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Anjou, terre de Complet : Jean Teulère, la force tranquille

Nous commençons aujourd’hui une série d’articles sur les cavaliers de Complet qui, en Anjou, on trouvé un terrain fertile à leur sport favori. C’est avec Jean Teulère que nous ouvrons cette page d’histoire angevine.


C’est un grand nom du complet, connu et reconnu de tous, sur les concours nationaux, comme internationaux. Il s’est construit par lui-même, a su se faire épauler par les bons intervenants, est présent depuis quelques dizaines d’années au sommet du top 10 du complet français. Qui est Jean Teulère au final ? D’aussi loin qu’il s’en souvienne, Jean Teulère a toujours été attiré par l’animal « cheval ». Tout jeune, il a écouté, fasciné, des histoires familiales narrant ce que son père avait vécu avec une jument pendant la IIe Guerre. De l’aspect mythique à la séduction, il n’y a qu’un pas : le jeune garçon accompagne vite sa famille voir des concours régionaux. L’attirance grandit alors devant cet animal qui, de plus, présente un grand attrait esthétique. Pour ses 14 ans, Jean Teulère commence à monter dans les clubs de sa région bordelaise sur de petits barbes venant d’Algérie, montures sans beaucoup de travail. En mai 68, il va profiter de cinq longs mois de vacances, car sa famille possède une maison proche de son centre équestre, et passer beaucoup de temps à aider. Alors il écoute des conseils très avisés et acquiert beaucoup de pratique dans ce club hippique de base où l’on s’entraîne sur des exercices intelligents et variés qui l’amènent à débuter en compétition, en complet.


Le dressage des « 1e, 2e série » est alors très intéressant : on attend des néophytes cessions, demi-tours autour des hanches, contre-galop épaule-en-dedans… On est bien proche, dans ces premiers niveaux, des exigences des reprises amateur 1 d’aujourd’hui. Il faut donc travailler, apprendre rapidement les bases pour les présenter efficacement. Jean Teulère reste, de ses 14 à ses 18 ans, dans cette structure. Il y améliore la technique, mais aussi les soins aux chevaux et sait identifier l’inconfort d’un cheval qui prépare des coliques ou un coup de sang. Il est sensibilisé aux soins, mais aussi tout simplement à l’observation des chevaux. Il devient un homme « complet » dans sa discipline. Etant étudiant, il ressent une attirance de plus en plus importante pour les chevaux. Avec son bac littéraire en poche, il pense un moment à être médecin et commence ses études universitaires qu’il n’approfondit pas puisque son sport le fascine de plus en plus. A ce moment, il décide de rejoindre les écuries de Bentejac - auréolé de ses quatre titres de champion de France. Il y travaille essentiellement des chevaux de commerce qu’il ne garde pas longtemps sous sa selle. Pourtant, cette formation « sur le tas » lui permet d’avancer : il cherche, développe ses sensations, se pose des questions pour finalement prendre du métier en épreuves, sur le « test ultime ». C’est alors la participation, difficile, à un championnat de France junior qui se solde par une chute. Pourtant, l’année suivante, en 1973, il part sur le championnat de France sénior avec des chevaux moyens. Ce passage à Fontainebleau lui permet de rencontrer et d’observer des chevaux d’autres horizons. Il reste plusieurs années chez Dominique Bentejac, avec des aspirations - de plus en plus espacées - à la reprises de ses études. Ce mode de vie bascule quand il part en Dordogne et se lance dans une branche pour laquelle il n’a jamais été préparé, celle de l’agriculture : il a épousé une terrienne, ils travaillent - peu - leurs chevaux, sortent en concours hippiques. Le manque de temps conduit à un entraînement insuffisant, à une baisse technique, même si, depuis sa Dordogne, il vient faire, en 1979, un championnat de France à Saumur. La vie en Dordogne va bientôt s’achever : en venant à Saumur, Jean Teulère a vu fonctionner l’équipe de Jean-Paul Bardinet rencontré en Aquitaine, alors qu’il était encore junior…


