienter un soutien financier vers les dotations des compétitions »

Sport, élevage, haut niveau, Jeux Mondiaux 2014, French Equestrian Tour : Serge Lecomte, président de la Fédération Française d’Equitation évoque les grands sujets actuels au moment où les équipes de France occupent le devant de la scène sportive Photo 1 sur 1
internationale. La victoire de Bosty à Cannes dans le Grand Prix du Global Champion Tour où les Français étaient quasi tous présents en seconde manche est à cet égard d’une importance capitale. Pour le sport et pour l’élevage avant les échéances européennes. L’argent dans la filière ? Son idée est de renforcer les dotations pour mettre l’argent à la base et finalement favoriser l’économie de la filière.

Quels sont vos objectifs ?

Nos objectifs sont simples : un vrai panel de cavaliers de haut niveau pour aborder les grandes échéances sportives, JO et Jeux Mondiaux, avec de réelles capacités de figurer parmi les meilleurs et un million de cavaliers licenciés et heureux dans nos clubs - nous en sommes à 650 000.

La stratégie à mettre en œuvre pour satisfaire davantage de cavaliers et pour davantage de performance sportive passe par la remise à plat du dossier de la formation. Cette stratégie se traduit dès cette année, par un soutien technique à la carte à nos sportifs de haut niveau par nos cavaliers les plus expérimentés désireux de transmettre leur savoir aux nouvelles générations. Ensuite, pour fin 2010, par une remise en cohérence des brevets fédéraux, des brevets d’encadrement, de l’accès à la compétition et de l’information auprès du public cavalier et des clubs.

La formation est au cœur de notre projet car c’est la clef de la performance et de l’efficacité technique.

Quelles sont les missions de la Fédération ?

Notre Fédération s’inscrit dans le cadre de la charte olympique. Pour « mettre le sport au service du développement harmonieux de l’homme,» elle mène à bien simultanément ses missions sportive, éducative et économique.

- Mission sportive :

La mission sportive consiste à créer les conditions du succès au plus haut niveau de façon régulière. Cela consiste notamment à proposer des circuits de compétition propres à préparer et à faire réussir nos cavaliers jusqu’au plus haut niveau.

Une action plus spécifique vers la préparation des grands rendez-vous mondiaux et plus précisément des jeux olympiques consiste en un soutien renforcé aux meilleurs qui constituent les équipes de France.

- Mission éducative :

La mission éducative se traduit par le développement des pratiques équestres, à la fois ludiques, enrichissantes et au contact de la nature, pour le plus grand nombre de nos concitoyens. Notamment l’éducation à l’environnement et au développement durable qui sont au centre de nos préoccupations. La Fédération joue un rôle central dans le développement des pratiques. La FFE poursuit la philosophie du monde poney dont chacun connaît et reconnaît les succès extraordinaires. La FFE mutualise les moyens entre tous les acteurs de l’équitation pour aider ses clubs à mieux satisfaire les licenciés. Elle propose des projets éducatifs et sportifs afin d’offrir aux enseignants équestres ces supports comme objectifs. Enfin, elle participe à l’animation et au maintien des itinéraires de promenade et de randonnée dans nos campagnes en développant les activités de tourisme équestre. Cela offre aux cavaliers du monde entier des vacances qui leur permettent de découvrir la France à cheval.

- Mission économique :

Ces deux missions, éducative et sportive, doivent être conduites avec le réalisme économique indispensable à leur réussite.

Face aux restrictions budgétaires de l’Etat, elles reposent aujourd’hui sur la vitalité des clubs qui séduisent de plus en plus d’adeptes et sur les cavaliers qui s’engagent en compétition. Ce sont eux qui permettent à la FFE de mener ses missions de développement et de soutien au sport de haut Niveau.

Que vont apporter les Jeux Mondiaux 2014 en Normandie ?

L’organisation d’un tel événement est une chance pour l’équitation, pour la Normandie et pour la France.

C’est une occasion exceptionnelle de faire connaître la région et son engagement en faveur du cheval. La Normandie est un berceau de race de chevaux de haut niveau exceptionnel dont les ressources génétiques se retrouvent dans le patrimoine des meilleurs chevaux de sport du monde. Les Jeux Mondiaux permettront de le faire savoir. C’est ce qui a conduit la région à porter cette candidature et je souhaite très sincèrement que la Normandie profite des retombées internationales que son engagement mérite.

Quelle sera l’implication de la Fédération ?

La Fédération va apporter son assistance technique et son expertise sportive à ce projet sous l’impulsion de Christian Paillot, qui s’est considérablement engagé pour obtenir cet événement. Elle renforcera les moyens en faveur de la préparation des équipes de France pour qu’elles brillent à domicile.

Quel sera l’impact à votre avis ?

Ce sera l’occasion de faire savoir au monde, mais aussi à nos concitoyens, que la France est un grand pays équestre avec une pratique véritablement populaire. Nous ferons partager nos richesses culturelles et toutes les merveilles que les centres équestres et les poney-clubs offrent aux passionnés du cheval et de la nature.

