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Table ronde sur les perspectives pour la race Anglo-arabe : des échanges riches pour un projet ambitieux

Mardi 24 mai s’est tenue à Bordeaux, dans le cadre du Salon de l’Agriculture Nouvelle Aquitaine, la toute première table ronde organisée par l’Association Nationale Anglo-arabe (ANAA). En présence de la Madame la Députée Martine Leguille-Balloy, Présidente du groupe cheval à l’Assemblée Nationale, et animée par Kamel Boudra, cette journée permit à tous de s’exprimer, petits comme grands éleveurs, issus du monde du sport ou des courses, et fut très riche en enseignements. Elle a notamment permis de mieux cerner les problématiques auxquelles la race est aujourd’hui confrontée en réunissant des représentants de l’ensemble de la filière.

Les débats s’articulaient autour de deux grands thèmes, l’élevage d’un côté, et la valorisation / vente de l’autre. « Sur le premier point, nous devons clairement accentuer notre travail sur la sélection des meilleurs reproducteurs » admet Alain James, Président de l’ANAA, « mais également identifier les bonnes souches et inciter les éleveurs qui les possèdent à produire en race pure. Nous avions initié ce travail mais celui-ci doit être renforcé, par exemple en proposant des aides au transfert d’embryon. »

En effet, parmi les idées évoquées par les différents intervenants, face au vieillissement inéluctable des étalons confirmés, le testage des jeunes reproducteurs constitue une piste intéressante visant à accélérer le progrès génétique, que ce soit pour la voie femelle ou la voie mâle. « A cette fin, des mesures incitatives seront mises en œuvre » explique Alain James, « notamment afin de faciliter le testage des meilleurs mâles le temps qu’ils soient testés sur performance, par exemple en rassemblant des générations de poulains mâles de 6 mois à 3 ans tout en les préparant avant leur carrière sportive. Nous pourrions également nous appuyer sur la Jumenterie de Chignac pour proposer aux éleveurs une solution de valorisation à un coût acceptable. Cela fait partie des points à discuter avec le Ministère de l’Agriculture et l’IFCE dans le cadre de la rédaction du prochain contrat d’objectifs et de performances. » Les premières mesures visant à augmenter les primes PACE des juments produisant en Anglo-arabe dès 2021 ont eu pour effet l’augmentation de 20 % du nombre de juments mises à la reproduction. « Mais nous devons faire plus ! »

Côté commercialisation, la situation s’avère positive de manière générale. « Les acheteurs cherchent des Anglo-arabes purs, c’est un fait. Aujourd’hui, un éleveur produisant avec de bonnes souches vend bien. Toutefois, il faut poursuivre le rapprochement du monde de l’élevage et celui de l’utilisation » insiste Alain James. A ce titre, une action est d’ores et déjà en cours de mise en place en partenariat avec le Comité Régionale d’Equitation de Nouvelle Aquitaine. L’objectif : que les éleveurs proposent aux clubs des chevaux adaptés à des tariifs raisonnables pour les vendeurs et les acheteurs.

Une chose semble certaine, l’ANAA, seule, ne sauvera pas la race, et aura besoin de l’implication de tous, éleveurs, cavaliers, propriétaires passionnés, pour la soutenir et lui permettre de se redresser, tant en matière de résultats sportifs que de nombre de naissances, deux données largement corrélées. Aucun marché ne doit être laissé de côté, et notamment l’endurance, discipline pour laquelle l’Anglo-arabe excelle et occupe une place prépondérante du marché, sans oublier les courses, qui représentent 35 % du marché global tenu par la race.

Désormais, l’heure est à la rédaction du plan de développement et à l’identification des ressources financières potentielles, un challenge que le nouveau Conseil d’Administration de l’ANAA va de- voir relever durant les prochains mois.

Le point de vue d’Olivier Robert, cavalier international de saut d’obstacles
« Lors de mes recherches de chevaux pour bâtir ma relève, je suis souvent déçu par le produit né du croisement d’une mère Anglo-arabe et d’un père étranger. A choisir, je préfère rester sur un Anglo-arabe pur. Certains parlent de manque de courage, mais je crois qu’en réalité, c’est tout le contraire. A partir du moment où ils sont en confiance, les appréhensions qu’ils peuvent avoir dans certaines circonstances se transforment en quelque chose d’incroyable. Ce sont des chevaux extrêmement courageux, si tant est qu’ils soient associés au bon ca- valier pour aborder le grand sport. Lorsque je monte Tempo de Paban, ou quand je montais Quenelle du Py, je n’ai jamais manqué de respect pur. Nous avons réellement besoin de cette race. Pour répondre aux besoins des cavaliers de haut niveau, il faut cibler, je pense, les très bonnes poulinières qui sautent de 1,45m à 1,60m, et aller voir leurs propriétaires afin de les convaincre de les conserver et de les mettre à la reproduction, pour ensuite confier leurs produits à la nouvelle génération. »