Les années Bardinet


Jean Teulère a remarqué cette cohésion, cette émulation qui anime l’équipe Bardinet à Saumur. C’est une ambiance très différente de celle qu’il vit, seul, dans sa Dordogne. En 1981, Philippe Jouy, alors DTN, et Jean-Paul Bardinet, proposent à Jean Teulère de venir à Saumur : il accepte volontiers la place offerte à l’ENE. C’est alors l’occasion unique de monter à cheval sous la houlette de J-P Bardinet : il travaille ses propres chevaux, mais aussi ceux de Thierry Pomel. Pharaon et Hélium sont alors les meneurs de son piquet : ils sont de niveau international et permettent de participer à de belles épreuves (Pharaon fait par exemple très vite Boekelo…). Le moment est donc venu de se lancer sérieusement sur les 3*, avec des chevaux propriété de l’ENE, de la Fédération ou des Haras. C’est à ce moment-là que le statut de Jean Teulère change véritablement et qu’il s’installe sur le Saumurois pour profiter pleinement de l’ENE et de J-P.Bardinet. L’hiver venu, il s’attelle à son monitorat qu’il passe à l’Ecole de Cavalerie où il a emmené ses propres chevaux, et surtout Godelureau. Il rencontre alors beaucoup de personnes intéressantes - telles que P. Le Rolland ou J-C.Vallat, de grands pédagogues). Après cette période d’intense formation, il va être temps de mettre en pratique…


Les années de réussites


Les bons chevaux, les bons concours vont défiler… La première jument marquante de cette époque est certainement En-Douce qui permet à Jean Teulère de faire ses premiers championnats du monde en 1982 à Luhmülen. La première consécration sera celle de Godelureau aux Europe, en 1985, à Burghley; ils sont 8e en individuel et 2e en équipe et le cavalier se souvient, avec un grand sourire d’ « un très joli tour ». En 1987, Mohican lui permet de remporter Boekelo. En 1988, il est 7e à Séoul, toujours avec Mohican, et cette fois, avec une légère amertume : « le cheval pouvait faire mieux que ça… ».


En 1992, Thierry Touzaint remplace J-P. Bardinet, mais, entre-temps, Jean Teulère avait donné sa démission à l’ENE et était parti à Etretat pour participer à l’ouverture d’une grosse écurie de concours où il avait emmené tous ses chevaux. Ce n’est pas une expérience concluante, et il revient en terre saumuroise dès 1993 pour participer aux entraînement de Thierry Touzaint. C’est une belle année, où l’équipe des championnats d’Europe est vice-championne à Luhmülen et où J-L Bigot l’emporte en individuel. En 1996, Jean Teulère est 4e en individuel à Atlanta avec Rodosto, son cheval personnel. Il garde un beau souvenir de ce concours, même si son cheval, est « un peu moins gaillard qu’aux championnats du monde » précédents. L’année 2000 marque la séparation des épreuves équipes et épreuves individuelles. Mais une chute sur le cross avec Amouncha, « jument super honnête », ne permettra pas l’accès au classement au cavalier saumurois (même s’il finit son cross, puisque le règlement le permettait alors).


Les années Espoir


En 2002, Espoir de la Mare, propriété de son cavalier, lui apporte le sacre : ils sont champions du monde en individuel à Jerez et vice-champions par équipe ! Ce concours était le dernier championnat du monde en format long, et « il fallait de vrais, vrais chevaux », pour s’imposer cette année-là, ce qu’Espoir fit avec brio. En 2003, c’est, à nouveau, une belle médaille à Punchestown pour les championnats d’Europe : l’équipe est en argent, Jean et Hobby sont 13e et N. Touzaint l’emporte. Espoir est toujours fidèle dans ce piquet de gagnants dont dispose alors son cavalier : en 2004, il rapporte un beau titre olympique à Athènes, et une 4e place en individuel ! En 2006, il poursuit avec une 7e place individuelle aux Mondiaux d’Aix-La-Chapelle, et une nouvelle 4e place à Pratoni aux championnats d’Europe en 2007. Il commence dès ces années à être épaulé par un grand bai, Matelot du Grand Val, par Eveil de la Cour. Dès 2008, on commence en effet à le voir aux classements dans les grosses épreuves : il a 8 ans et finit par exemple 6e de la Coupe du Monde de Martinvast ! En 2011, ce cheval au fort caractère poursuit sa progression en classant les 4* (il est 14e à Pau). Sur le difficile parcours de Blenheim, en 2013, il signe aussi une magnifique 2e place.


2014 : Matelot


Cette année va se révéler importante : elle est celle des Jeux Equestres Mondiaux en France ! Jean Teulère compte toujours sur son fidèle Matelot qui a bien commencé son année en étant 3e de la Pro Elite de Tartas. Il s’appuie de plus sur des chevaux plus verts, comme Remember Cacharel ou Lascar de Kergoet qui préparent la relève pour rester au plus haut niveau… sous les yeux attentifs d’Espoir, toujours curieux, depuis son paddock, et toujours en grande forme puisqu’il présentait encore un championnat de France de dressage, l’an passé en 2013, à l’âge de 21 ans, avec une élève. Le secret de Jean Teulère ? On serait tentés de dire, le respect et l’écoute des chevaux !


13/06/2014

Actualités régionales