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Uélème : une jument d’exception

« J’ai acheté la mère d’Uélème après avoir vu sauter un des produits de la souche, c’est par la suite que j’ai appris qu’elle était issue d’une bonne lignée maternelle. Elle était affreuse, avait une force faramineuse et ne supportait Photo 1 sur 6
pas la contrainte. Tout le monde me disait de la vendre. Je l’ai confiée à Olivier Jouanneteau. Uélème a été la chance de sa vie et la mienne a été de le rencontrer. Nous sommes liés par un vrai contrat moral, je lui dois énormément mais j’ai aussi su refuser de grosses offres et garder Uélème. ». C’est ainsi que s’exprimait Daniel Millet, le naisseur d’Uélème, dans le Magazine du Selle Français. Elle a aujourd’hui 23 ans. Sa production qui appartient toujours à Daniel Millet et Olivier Jouanneteau totalise près de 40 produits en ligne directe ou en descendance.

Ce kinésithérapeute, cavalier amateur et éleveur dans l’Oise, est donc le naisseur de la grande Uélème. Ami de longue date d’Olivier Jouanneteau, c’est tout naturellement qu’il lui confie la pouliche en début d’année de 3 ans pour y être débourrée. Celui-ci se souvient d’une jument « qui toisait déjà plus d’1,72 m et était impressionnante par sa vivacité. Il était difficile de lui prendre les pieds et elle répondait avec une rapidité déconcertante. Par contre, elle galopait avec facilité sur le cercle et montrait des moyens à l’obstacle. Je me souviens que la mise ?du surfaix la faisait réagir très violement : elle ruait très fort en grognant. Les jours passaient et ses réactions persistaient. Elle avait juste été montée en «sac à patate » et donnait ses pieds lorsqu’elle est repartie chez son naisseur. En moi-même, je me disais que l’on n’était pas au bout de nos peines avec cette jument. Daniel Millet a failli la vendre dans son année de 3 ans mais son cornage (elle en a été opérée avec succès par la suite) a découragé les acheteurs... Elle est donc revenue dans l’hiver suivant pour faire les 4 ans et je redoutais un peu la suite mais, en fait, en 8 jours, elle a été montée aux trois allures dans le manège : elle avait assimilé le pré-débourrage... »

Qualifiée à 4 ans, la jument fit un refus et un sans faute à la Finale. Elle était à la fois extrêmement regardante et tirait beaucoup ce qui impliquait qu’il fallait toujours la calmer en début de parcours. Cela ne la rendait pas très simple dans le pilotage. Elle n’a pas été qualifiée à 5 ans et ne s’est vraiment révélée qu’à l’âge de 6 ans. Régulière et montrant vraiment ses possibilités, elle se qualifie facilement pour la finale où elle se classe dans les dix premiers. ?« A la remise des prix, j’étais le seul amateur entouré de professionnels, un grand moment... » confie Olivier. C’est au cours de cette année qu’il va acquérir des parts d’Uélème, devenant ainsi copropriétaire de la jument.

Puis le couple gagne en 1995 le critérium 1ère catégorie, au cours duquel, ils sont remarqués par l’entraineur national Patrick Caron qui leur ouvre la porte des CSI. Ils vont participer ainsi aux Coupes des Nations (Hickstead, Falsterbo, Toronto, Washington, Lummen Rotterdam, Linz...), à la tournée Américaine (2e du GP de New York), être vainqueur des Grands Prix des CSI de Saint Lô, Franconville, Vichy, et de Dinard, obtenir de très beaux accessits lors des CSI de la Porte de Versailles, de La Courneuve et de Modène pour ne citer que ceux-là. Ils seront second du Championnat de France 2001. L’un de leurs plus beaux résultats restera leur victoire dans Grand Prix de l’étape Coupe du Monde de Bordeaux devant des tribunes en délire. « Au barrage, le cavalier français a pris tous les risques pour venir battre le Belge Philippaerts, 1e ex-aequo l’année passée avec Melliger (au centième près!), le Hollandais Tops, 3e, et l’Allemand Becker, 4e. Un triomphe inattendu pour Jouanneteau, un agriculteur éleveur et sculpteur ?(si, si !), Picard de 47 ans, et son inséparable jument, la grande, la longue ?« Uélème » (16 ans), qui a sû là se faire petite pour se faufiler entre les obstacles. » relate un grand quotidien daté du 10/02/2002.

Un moral de guerrière et du caractère

Uélème est une grande jument baie d’un 1,80 m, très osseuse, au modèle manquant quelque peu d’harmonie, avec une encolure greffée assez haut, très « hanchée »... Cette « Grande Dame », pas très aimable, est dotée d’un caractère redoutable et d’un moral de guerrière qui lui ont certainement permis de faire la carrière qu’on lui connaît aujourd’hui. Attentive à tout, très vive, elle a d’excellents réflexes et fait preuve d’un grand respect pour les barres. C’est une athlète qui dispose d’énormes moyens mais elle a des humeurs... de jument ! Elle peut être irrégulière et fantasque.

