Versailles : Veniss et Quabri de l’Isle couronnés


Cinq mois après avoir remporté le Grand Prix de Genève, (première étape du Grand Slam Rolex), le Brésilien persiste et signe. Celui qui, à 18 ans, avait choisi de quitter son pays, pour venir s’entraîner dans le vivier bruxellois des Grandes écuries internationales de saut d’obstacles, chez Nelson et Rodrigo Pessoa, réalise son rêve de devenir l’un des meilleurs cavaliers du monde.

Le Grand Prix était difficile, les cavaliers avaient plusieurs options à leur disposition, mais le temps était court. Douze trouveront la porte du barrage. Parmi eux, trois Français gonflés à bloc. L’emporter sur terres royales françaises. Mais ce ne sera pas le cas. Patrice Delaveau n’était pas loin de réaliser l’exploit pourtant. Il réalise un superbe sans-faute avec Aquila HDC (Kwpn, Ovidius), en 36’’17. Pas assez pourtant pour inquiéter la jeune Japonaise stupéfiante Karen Polle qui, la première, imprime le meilleur chrono : 35’’58. Philippe Rozier à vouloir faire mieux fautera avec le gris Rahotep de Toscane (Quidam de Revel); ce sera une 9e place. Pedro Veniss entame son parcours à un rythme dense, et l’étalon SF Quabri de l’Isle, son cheval olympique, répond avec souplesse. Nécessaire sur cette piste assez courte. L’étalon de 13 ans né chez Etienne Poisson, fils de Kannan par Socrate de Chivre, a trouvé son cavalier : ils baissent le chrono japonais à 35’’19. Le public est debout. Reste le dernier cavalier, l’Irlandais Denis Lynch et l’étalon belge Echo De Laubry, dont c’était le deuxième 5* après le Saut Hermès. La pression est forte sur leurs épaules. Ils ne failliront pas. Les regards se tournent vers le chrono : 35’’20 ! Ils ratent la couronne pour un centième de seconde.

L’objectif principal de Pedro était une performance devant son public, l’an dernier, aux Jeux olympiques de Rio. Alors Pedro, 32 ans aujourd’hui, prend sa revanche. Après Genève et Versailles ce sera Aix-la-Chapelle. Mais pour le moment, le Brésilien savourait cette nouvelle victoire : « D’autant plus savoureuse qu’elle n’a pas été facile : gagner d’un centième de seconde, c’est encore plus jubilatoire… » Ce petit centième qui aura donc manqué à l’Irlandais Denis Lynch et Echo de Laubry.

Troisième de ce Grand Prix Rolex, la Japonaise Karen Polle est une véritable révélation pour les Européens. Elève de Rodrigo Pessoa, elle démarre à Versailles une tournée européenne : « Je sais que mon nom n’a pas une véritable consonance japonaise : mon père est Américain et ma mère Japonaise et je suis moi-même Japonaise ». Avec With Wings, Karen entame de façon idéale cette tournée européenne après de bons succès sur le continent américain, à Wellington notamment. Les trois premiers terminent le barrage dans la même seconde… Patrice Delaveau également, mais à 98 centièmes il termine cinquième de l’épreuve et meilleur Français avec Aquila HDC : un bon départ de cette saison en extérieur.



Pessoa avait ouvert la voie



Le Brésil avait déjà imprimé son sceau dans le marbre lors de l’épreuve d’ouverture, le FFE French Tour Generali, vendredi après-midi, par un temps mi-figue mi-raisin, mais qui sera le meilleur des trois jours... Rodrigo Pessoa, associé à Status (Satisfaction), son hongre hanovrien de 13 ans, devance de plus d’une seconde la légende de ce sport, le Britannique John Whitaker, 61 ans, et Crumley (Cassus), jeune hanovrien de 9 ans. Troisième, Olivier Guillon, qui fait son retour à ce niveau de compétition, avec Uladine des Nauves (Apache d’Adriers), SF de 9 ans. Jérôme Hurel et Ohm de Ponthual sont 4e, à cause de huit centièmes de seconde, Julien Epaillard est 6e avec Toupie de la Roque, jument de 10 ans.



L’écho des Marseillaises



Superbe victoire d’Olivier Robert et Eros, un fils de Querlybet Hero, dans le prix Del Monte Europe, une vitesse 1m50, alors que le ciel se montrait clément pour cette première nocturne sous les Ors du Château éclairé. C’est la Belge Gudrun Patteet et Sea Coast Ferly qui prennent la deuxième place, suivies du Néerlandais Harrie Smolders/Zinius (Nabab de Reve). Pénélope Leprévost est 5e avec Urano de Cartigny, l’étalon du Haras d’Elle, 9 ans, fils de Diamant et Espérance d’Elle. Juste derrière le couple, Philippe Rozier et Reveur de Kergane (Hornet Rose).