Le point de vue de Martine Leguille-Balloy, Députée, Présidente du groupe Cheval à l’Assemblée Nationale
« Je ne considère pas que l’Anglo-arabe soit une race menacée car si c’était le cas, cela signifierait que la race irait très mal. Or, ce n’est pas encore le cas. C’est néanmoins le rôle de l’État de veiller au maintien et à la préservation de la biodiversité, quelle qu’elle soit. Mais pour que des aides puissent être envisagées, l’Anglo-arabe doit présenter un plan construit et cohérent afin de justifier ses demandes notamment auprès du Fonds Eperon qui verra son fonction- nement évoluer très prochainement. Les aides agricoles peuvent constituer une partie de la solution pour les éleveurs professionnels. Elles visent à soutenir désormais les investissements en robotique, numérique et génétique. C’est sur ce dernier point que l’Anglo-arabe peut tirer son épingle du jeu. »

Le point de vue de Paul Couderc, Président d’Anglo Course
« Les Anglo-arabes de course appartiennent à la même grande famille que les Anglo-arabes de sport, les deux sont complémentaires. Chez les Anglo-arabes de course, nous avons choisi de pour- suivre la sélection autour des lignées Anglo-arabes traditionnelles en injectant régulièrement du sang Pur-Sang Arabe ou Pur-Sang. A l’inverse, chez les Anglo-arabes de sport, beaucoup d’éleveurs ont utilisé du sang étranger, provoquant un glissement progressif de la race. Peut-être qu’une ouverture aux étalons Anglo-arabes de courses serait une alternative à étudier afin de rester génétiquement dans la race. »

Le point de vue de Pascal Cadiou, Président du Stud-book Selle Française
« L’Anglo-arabe fait partie intégrante des races régionales ayant contribué à la construction du Selle Français dès 1958. C’est un creuset génétique dans lequel les éleveurs de Selle Français peuvent puiser afin d’apporter ses qualités – résistance, esthétique, tissus – à leur production. Le seul critère de sélection à adopter aujourd’hui, à mon sens, est de produire ce que les clients veulent acheter, et pas seulement pour le haut niveau. »

Espagne / Italie : des expériences intéressantes

Raffaele Cherchi, représentant l’organisme Agris (Sardaigne), a confirmé que la situation de l’Anglo-arabe français ressemblait globalement à celle de son cousin Sarde. « Nous rencontrons les mêmes problèmes qu’en France » a-t-il déclaré, « à savoir la castration précoce des mâles, ce qui nous empêche de préserver la génétique. ». De l’autre côté de la Méditerranée, les espagnols tentent de trouver des solutions pour mieux valoriser et vendre. José Maria Parias Cervera, Directeur Technique de l’Association de l’Anglo-arabe Espagnol : « Nous n’avions quasiment pas d’étalons nés en Espagne. Nous importons la plupart du temps la semence de France. Nous commençons seulement à avoir quelques jeunes étalons Anglo-arabes espagnols. Nous travaillons maintenant avec un partenaire technique pour la congélation et nous faisons référencer tous nos étalons au sein de la banque génétique nationale, un organisme pouvant, si la race venait à disparaître, mettre la semence à disposition. » Outre ce travail sur la conservation de la richesse génétique, l’Espagne réfléchit également aux débouchés, avec une action visant à faciliter la relation producteur/utilisateur. « En 2020, nous avons mis en place le programme « Win to Win ». Dans ce cadre, nous mettons en contact les éleveurs avec les cavaliers, principalement amateurs. L’éleveur confie son cheval de 4 ans minimum, débourré, quelle que soit la discipline. Le cavalier prend le cheval à sa charge, et n’a pas besoin de l’acheter. Ce programme permet de valoriser le cheval avec pour objectif final de le vendre. Au bout d’un à trois ans, par contrat, le montant de la vente est partagé 50/50 entre l’éleveur et le cavalier. Bien entendu, nous sélectionnons les chevaux proposés et les cavaliers, et cela fonctionne très bien. »

Pour revoir les échanges :

• 1ère partie (restitution de l’enquête et échanges) : https://fb.watch/di7hiUAGFu/
• 2ème partie (restitution des groupes de travail) : https://fb.watch/di7jmo6DYD/

LC avec communiqué

31/05/2022

Actualités régionales