Nelfo du Mesnil, le père, une production compliquée mais qualiteuse

Son père, Nelfo du Mesnil, alezan d’1,69 m fit sa carrière au Haras national de Compiègne. Ce cheval, reconnu comme n’étant pas très « gentil », avait la réputation de transmettre son caractère difficile à sa descendance. Malgré une courte carrière d’étalon ?(il ne fit la monte que de 1983 à 1990), il eu une descendance très qualiteuse. Doté d’un remarquable équilibre, il produit des chevaux destinés plutôt aux professionnels. On y remarque les exportés Une de Malandrie et Bengal Moncée, tous deux lauréats en CSI, ainsi que Tamaris du Bois (ISO 168) et Altéa du Loup (ISO 150).

Nelfo était fils du grand Elf III, l’étalon bai des Lebrun, qui a engendré les étalons Le Sartillais et Versailles II et fut le père d’une pléiade de grands vainqueurs en CSI ou CSIO dont on peut retenir Kaoua II (JO de Los Angeles 1984), les propres frères et sœurs Osyris, Midinette II et Pelfe d’Or, Amulette de Kervec, Edelf Bauchetière, Nicias V et Luoine du Mesnil, la propre sœur de Nelfo.

Luoine, grande gagnante en CSIO (ISO 159) eut une production intéressante avec, entre autre, Daurio du Levant (ISO 128), Floréal du Banco (ISO 132, exporté en Italie) et l’étalon privé Glory du Banco, 11e du championnat des ?4 ans, 11 sans fautes sur 15 parcours à 5 ans puis accidenté. Ce puissant bai a été élu meilleur père de 2 ans en 2003.

Leur mère, Guetna du Mesnil eut une remarquable production, car, outre Luoine et Nelfo , elle produit aussi Melifo du Mesnil (ISO 159), Ondine du Mesnil (ISO 127), mère elle –même de Brise de Mère (ISO 148). Ces juments font référence à la lignée maternelle n°137 de l’Encyclopédie des Grandes lignées du Selle Français d’A.Evain où l’on retrouve Ténébreuse et l’Osmanvillaise comme aïeuls, dont sont issus les étalons Emir et First du Mesnil, Subis, Café Crème, En Kadence et Féticheur...

Uélème issue d’une souche maternelle solide

Uélème est l’avant dernière pouliche de Gazelle. Cette jument baie, très carrossière dans son modèle, fut prolifique car elle eut 11 poulains. Si Uélème en reste le fleuron, sa production fut de bonne qualité. On y distingue Oriant IV (ISO 127, exporté en Italie), Rosa Bonheur, mère des finalistes Gazolina Bonheur (ISO 129) et Huitième Bonheur (ISO 126) et Amzelle Bonheur, bonne compétitrice et mère de La Belle Hélène (ISO 124) et Mamzelle Milou (ISO 129). Daniel Millet acquit la jument chez un boucher chevalin et a conservé trois sœurs d’Uélème à l’élevage.

Quéant, la grand-mère d’Uélème, était une jument baie qui a bien croisé avec le Pur Sang. Sa première pouliche, Belle Star, fille du PS Red Star, a produit les bons Harmonios, Iscariote (ISO 154) et Physalie (ISO 144 puis exportée), tous les trois finalistes à 6 ans, ainsi que Floréal I (ISO 131) et la poulinière Silver Star. Cette poulinière, qui, après une courte carrière sportive, produit Ever Star (ISO 136) et l’étalon privé Funny Star, très bon compétiteur et finaliste à 6 ans (ISO 141). Cet alezan, disparu prématurément en 2000, était impressionnant de force et d’aisance. Silver Star engendra ensuite Idéal Star (ISO 141), le frère de Funny par son père Alloro, fils de Double Espoir.

Belle Star engendra ensuite Amie Star avec le chef de race Jalisco. Mise tout de suite à la reproduction, cette jument mit au monde, entre autre, Easy Star par Ulior des Isles. Etalon national, cet petit bai (1,60 m) fut un excellent compétiteur avec une 2e place au critérium des 6 ans et dans une épreuve du championnat du monde des 6 ans à Lanaken (ISO 149). Puis Amie Star confiée ensuite à Arpège Pierreville, eut Ivory Star, étalon privé « alliant le sang, la force, la souplesse, le respect et l’intelligence des gagnants ». Ce joli bai, doté d’une tête expressive et de bons rayons, fut Champion de France de sa génération à 4 ans. Auteur de 15 sans fautes sur 17 à 5 ans, il est de nouveau en tête du Championnat mais, blessé, ne pourra défendre son titre à la finale. Il est exporté en Italie où il poursuit une belle carrière internationale entamée en France. Il est 6e du Championnat d’Italie des jeunes cavaliers en 2008. Joy Star (Rosire), son cadet, s’illustre en 2000 au concours des étalons de 3 ans. Magique Star, propre sœur d’Ivory, est Champion de France des foals mâles 2000 avant de faire une bonne carrière en CSO (ISO 137).