Julien Epaillard remporte deux épreuves, le Prix Le Figaro, avec la fille de Kannan de 10 ans, Toupie de la Roque, déjà 6e de l’épreuve Prix « French Tour Generali », sous la pluie battante. Il réitère son exploit le dimanche matin le Prix Renault, avec Safari d’Auge, le fils de Diamant, devançant le Néerlandais Harrie Smolders et son Kwpn fils de Nabab de Reve, Zinius, pour une demi-seconde.



... et de l’hymne espagnol



Le Grand Prix Renault et de la ville de Versailles, en nocturne, réunissait trente-huit couples, alors qu’au loin s’illuminait le château de Versailles. Lumières dorées dans le soir, répondant aux éclairages dorés des loges. Féerie du lieu. Le parcours, sur des hauteurs de 1,55 m, s’est révélé difficile, ne laissant que douze couples se qualifier, dont Pénélope Leprévost et son nouveau compagnon, le jeune étalon Urano de Cartigny, 9 ans, Simon Delestre et le fils de Chacco Blue, Chadino. Très rapide, Pénélope lance le jeune Urano dans la bagarre, mais ce sera 4 points; sur un parcours si serré et technique, une erreur de jeunesse. Simon Delestre et Chadino fauteront au même endroit... Ils seront 7e et 9e de l’épreuve remportée par l’Espagnol Sergio Alvarez Moya, avec son étonnant Kwpn Arrayan (Baloubet du Rouet) !

Château de Versailles : l’audace du renouveau équestre



Au début des années 2000, l’Académie équestre nationale, sous la houlette de Bartabas, s’installe dans les grandes écuries du domaine de Versailles. Celui-ci renoue alors avec le cheval. Une partie du cheval seulement, car si l’art équestre est à nouveau bien vivant à Versailles, il y manque les sports équestres. Depuis le 5 mai dernier, les voilà dans la place. Ce jour-là s’est ouvert, en fin de matinée, le premier jumping « 5 étoiles » de l’histoire du Château.

Présidente de l’illustre établissement, Catherine Pégard, appuyée par son équipe et notamment l’amoureux du cheval qu’est son administrateur, Thierry Gausseron, donne, avec cette manifestation, une nouvelle impulsion à ces lieux où hommes et chevaux ont en commun une si intime et longue histoire.

Ce premier jumping est le fruit d’une rencontre entre Thierry Gausseron et Gérard Manzinali (MG Events), responsable des concours de Chantilly. A Chantilly, patrimoine et chevaux voisinent à merveille. Pourquoi pas à Versailles ? L’une des principales tâches d’un responsable du patrimoine n’est-il pas de faire vivre, dans les lieux dont il a la garde, ce qui a fait sa richesse et son rayonnement passé ? Certes, la chose n’est pas simple car si le passage du temps provoque le changement, il s’accompagne, bien souvent, d’abandons, de mise au rebut, de disparitions. Tout le génie de l’équipe du château de Versailles est d’avoir compris qu’avec le cheval, il n’y a pas d’abandon mais au contraire, la continuation dans un renouvellement de formes et d ‘apparitions. Le cheval, plus qu’aucun autre animal, a prouvé sa capacité à se métamorphoser et à trouver toujours sa place aux côtés des hommes : cheval de guerre un jour, cheval de sport ensuite, cheval de travail puis cheval de loisir, etc. Le domaine de Versailles peut prétendre vivre, avec le cheval, à l’heure de la modernité tout en puisant directement dans son passé.

Pendant ces trois jours de jumping, en présence des plus grands cavaliers mondiaux sur un parcours très technique, les spectateurs plongent dans la modernité des sports équestres. Mais la manifestation ouvre aussi sur l’art et l’histoire. Les œuvres du sculpteur et peintre Jean-Louis Sauvat sont visibles dans l’un des salons, la galerie des carrosses est accessible entre deux épreuves, la petite bibliothèque de l’Académie accueille des auteurs d’ouvrages sur le splendide animal. Dans l’ombre des grandes écuries, les chevaux crème de Bartabas piaffent et renâclent. La sonnerie claire de leurs fers sur le pavé est celle de leurs ancêtres. Même les passants, peu au fait de l’actualité équestre, s’arrêtent, étonnés, devant les grilles de la cour pour suivre les formidables bonds des chevaux au-dessus des barres. Ce jumping audacieux - car investir cet espace urbain, relativement réduit n’allait pas de soi - donne un nouveau départ au cheval à Versailles alors que le sportif animal trouve dans le domaine, un écrin incomparable.

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