Au delà de la Fédération, cet événement canalisera toutes les énergies de la filière cheval pour la réussite complète de cet événement mondial aux retombées télévisuelles planétaires.

Comment renforcer la cohésion des sports équestres ?

La cohésion des sports équestres est acquise. La question aujourd’hui, c’est plutôt comment faire en sorte que tous partagent cette évidence : notre avenir et notre richesse tiennent d’abord à notre culture et à sa diversité. Diversité qui est la conséquence de notre Histoire. Cette diversité se traduit concrètement tous les jours par la diversité des pratiques et des offres des centres équestres. La diversité des cultures, c’est comme la biodiversité. C’est un avantage formidable et une garantie pour l’avenir. La France et le modèle équestre français sont de ce point du vue, mieux préservés de la standardisation que ses voisins. C’est une richesse, une chance et une force.

Sur le plan économique, le haut niveau est imbriqué avec les pratiques des amateurs et des clubs. Ce sont eux qui permettent aux producteurs de chevaux de sport d’avoir un marché. Notre force réside précisément dans l’articulation d’une puissante activité amateur et club avec le haut niveau. C’est vital pour que les sports équestres puissent prospérer et permettent à nos cavaliers internationaux d’être parmi les meilleurs. L’unité de la fédération nous permet de faire progresser à la fois la pratique et le sport. Nous pouvons mesurer aujourd’hui le danger vers lequel nous poussaient les adeptes de la division qui rendrait exsangues les ressources du haut niveau.

Quelle est votre réaction aux critiques émanant principalement des acteurs du haut niveau ?

Les critiques me semblent naturelles. On n’évolue pas sans changer les habitudes, cela dérange toujours et focalise les critiques. C’est la preuve que nous travaillons. Les projecteurs de l’actualité changent d’acteurs, cela crée des nostalgies bien compréhensibles. Bien évidemment, si je me suis passionné pour la Fédération, c’est pour mettre en place de nouveaux fonctionnements qui ont motivé ma volonté de la présider.

Le dialogue avec tous les acteurs du sport équestre doit être direct. Tous les services fédéraux y sont constamment formés.

On (Acsof, amateurs, propriétaires) vous reproche de ne pas suffisamment pratiquer la concertation. Vous en êtes où aujourd’hui ?

La concertation ne consiste pas à emprunter des méandres compliqués et à s’adresser sans fin à des relais. Les sportifs de haut niveau en équitation représentent une soixantaine de personnes avec qui la Fédération doit avoir des rapports directs.

Le DTN, Pascal Dubois, et les sélectionneurs sont en lien permanent avec les cavaliers et sont toujours disponibles pour aborder et améliorer tous les sujets.

Les athlètes de haut niveau élus au comité fédéral sont autant de relais. Sans compter les instances de concertation de la Fédération, commissions, administrateurs de la Fédération, élus des CRE… De plus, les nombreuses réunions initiées par la FFE partout en France font l’objet de publications internet pour que chacun puisse donner son avis sur les sujets, notamment réglementaires.

La concertation fédérale n’a jamais été aussi large. Encore faut-il vouloir faire l’effort de s’informer !

Il y a de la grogne dans les rangs des amateurs qui semble-t-il désertent les concours. Qu’allez-vous faire pour les remotiver ? La taxe de 4,65 euros par engagement va-t-elle un jour baisser ? Quelle est sa justification ?

La part fixe FFE sur les engagements est la même depuis 1997, cela veut dire pas d’augmentation depuis plus de 12 ans, donc une véritable baisse. Cette part fixe contribue à l’organisation des sports équestres en France, elle finance un système informatique qui gère les engagements, les résultats, les dotations, les répartitions de prix, les classements permanents, etc.

Chaque part fixe que chaque compétiteur règle en s’engageant en compétition vient s’ajouter aux efforts des clubs et de leurs licenciés pour financer les sports équestres.

Quelles sont les priorités de votre politique pour le haut niveau ?

La Fédération conduit une politique sportive qui récompense le travail et la réussite. C’est un projet global à long terme pour susciter l’émergence d’un vivier renforcé de cavaliers de haut niveau. Nous mettons en place des aides fédérales jamais égalées, voire plus importantes que dans aucun autre pays au monde. Elles sont entièrement consacrées à récompenser la performance et à soutenir la formation et la préparation des cavaliers et des chevaux. Les atouts français sont solides, un élevage de grande qualité, une nouvelle génération de cavaliers de talent et de nombreux cavaliers expérimentés aptes à transmettre leur savoir aux nouvelles générations.

Ce projet sportif a été construit sur la conviction que ce sont les bons résultats réguliers d’un nombre suffisant de cavaliers qui feront les grandes victoires et les grands champions. Nous devons augmenter nos efforts pour avoir un choix suffisant de chevaux en parfaite santé pour les grandes échéances.

