Florian Hessique réalise son film avec ses chevaux
Pourquoi vouloir aborder ce thème de la perte de mémoire ?
« J’ai mon papa qui est atteint de la maladie d’Alzheimer depuis quelques années. Je n’avais pas envie de faire quelque chose sur Alzheimer, je voulais quelque chose de plus léger et surtout j’ai eu l’occasion de rencontrer des personnes qui vivent avec les gens atteintes de problèmes cognitifs. J’ai voulu m’intéresser à elles car je trouve qu’il y a quelque chose de fort car elles abandonnent tout ou une partie de leur vie pour la personne qui subit et qui, pour la plupart du temps, ne les reconnait pas. J’avais envie que cela vienne d’un accident. Et je voulais m’intéresser aux regards de Martin et d’Alice. En fait, m’intéresser à ceux qui restent ».
Pourquoi associer l’équitation et vos chevaux ?
« Plusieurs raisons à cela, j’ai toujours eu envie de faire un film avec mes chevaux puisque les chevaux du film sont les miens et je trouvais que l’accident de cheval s’adaptait bien à ce type de problème. Et puis même si on l’aborde très peu, il y a une sorte de thérapie par le cheval. Essayer de retrouver des sensations avec l’animal dont on est si proche ».
Vous avez dû vous être documenté pour réaliser ce film ?
« J’ai travaillé sur ce trouble de rester plusieurs années dans le coma puis de se réveiller. On romance pas mal car il est vrai qu’il y a peu de gens qui se réveillent après autant d’années de coma. En général au réveil, il n’y a plus de muscle, c’est compliqué de réapprendre à marcher.
Dans ce film, on a voulu faire quelque chose de plus léger, mais ça arrive que des gens se réveillent mais ils n’ont plus aucun repère sur le passé. Ils ont toujours leurs réflexes primaires et savent faire des choses mais ne reconnaissent pas les lieux, les gens. Ils ne se rappellent pas ce qu’ils ont fait avant. Je ne suis renseigné auprès de neurologues et sur les relations avec l’animal, j’ai rencontré des associations qui s’occupent d’enfants autistes et qui font de la thérapie. Je voulais voir les gestes à faire ».
Le titre « l’instant présent » est venu de lui-même ?
« Je n’ai pas cherché longtemps. Ce sont les premiers mots qui ont été écrits. Je trouve qu’on se préoccupe énormément du passé, beaucoup du futur et finalement le présent n’existe jamais réellement. Et si on s’occupait un peu plus du temps présent que de temps qui n’existe que dans notre imagination, on serait peut-être un peu plus heureux ».
Présentez-nous Joshua, ce jeune cavalier ? Est-ce un peu vous ?
« Ah pas vraiment, je n’espère pas (rires). Il y a un trait de caractère commun, le cynisme. Je ne voulais pas qu’il soit uniquement victime, il devait garder un peu de relief. Dans le présent, il subit un peu ce qu’on lui dit parce qu’il ne se rappelle de rien. Et dans le passé, on remarque que c’est quelqu’un qui n’était pas forcément sympathique avec Alice notamment. Il était obnubilé par les résultats.
Il n’y a pas de trait commun, après sur le personnage, il y a une évolution et elle est presque positive, c’est malheureux à dire, parce que l’attention qu’il porte à Alice, au moment présent, c’est quelque chose qu’elle a toujours recherchée avant l’accident. »
Présentez-nous les deux autres personnages, Mario (Martin Lamotte) et Alice (Alice Raucoules) ?
« Alice, c’est une jeune fille éperdument amoureuse de Joshua. Ils ont suivi toute leur scolarité ensemble depuis la maternelle. Ils sont ensemble depuis l’adolescence. Les chevaux, ce n’est pas son univers, ce n’est pas ce qu’elle aime spécialement. Elle a vraiment suivi Joshua dans sa passion un peu destructrice, puisqu’ on voit comment il était avec elle. Ça ne veut pas dire qu’il n’aimait pas Alice, mais ce n’était pas sa priorité. Alice se sent un peu responsable de cet accident. Elle a déjà mis sa vie entre parenthèse avant, puisqu’elle accepte de passer après tout. Et finalement ensuite, ce sentiment de culpabilité plus son amour va finalement la pousser à s’occuper de son cheval et de lui.
Mario, c’était le coach de Joshua, c’est son père aussi. Il perd plus ou moins son fils dans l’accident. Deux ans après, Il perd sa femme et il se retrouve à gérer cette écurie avec Alice. C’est le terrien au grand cœur, bourru et qui ne veut pas montrer ses sentiments et qui a une vie compliquée. Il va se noyer dans le travail pour oublier ce qu’il a vécu ».
Vous êtes cavalier, quels sont vos souvenirs en compétition ?
« Ah mon meilleur souvenir, c’est en 99 à Lamotte-Beuvron quand on a été champions de France par équipe de concours complet avec le club de l’Etrier de Corné. C’est un souvenir impérissable. Les concours à une époque, c’était tous les week-ends. Il y a eu aussi les finales de championnat de France à Saumur en dressage avec Iorga notamment. Bien entendu, et c’est du Iorga, on n’a pas fait de podium, il a fallu qu’on finisse 4e.
Avec Igor de Niafles, qu’on voit un peu dans le film, on a fait du saut d’obstacles avec un pourcentage de victoires intéressant. C’est un poney fiable qui a vraiment un cœur énorme. Il ne s’arrêtera jamais devant un obstacle. Peut importe dans quelle situation on le met, il passe de l’autre côté. C’est du bonheur avec lui. Pour qu’il fasse une barre ou un refus, il faut que ce soit vraiment mal amené. J’ai eu Iorga tout jeune. Et je pense qu’il a pris tous mes défauts. Il est drôle, c’est un malin. Quand il n’a pas envie de travailler, il est capable de se mettre à boiter. C’est un vrai comédien. »
Votre prochain film, « Face à face » sur le milieu carcéral ? vous pouvez nous en dire quelques mots ?
« J’ai découvert il y a quelques années, le métier de conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation qui a un rôle important dans notre société et que peu de gens connaissent. C’est une personne qui est chargée, au sein du centre national d’évaluation, à Fresnes notamment d’évaluer sur des cycles de six semaines, des détenus à gros profils, qui ont pris plus de 15 ou 20 ans de prison. Ils sont arrivés à plus de la moitié de leur peine et ils font une demande de remise en liberté. Ces personnes vont donc faire un rapport pendant six semaines qui sera ensuite remis au juge d’application des peines, pour savoir si on remet en liberté ou pas en liberté le détenu.
J’ai trouvé cela passionnant. Le fait aussi de se ce que l’on a dans le dossier, l’horreur du dossier et la personne que l’on a en face. Ce qui n’excuse en rien les faits mais il y a toujours un décalage ou on se dit, on a l’impression d’avoir en face de nous un gamin qui n’a pas pu faire ça. C’est c’st angle que j’ai voulu suivre. On va commencer à tourner à paris et à Dreux en septembre et logiquement le film sortira fin 2022 ».
Film sorti en salle le 9 juin dernier avec Alice Raucoules, Florian Hessique, Martin Lamotte.
S. Proust
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