Le dernier poulain de Quéant, Numidor III, fils du PS Quinquet, fut bon lauréat en CCE (ICC 126).

Quéant est soeur utérine de Taupinée (ISO 127), mère de l’excellent Lama II (ISO 174), Karali (ISO 146) et de l’étalon performer Oural des Jalons.

De cette lignée maternelle (n°187 / 188 de l’encyclopédie des Lignées Maternelle du SF d’A.Evain) descendent les internationaux Rio V (CSIO), Quita de Clairins, Pavigny (CDI), Aïda de Clairins...

5 produits qualifiés ?aux finales de Fontainebleau 2008

Uélème est donc l’auteur d’une exceptionnelle carrière en CSO, qui lui permit d’obtenir l’indice remarquable de 176. Mais cette jument a aussi une carrière de poulinière hors du commun : en 14 ans, elle a engendré 20 poulains sans en « porter » un seul, puisque uniquement par transferts d’embryons. Et le nom de chacun de ses poulains, choisi avec humour, n’est pas sans faire référence, par la consonance ou le thème, à leur illustre mère.

Quant à Olivier Jouanneteau, il est, avec ses cavaliers du haras de Villers, complètement impliqué dans la mise en valeur de cette descendance.

Royal Feu fut choisi comme père de la 1re génération des produits d’Uélème. Naîtront Hachélem et Hélico of Lulu. Hachélem est un petit cheval souple et élégant, « très concours », qui a gagné le CSI * de Béthune et attaque avec succès les CSI ** (ISO 154). Hélico of Lulu est morphologiquement très différent, très « signé maman ». Plus difficile, il dispose de plus de moyens que son frère. Titulaire d’un ISO 150, il a été exporté en Espagne.

Ilème Villers, J’M’Balance et J’Suis Snob naissent de Qualisco III. Si le premier a tourné en compétition, la seconde et la troisième ont accompli une très bonne carrière de CSO tout en ayant une descendance. Tournant en CSI 2 et 3*, la bondissante J’M’Balance (ISO 150), vendue en 2008 aux USA y effectue la tournée Américaine. Sa sœur, J’Suis Snob, copie de sa mère et gagnante en B1 avec une cavalière amateur (ISO de 130), est aujourd’hui aussi vendue.

Le bon Trophée du Rozel qui faisait la monte au haras de Villers est le père de quatre pouliches d’Uélème. Kaélème, du même modèle que sa génitrice, a été lauréate en grand Prix de CSI *** et ****. A la tête d’une jolie descendance, elle vient malheureusement de mourir cette année. La Fille de l’air est poulinière; Matéleme et No Problem Villers, finaliste à 6 ans, sont aujourd’hui vendues.

Ma P’Tite Lulu, fille de Quidam de Revel, est l’un des rares produits d’Uélème de robe alezane. Elle s’est illustrée en cycles classiques et elle occupait en 2007 la 3e place de sa génération au palmarès des 7 ans.

Le père des produits suivants, officie lui aussi au haras de Villers : il y est même né puisqu’il s’agit de Happy Villers. Avec lui, Uélème va engendrer ?Onléme (finaliste à 6 ans), Parlamême et Plusjeléme (finalistes toutes les deux à ?5 ans), et Queen of Lulu (finaliste à 4 ans). Ajoutons Phyloméne, la fille d’Adelfos, finaliste elle aussi à 5 ans, et nous avons 5 produits aux grandes Finales de Fontainebleau 2008. ?De l’exceptionnel !!!

A noter que l’alezane Parlamême, jument sortant de l’ordinaire nous dira Olivier, sera Vice-Championne de France de sa génération, élite et qualifiée pour le championnat du monde de Lanacken...

La production qui suit est aujourd’hui encore à l’élevage de Villers où Uélème, âgée de 23 ans et toujours productive d’embryons (on attend en 2009 des poulains de Norman Pré Noir, Happy Villers et Armitage), est entourée de ses enfants et petits-enfants.

Elle était l’an dernier la jument qui avait le plus de produits à la Grande Semaine. Rare.

Anne Clause-Fougère

(Je tiens à remercier Olivier Jouanneteau et Valérie, sa collaboratrice du haras du Villers pour leur disponibilité et leur gentillesse).

26/03/2009

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