Quels sont les nouveaux acteurs de l’encadrement du haut niveau ?

Les tâches de la Fédération sont vastes. Nous sommes très ambitieux, autant sur le développement national que sur tout ce qui touche le niveau international. Le travail en équipe est indispensable pour y parvenir, le schéma sportif pour la nouvelle olympiade est maintenant opérationnel avec son encadrement.

Jacques Robert vient d’être nommé président de la commission du sport de haut niveau avec Emmanuel Feltesse comme représentant du comité fédéral.

Christian Paillot est chargé de positionner la France à l’international. C’est une action globale qui n’a jamais fait l’objet d’un tel effort. Concrètement, il vient de lancer le French Equestrian Tour qui réunit nos plus beaux jumpings internationaux. Il suit le dossier Normandie 2014 et il fait campagne pour la présidence du Groupe I de la FEI.

Pierre Ketterer devient le directeur du haut niveau et libèrera ainsi les techniciens, et en particulier notre DTN pascal Dubois pour être davantage sur le terrain.

Qu’est ce qui permettrait d’aider davantage le cheval en France et en particulier les sports équestres?

Dans les années 2000, la Fédération a conduit sa réorganisation en s’unifiant et en allégeant ses structures, ce qui lui donne maintenant davantage de moyens pour agir. Actuellement, ce sont les services de l’Etat qui sont en pleine réflexion pour se recentrer sur leur mission de service public dans l’avenir. C’est l’occasion d’alléger la technostructure au profit du soutien direct à ce qui apporte de la croissance intérieure et permet à notre pays de figurer parmi les grandes nations équestres.

Vous avez des idées ?

L’Etat consacre actuellement moins de 3 millions d’euros aux sports équestres sur plus de 100 millions d’euros qu’il dépense chaque année pour le cheval. Il est nécessaire de réorienter un soutien financier vers les dotations des compétitions en lieu et place des aides saupoudrées à tous les échelons de la filière et du maintien de structures qui n’ont souvent plus d’objectifs d’avenir. Concentrer 20 millions d’e pour irriguer la filière sportive au travers des dotations sur les résultats sportifs nous semble l’action la plus pertinente qui puisse être menée.

On entend souvent dire que Serge Lecomte ne s’intéresse ni à l’élevage ni aux problèmes des éleveurs. Qu’en est-il ? La FFE aurait-elle sa place dans la future « Maison du cheval de sport »

J’ai subi les critiques les plus diverses de la part de personnes qui ne me connaissent pas et qui ne s’informent pas. Mon père, avant moi, était éleveur et c’est l’élevage qui m’a amené à l’équitation. Je considère qu’un éleveur est avant tout un producteur qui doit réagir en fonction de la demande du public, bien avant la satisfaction de ses passions. Je n’ai jamais été de ceux qui attendent d’être aidés et c’est peut être pour cela que je participe difficilement aux lamentations sur le marché du cheval.

La FFE par l’ensemble de sa politique sportive génère de plus en plus de cavaliers à qui elle propose très vite des circuits d’animation sportifs. Cela dynamise le marché de façon permanente pour apporter aux chevaux de sport la plus-value qui est le meilleur service rendu à la filière.

Quel est le rôle de M. Albertini au sein de la FFE ? Avez-vous cautionné sa réponse à la lettre ouverte de Mme Mars ?

François Albertini est secrétaire général de la FFE et a tout simplement exprimé une exaspération partagée par tous ceux qui ont accès aux coulisses de l’équitation.

Les critiques ont la valeur des propositions qui les accompagnent.

Le sport de haut niveau n’est pas la chasse gardée de ceux qui ont enlisé notre Fédération ces dernières années et qui ne semblent pas avoir compris que ce sont les élus de la Fédération qui prennent les décisions.

Quels sont les grands chantiers immédiats ?

Faire gagner les équipes de France, c’est d’ailleurs ce qui est en train de s’accomplir sous nos yeux. Soutenir la croissance des clubs, car c’est leur bonne santé qui permet à l’équitation de se tenir parmi les tous premiers sports français et d’apporter le soutien financier au haut niveau. Prendre toute la place qui revient à notre Fédération dans le cadre de la mise en ligne des paris sportifs et enfin engager une vaste réflexion à notre projet d’évolution des transmissions de nos savoirs équestres.

Un dernier mot ?

En conclusion, les clubs, les concours et les cavaliers de France ont su innover. Nous avons réussi notre démocratisation en offrant l’ouverture du monde équestre au plus grand nombre, notamment par la créativité du Tourisme équestre et du Poney.

Le cheval est en train de reconquérir une place de choix dans notre société. Ce n’est pas le cas partout en Europe. Nous pouvons être fiers de ce que nous avons accompli ensemble. Nous avons le devoir d’être constructifs et attractifs. Notre avenir est à la hauteur du regard positif que nous portons sur le monde du cheval .

Propos recueillis par E. Robert

22/06/2009

Actualités régionales